Par une requête, enregistrée le 19 mai 2020, le préfet de l'Orne demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 18 mars 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du président de la communauté d'agglomération Flers Agglo du 9 janvier 2019 ;
Il soutient que :
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de ce que l'annexe projetée présente des dimensions disproportionnées par rapport à celles de la construction principale et n'a pas vocation à accueillir des activités secondaires nécessitées par la destination principale ;
- le garage sur lequel porte le permis ne peut être regardé comme une annexe dont les dispositions de l'article de l'article N.2 du règlement du plan local d'urbanisme de Messei autorise la construction en zone N.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juillet 2020, la communauté d'agglomération Flers Agglo conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le préfet de l'Orne doit d'office, en application des dispositions de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative, être regardé comme s'étant désisté de sa demande présentée devant le tribunal ;
- les moyens soulevés par le préfet de l'Orne ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la Cour a désigné Mme B..., présidente assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Pérez, président de la 2ème chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., substituant Me D... et représentant la communauté d'agglomération Flers Agglo.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 9 janvier 2019, le président de la communauté d'agglomération Flers Agglo a délivré à M. F... un permis de construire portant sur l'extension d'une maison d'habitation implantée sur la parcelle cadastrée section ZA n° 38 sur le territoire de la commune de Messei (Orne) ainsi que l'édification sur cette même parcelle d'un garage. Le préfet de l'Orne a, en application des dispositions de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, déféré cet arrêté au tribunal administratif de Caen. Par un jugement du 18 mars 2020, dont le préfet de l'Orne relève appel, le tribunal administratif de Caen a rejeté le déféré préfectoral.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".
3. Il ressort du dossier de la procédure qu'au soutien du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article N.2 du règlement du plan local d'urbanisme de Messei, le préfet de l'Orne a soutenu que le garage dont le permis contesté autorise la construction ne peut être regardé comme une annexe au sens de ces dispositions dès lors notamment que ses dimensions ne sont pas réduites et que son " caractère disproportionné [...] exclut toute vocation à accueillir des activités secondaires nécessitées par la destination principale ". Pour écarter le moyen, les premiers juges se sont bornés à relever que la superficie du garage était inférieure à celle de la maison d'habitation, sans se prononcer sur l'argumentation ci-dessus résumée, laquelle n'était pas inopérante. Dès lors, les premiers juges ont insuffisamment motivé leur jugement.
4. Il suit de là que le jugement attaqué est irrégulier et doit être annulé. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur le déféré préfectoral formé devant le tribunal administratif de Caen.
Sur l'application des dispositions de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative :
5. Aux termes de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative : " En cas de rejet d'une demande de suspension présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 au motif qu'il n'est pas fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision, il appartient au requérant, sauf lorsqu'un pourvoi en cassation est exercé contre l'ordonnance rendue par le juge des référés, de confirmer le maintien de sa requête à fin d'annulation ou de réformation dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce rejet. A défaut, le requérant est réputé s'être désisté. / Dans le cas prévu au premier alinéa, la notification de l'ordonnance de rejet mentionne qu'à défaut de confirmation du maintien de sa requête dans le délai d'un mois, le requérant est réputé s'être désisté. ".
6. L'article L. 554-1 du code de justice administrative reprend, s'agissant des demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes des communes, les dispositions de l'article L. 21316 du code général des collectivités territoriales. Aux termes de ces dernières dispositions : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. (...). / Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension (...) ".
7. Il résulte des dispositions précitées que le référé sur déféré prévu à l'article L. 21316 du code général des collectivités territoriales n'entre pas dans le champ d'application de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative. Par suite, contrairement à ce que fait valoir la communauté d'agglomération Flers Agglo, le préfet de l'Orne ne saurait être réputé s'être désisté de sa demande au motif qu'il n'a pas, après le rejet du référé sur déféré, confirmé le maintien de sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 9 janvier 2019 :
8. Aux termes des dispositions de l'article N.2 du règlement du plan local d'urbanisme de Messei : " (...) Les occupations et utilisation du sol ci-après sont admises (...) / L'aménagement et le changement de destination des constructions existantes ainsi que leur extension limitée (...) et la construction, de leurs annexes (...) ". Selon l'article 4 de ce règlement, l'annexe est définie comme " construction dépendant d'une construction ou d'un ensemble de construction plus importantes (mais non accolées à elles), qui a vocation à accueillir des activités secondaires nécessitées par la destination principale. (...). ".
9. Il ressort des pièces du dossier que le permis porte, d'une part, sur une extension de 26 mètres carrés d'une maison individuelle d'habitation de 71,50 mètres carrés et, d'autre part, sur la construction d'un garage de 77 mètres carrés sur une parcelle classée en zone naturelle. Eu égard à ses dimensions, le garage projeté ne peut être regardé comme un bâtiment ayant vocation à accueillir les activités secondaires nécessitées par la maison ni, par suite, comme une annexe au sens des dispositions précitées de l'article N.2 du règlement du plan local d'urbanisme de Messei. Dès lors, le permis attaqué est entaché d'illégalité en tant qu'il autorise la construction du garage.
10. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Orne est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du président de la communauté d'agglomération Flers Agglo du 9 janvier 2019 seulement en tant qu'il porte sur le garage.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, lequel n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par la communauté d'agglomération Flers Agglo et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen du 18 mars 2020 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du président de la communauté d'agglomération Flers Agglo du 9 janvier 2019 est annulé en tant qu'il porte sur le garage.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions présentées par la communauté d'agglomération Flers Agglo sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au préfet de l'Orne, à la communauté d'agglomération Flers Agglo et à M. G... F....
Une copie sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire d'Argentan en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.
Délibéré après l'audience du 10 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme B..., présidente,
- M. A...'hirondel, premier conseiller,
- Mme E..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 novembre 2020.
Le rapporteur,
K. E...
La présidente,
H. B...
Le greffier,
A. BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT01529