Par ailleurs, M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 5 mars 2020 par lequel le préfet du Finistère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra, le cas échéant, être reconduit d'office.
Par un jugement n° 2001172 du 29 juin 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédures devant la cour :
I) Par une requête enregistrée le 9 janvier 2020 sous le n°20NT00084 M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) de lui allouer le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler l'ordonnance du président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Rennes du 18 décembre 2019 ;
3°) d'annuler la décision par laquelle le préfet du Finistère a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour ;
4°) d'enjoindre au préfet du Finistère de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- sa demande d'annulation présentée devant le tribunal administratif de Rennes est recevable dès lors qu'il justifie avoir déposé une demande de titre de séjour auprès de la préfecture ; si la requête avait été communiquée au préfet ce dernier aurait pu confirmer la réalité de la demande de titre de séjour déposée le 20 juin 2019, dont il apporte un commencement de preuve en produisant un accusé de réception de prise de rendez-vous ;
- la décision implicite de rejet contestée n'est pas suffisamment motivée ;
- cette décision méconnaît les dispositions des 4° et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 juillet 2020 le préfet du Finistère conclut, à titre principal, au non-lieu à statuer et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête.
Il soutient que :
- en réponse à la demande de titre de séjour présentée par M. D..., il a pris un arrêté du 5 mars 2020 qui s'est substitué à la décision implicite de rejet contestée, de sorte que la requête est devenue sans objet ;
- les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 janvier 2020.
II) Par une requête enregistrée le 2 juillet 2020 sous le n°20NT01854 M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 29 juin 2020 ;
3°) d'annuler l'arrêté du préfet du Finistère du 5 mars 2020 ;
4°) d'enjoindre au préfet du Finistère de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative et dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé ;
- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé et révèle un défaut d'examen de sa situation particulière ;
- il porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît les dispositions des 4° et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 septembre 2020 le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 août 2020.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant camerounais né le 21 janvier 1988, déclare être entré en France au mois de mai 2016. Le préfet d'Ille-et-Vilaine a pris à son encontre le 20 mars 2017 une mesure d'éloignement qu'il a contestée devant le tribunal administratif de Rennes, lequel a rejeté son recours par un jugement du 3 avril 2017. Il s'est marié le 27 mai 2017 avec une ressortissante française dont il a reconnu le 13 février 2018 l'enfant né le 2 juin 2005. Le préfet du Finistère a pris à son encontre, le 10 février 2018, une nouvelle mesure d'éloignement, qu'il n'a pas davantage exécutée. Le 20 juin 2019, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de ressortissant français et la régularisation de sa situation sur le fondement des dispositions des 4° et 7° de l'article L. 313-11. Par un arrêté du 5 mars 2020, le préfet du Finistère a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office. Par deux requêtes enregistrées sous les n° 20NT00084 et 20NT01854, qu'il y a lieu de joindre, M. D... relève appel, respectivement, de l'ordonnance du 18 décembre 2019, par laquelle le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Rennes a rejeté comme irrecevable son recours tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet du Finistère a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour, et du jugement du 29 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté son recours tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 mars 2020.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée du 18 décembre 2019 :
2. D'une part, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque (...) elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; (...) ". Aux termes de l'article
R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) ". Aux termes de l'article R. 412-1 de ce code : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de l'acte attaqué ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation. (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article R. 612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. (...) / La demande de régularisation mentionne qu'à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. La demande de régularisation tient lieu de l'information prévue à l'article R. 611-7. ".
4. Pour rejeter comme manifestement irrecevable la demande présentée par
M. D... et tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour, le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur le motif tiré de ce que l'intéressé n'établissait pas avoir déposé une telle demande en se bornant à produire la copie d'une lettre de la préfecture lui confirmant la réservation d'un rendez-vous en vue de se présenter devant l'administration. Il ressort toutefois des pièces des dossiers, en particulier des énonciations du préfet lui-même, que l'administration a bien été saisie le 20 juin 2019 d'une demande de titre de séjour, qui a été explicitement rejetée par un arrêté du 5 mars 2020. Par suite, c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, qui doit en conséquence être annulée, le premier juge a rejeté comme irrecevable le recours formé devant le tribunal administratif de Rennes contre la décision de rejet de la demande de titre de séjour de M. D... implicitement acquise le 20 octobre 2019.
5. Il y a lieu de statuer par la voie de l'évocation sur les conclusions de la demande de M. D... dirigée contre la décision implicite de rejet contestée et par la voie de l'effet dévolutif sur les conclusions de la requête n°20NT01854.
Sur l'étendue du litige :
6. L'arrêté du préfet du Finistère du 5 mars 2020 s'étant substitué à la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration pendant plus de quatre mois sur la demande de titre de séjour déposée par M. D..., la demande présentée en première instance contre cette décision implicite de rejet est devenue sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur la légalité de l'arrêté du 5 mars 2020 :
7. D'une part, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".
8. D'autre part, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
9. Il ressort des pièces du dossier que si M. D... est marié depuis le 27 mai 2017 avec une ressortissante française dont il a reconnu l'enfant, né en 2005, au mois de février 2018, il n'apporte la preuve ni d'une vie commune avec son épouse ni d'une contribution à l'entretien et à l'éducation de cet enfant en se bornant à produire des déclarations fiscales, une attestation de la caisse d'allocations familiales à l'adresse de son épouse et différentes factures d'électricité ou de téléphone à l'adresse des deux conjoints, alors que son épouse indique sans être contredite en défense que l'intéressé ne réside pas avec elle et n'a conclu le mariage qu'en vue d'obtenir un titre de séjour. Par ailleurs M. D..., dont le casier judiciaire porte la mention de deux condamnations successives prononcées à son encontre au mois de mars 2018 pour des faits de vol et usage de stupéfiants, n'établit pas la réalité et l'intensité de son insertion en France en se bornant à faire état de son adhésion à un club de boxe anglaise et de boxe thaïe. Enfin, le requérant, qui n'est entré en France qu'en 2016 et a fait l'objet de deux précédentes mesures d'éloignement qu'il n'a pas exécutées, n'établit pas qu'il serait dépourvu d'attaches au Cameroun où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-huit ans. Pour ces motifs, le préfet du Finistère n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision contestée et n'a pas davantage commis une erreur de fait ou une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, il n'a pas méconnu les dispositions précitées des 4° et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
10. Pour le surplus, M. D... se borne à reprendre devant le juge d'appel les mêmes moyens et les mêmes arguments que ceux invoqués en première instance, tirés de ce que l'arrêté contesté serait insuffisamment motivé et n'aurait pas été précédé d'un examen particulier de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
11. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 29 juin 2020, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais liés aux deux instances :
12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative par le requérant dans l'instance n°20NT00084.
13. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font, par ailleurs, obstacle à ce qu'une somme soit accordée au conseil de M. D... dans l'instance n°20NT01854.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 1905584 du président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Rennes du 18 décembre 2019 est annulée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande présentée par M. D... et tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet du Finistère a implicitement refusé de lui délivrer un titre de séjour, ainsi que sur les conclusions à fin d'injonction qui s'y rapportent.
Article 3 : La requête n°20NT01854 M. D... ainsi que les conclusions présentées par lui au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative dans l'instance n°20NT00084 sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Finistère.
Délibéré après l'audience du 18 février 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- Mme C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2021.
Le rapporteur
M. C...Le président
I. Perrot
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 20NT00084, 20NT01854