2°) de rejeter la demande de M. A... ;
3°) d'ordonner le remboursement de la somme de 1 000 euros que l'Etat a été condamné à verser au conseil de M. A... au titre des frais irrépétibles de première instance.
Il soutient qu'il pouvait obliger l'intéressé à quitter le territoire français dès lors que celui-ci s'y est maintenu irrégulièrement, qu'il a été débouté de sa demande d'asile et qu'il ne peut se prévaloir de l'état de santé de son épouse.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 avril 2019 M. A..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 800 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Il fait valoir que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français, prise en méconnaissance des dispositions du 1° du I de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est dépourvue de base légale ;
- cette décision est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;
- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- en l'absence d'entrée irrégulière, le délai de recours de quinze jours prévu par les dispositions du I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui était pas applicable ;
- la décision fixant le pays de renvoi a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 mai 2019.
Par courrier du 20 août 2019, les parties ont été informées, en application de l'article R.611-7 du code de justice administrative, de ce que les conclusions tendant au remboursement de la somme de 1 000 euros mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont irrecevables, le préfet des Côtes d'Armor disposant du pouvoir d'émettre un titre exécutoire pour le recouvrement de cette créance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Le préfet des Côtes-d'Armor relève appel du jugement du 5 décembre 2018 par lequel le président du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 25 octobre 2018 en tant qu'il oblige M. A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixe le pays de destination.
Sur le moyen d'annulation retenu par le premier juge :
2. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., ressortissant albanais titulaire d'un passeport biométrique le dispensant de l'obligation de disposer d'un visa, est entré régulièrement en France le 18 septembre 2016. Par suite, le préfet des Côtes-d'Armor ne pouvait, ainsi que l'a jugé le président du tribunal administratif de Rennes, l'obliger à quitter le territoire français sur le fondement du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision contestée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée.
5. En l'espèce, le préfet des Côtes-d'Armor a également visé dans son arrêté les dispositions du 6°du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indiqué que M. A... avait été débouté de sa demande d'asile par une décision du 26 juillet 2017 de la Cour nationale du droit d'asile. Cette circonstance, qui n'est pas contestée par l'intéressé, était de nature à justifier légalement la décision portant obligation de quitter le territoire français. Ainsi, il y a lieu de substituer les dispositions précitées du 6° à celles du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation dans l'application de l'une ou de l'autre de ces deux dispositions.
6. Il résulte de ce qui précède que le préfet des Côtes-d'Armor est fondé à soutenir que c'est à tort que le président du tribunal administratif de Rennes a annulé, pour le motif tiré d'un défaut de base légale, sa décision du 25 octobre 2018 obligeant M. A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et, par voie de conséquence, le décision du même jour fixant le pays de destination.
7. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés devant la juridiction administrative par M. A... contre ces décisions.
Sur les autres moyens soulevés par M. A... :
8. L'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est par suite, suffisamment motivé. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en dépit de la mention erronée d'une entrée irrégulière de M. A... en France le préfet des Côtes-d'Armor qui, contrairement à ce que soutient l'intéressé, a indiqué que son épouse faisait l'objet d'une mesure d'éloignement concomitante, n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation.
9. Si M. A... soutient que son épouse, dont l'état de santé nécessite une prise en charge en France, a présenté une demande d'aide juridictionnelle en vue de contester le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français pris à son encontre le 25 octobre 2018 par le préfet des Côtes-d'Armor, l'intéressé n'établit pas, par cette seule circonstance, que son épouse aurait vocation à se maintenir sur le territoire français. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et en l'absence d'obstacle à ce que M. A... reconstitue sa cellule familiale en dehors du territoire français, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet des Côtes-d'Armor n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
10. Pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point précédent et en l'absence d'obstacle à ce que les enfants de M. A... accompagnent leurs parents, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.
11. Les conditions de notification d'une décision administrative étant sans incidence sur sa légalité, M. A... ne peut utilement se prévaloir, à l'appui de ses conclusion dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, de ce que le préfet des Côtes-d'Armor lui aurait indiqué à tort qu'il disposait du délai de recours contentieux prévu par les dispositions du I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
12. Si M. A... soutient qu'un retour en Albanie l'exposerait à des risques pour son intégrité, ses allégations sont dépourvues de toute précision permettant d'en apprécier le bien fondé. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
13. Il résulte de ce qui précède que le préfet des Côtes-d'Armor est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 25 octobre 2018 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixe le pays de destination, lui a enjoint de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et a mis à sa charge une somme de 1 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Sur les frais d'instance :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
15. Enfin le préfet des Côtes-d'Armor, qui a le pouvoir d'émettre un titre exécutoire à l'effet d'obtenir le remboursement des sommes mises à la charge de l'Etat en première instance, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne saurait demander à la cour d'ordonner la restitution des sommes qui ont ainsi été versées.
D E C I D E
Article 1er : Les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 1805423 du 5 décembre 2018 du président du tribunal administratif de Rennes sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête ainsi que les conclusions présentées par M. A... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... A....
Copie en sera adressée au préfet des Côtes-d'Armor.
Délibéré après l'audience du 4 septembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme E..., présidente-assesseure,
- M. Mony, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 septembre 2019.
La présidente rapporteure
N. E...
Le président
I. Perrot
Le greffier
M. C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18NT043732