Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 septembre 2017 et un mémoire enregistré le 10 janvier 2018, le GFR des Genêts, représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté du 10 mars 2016 ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Branville, à titre principal, de prendre une décision de non-opposition à sa déclaration de coupe et d'abattage d'arbres, à titre subsidiaire de procéder à une nouvelle instruction de sa déclaration préalable, le tout dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Branville le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision en litige méconnaît l'article R 424-5 du code de l'urbanisme en ce qu'elle n'est pas suffisamment motivée ;
- la décision ne pouvait, sans méconnaître l'article R 431-4 du code de l'urbanisme, être prise au regard de documents autres que ceux limitativement prévus par cette disposition ;
- l'article R 111-2 du code de l'urbanisme a été violé dès lors qu'il appartient à la commune de démontrer l'existence et la gravité du risque d'effondrement du terrain ; la coupe d'arbres ne se fera pas dans le périmètre de sécurité des cavités ; la demande porte sur une coupe, à leur base, d'arbres et non sur un défrichement, n'impliquant aucun risque pour la stabilité du sol ;
- c'est à tort que la commune a opposé la méconnaissance de l'article 2N du règlement du plan local d'urbanisme ; le projet pouvait être autorisé en étant assorti de prescriptions.
Par des mémoires en défense, enregistré les 1er décembre 2017 et 24 mai 2018, la commune de Branville conclut au rejet de la requête et à la condamnation du GFR des Genêts à lui verser une somme de 2 500 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par le GFR des Genêts ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code forestier ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Brisson ;
- les conclusions de M. Derlange ;
- les observations de MeA..., représentant le Groupement Foncier Rural des Genêts.
Considérant ce qui suit :
1. Le groupement foncier rural (GFR) des Genêts a, le 24 novembre 2015, déposé auprès du maire de la commune de Branville un dossier de déclaration préalable en vue de la coupe et de l'abattage d'arbres sur la parcelle cadastrée section C n° 338 au lieu-dit Le Bois Pesnole. Aux termes de l'arrêté en litige du 10 mars 2016, le maire a procédé au retrait de la décision de non-opposition, née le 24 décembre 2015, et s'est opposé à la réalisation par le GFR des travaux envisagés. Le GFR des Genêts relève appel du jugement du 18 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article R. 130-1 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : " Les coupes et abattages d'arbres sont soumis à déclaration préalable dans (...) les espaces boisés classés " et aux termes de l'article R 423-23 du même code, en vigueur à compter du 1er janvier 2016 : " Doivent être précédés d'une déclaration préalable les travaux, installations et aménagements suivants (...) g) Les coupes et abattages d'arbres dans les bois, forêts ou parcs situés sur le territoire de communes où l'établissement d'un plan local d'urbanisme a été prescrit, ainsi que dans tout espace boisé classé en application de l'article L. 113-1 ;(...) ". Il ressort des documents graphiques du plan local d'urbanisme de Branville que la parcelle C 338 sur laquelle se situent les boisements objets de la déclaration de coupe et d'abattage d'arbres est localisée dans un espace boisé classé. Les coupes et abattages d'arbres ne peuvent donc être mis en oeuvre sans une déclaration préalable auprès du maire de la commune concernée.
3. En premier lieu, aux termes de l'article R 424-5 du code de l'urbanisme : " Si la décision comporte rejet de la demande, si elle est assortie de prescriptions ou s'il s'agit d'un sursis à statuer, elle doit être motivée. (...) ". La décision en litige énonce avec suffisamment de précision les éléments de fait et de droit sur lesquels elle repose, permettant ainsi à son destinataire d'en connaître les motifs et d'en discuter utilement. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré du défaut de motivation de la décision en litige.
4. En deuxième lieu, le moyen tiré par le GFR de la méconnaissance par le maire de la commune de Branville des dispositions de l'article R 431-4 du code de l'urbanisme relatif à la constitution du dossier de permis de construire, présente un caractère inopérant dès lors que la décision en litige est afférente non pas à un permis de construire mais au retrait d'une décision de non-opposition à déclaration de travaux. Au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de la commune de Branville aurait demandé au pétitionnaire des pièces autres que celles limitativement énumérées à l'article R 431-35 du code de l'urbanisme.
5. En dernier lieu, aux termes de l'article R 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations " et aux termes de l'article N 2 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les autorisations d'utilisation des sols peuvent être refusées ou n'être accordées que sous réserve de prescriptions spéciales propres à assurer la sauvegarde de la qualité des eaux d'alimentation et la préservation des captages ou forage contre des contaminations de toute origine ". En application de ces dispositions, l'autorité compétente pour se prononcer sur la déclaration de travaux dont elle est saisie peut, eu égard aux circonstances particulières de la situation d'espèce, s'opposer à ladite déclaration lorsque les risques d'atteinte à la sécurité ou la salubrité publique le justifient ou assortir son autorisation de prescriptions spéciales.
6. Pour s'opposer aux travaux de coupe et d'abattage d'arbres le maire de Branville s'est fondé sur la circonstance que le terrain est situé dans un secteur où existent des cavités souterraines ainsi que dans le périmètre de protection rapprochée du captage d'eau potable du Pré à l'Eau déclaré d'utilité publique le 14 septembre 2006.
7. Il ressort des pièces du dossier et notamment des documents graphiques du plan local d'urbanisme de la commune de Branville, de la carte des risques souterrains Géorisques et Infoterre, du plan cadastral du secteur, dont un extrait faisant apparaître les cavités souterraines a d'ailleurs été joint au compte-rendu établi par la direction départementale des territoires et de la mer à la suite d'une visite sur place du 24 janvier 2017, que la présence de cavités souterraines sises pour l'une au nord de la parcelle C 338 et pour l'autre au nord-ouest de cette parcelle en jouxtant la parcelle C 336 est avérée sur le territoire communal. Le rapport établi par le Bureau de recherche géologique et minière, en mai 2016, à la suite d'une visite sur place effectuée en avril, évoque une carrière souterraine accessible à flanc de coteau, dont les dimensions ne sont pas connues mais qui semble vaste, en précisant que certaines zones anciennement accessibles ne le seraient plus en raison d'éboulis. Si l'expert forestier, mandaté par le GFR, dans son rapport du 13 novembre 2017 complété le 20 novembre 2017, indique qu'un reboisement stabilise le sol, il précise également que des précautions doivent être prises autour de la bouche d'aération nord afin d'éviter toute vibration du sol et que des points de vigilance doivent être observés lors des travaux forestiers eu égard notamment à la mécanisation de l'exploitation forestière. Ainsi, même si certains de ces documents sont postérieurs à la décision contestée, ils révèlent un état des lieux antérieur à cette décision caractérisé par un sous-sol grevé de cavités souterraines et par la présence d'un captage d'eau.
8. Si l'expert forestier, dans le rapport susmentionné, indique que les travaux de coupe et de reboisement permettront la protection de la qualité de l'eau dès lors que seront respectés les secteurs sensibles tels que le captage des eaux et la bouche d'aération située au nord et que ces travaux seront effectués selon des modalités techniques qu'il a précisées consistant en une coupe à blanc des 4/5ème de la superficie du terrain sans mise à nu de celui-ci complétée par un reboisement, à faible densité, en essences variées et avec des éclaircies fréquentes, il n'est, en l'espèce, pas établi que les travaux envisagés par le GFR devaient être réalisés selon de tels procédés. En outre, le requérant ne saurait utilement se prévaloir des termes de l'arrêté du 2 juin 2015 par lequel le GFR avait été autorisé par le préfet, sur le fondement de l'article L 124-5 du code forestier, à procéder au défrichement de la parcelle, cet arrêté ayant été abrogé le 11 août 2015.
9. Il résulte de ce qui précède que les travaux de coupe et d'abattage d'arbres étant susceptibles d'affecter la stabilité du sol de la parcelle comportant outre une source d'eau, deux cavités souterraines et un sous-sol partiellement inconnu et de polluer la source, le GFR n'est pas fondé à soutenir qu'en procédant au retrait de la décision de non-opposition à sa déclaration de travaux, le maire de la commune de Branville a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.
10. Il s'ensuit que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Sur les frais du litige :
11. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Branville qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande le GFR au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du GFR des Genêts le versement à la commune de Branville d'une somme de 1 500 euros en application de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du GFR des Genêts est rejetée.
Article 2 : Le GFR des Genêts versera à la commune de Branville une somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Groupement foncier et rural des Genêts et à la commune de Branville.
Délibéré après l'audience du 11 décembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- Mme Bougrine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 décembre 2018.
Le rapporteur,
C. BRISSONLe président,
A. PEREZ Le greffier,
A. BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 17NT02711 2