Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 mars 2018, M. C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 9 mars 2018 ;
2°) de lui allouer à titre provisoire le bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
3°) d'annuler l'arrêté du préfet du Finistère du 6 décembre 2017 ;
4°) d'enjoindre au préfet du Finistère de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Il soutient que :
- en lui refusant l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle, les premiers juges ont entaché le jugement attaqué d'irrégularité ;
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des articles L. 313-15, L. 313-10 et L. 313-7 du même code et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 avril 2018, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 avril 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Berthon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant albanais, né le 22 juin 1999, déclare être entré irrégulièrement en France en août 2016 à l'âge de 17 ans. Il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du département du Finistère et scolarisé au lycée professionnel et technologique Jean Chaptal à Quimper dans la filière sciences et technologies de laboratoires (STL). Le 31 mai 2017, il a demandé un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 313-11 (7°), L. 313-15 et L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 6 décembre 2017, le préfet du Finistère a rejeté cette demande, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office. M. C... relève appel du jugement du 9 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :
2. M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 avril 2018. Par conséquent, sa demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle est devenue sans objet.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. M. C...soutient qu'en refusant à tort de lui accorder le bénéfice provisoire de l'aide juridictionnelle au motif qu'il ne justifiait pas avoir présenté une demande d'aide juridictionnelle au plus tard lors de l'introduction de sa requête, le tribunal administratif de Rennes a entaché son jugement d'irrégularité.
4. Toutefois, si toute juridiction administrative est tenue de transmettre, à peine d'irrégularité de son jugement, une demande d'aide juridictionnelle introduite devant elle sans délai au bureau d'aide juridictionnelle compétent et de surseoir à statuer jusqu'à ce qu'il ait été statué sur cette demande, il n'en va pas de même d'une demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle, qu'une juridiction administrative peut accueillir ou non par une décision insusceptible de recours qui est, quel que soit son bien-fondé, sans incidence sur la régularité du jugement qui en est le support.
5. Il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué, qui est par ailleurs suffisamment motivé, n'est pas irrégulier.
Sur la légalité de l'arrêté contesté du préfet du Finistère :
6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigé. ".
7. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans et qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle. Disposant d'un large pouvoir d'appréciation, il doit ensuite prendre en compte la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient seulement au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a portée.
8. Il ressort des pièces du dossier que, depuis son entrée en France, M. C...a été scolarisé en seconde puis en première STL, qu'il est un élève sérieux, qui a obtenu d'excellents résultats en dépit de son handicap linguistique initial, et qu'il bénéficie du soutien de ses camarades et de ses professeurs. Toutefois, il ressort également du même dossier qu'à la date de l'arrêté contesté M. C...ne pouvait être regardé comme un jeune majeur isolé, puisqu'il continuait d'entretenir des relations avec ses parents en Albanie, ceux-ci l'ayant aidé par exemple à constituer son dossier de demande de titre de séjour. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Rennes a jugé que l'arrêté contesté n'était pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein
droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
10. Eu égard aux conditions dans lesquelles M. C...est entré en France, à la brièveté de son séjour à la date de l'arrêté contesté, au fait qu'il est célibataire et sans charge de famille et que, comme il a été indiqué au point 8, il n'est pas sans attaches en Albanie, où vivent ses parents avec lesquels il a gardé des liens, l'arrêté contesté du préfet du Finistère n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Cet arrêté n'a donc pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales rappelées au point 9.
11. Pour le surplus, M. C... se borne à reprendre devant le juge d'appel les mêmes moyens et les mêmes arguments que ceux invoqués en première instance. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges et tirés de ce que l'arrêté contesté est suffisamment motivé et qu'il n'a pas méconnu les articles L. 313-7 et L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
12. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle présentée par M.C....
Article 2 : La requête de M. C... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Finistère.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Coiffet, président,
- M. Berthon, premier conseiller,
- Mme Le Bris, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 novembre 2018.
Le rapporteur,
E. BerthonLe président,
O. Coiffet
Le greffier,
M. D... La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 18NT01144