Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 11 décembre 2018 M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) de prononcer son admission provisoire à l'aide juridictionnelle ;
2°) d'annuler ce jugement du président du tribunal administratif de Rennes du 13 novembre 2018 ;
3°) d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2018 du préfet d'Ille-et-Vilaine ;
4°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de réexaminer sa situation dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;
- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision d'interdiction de retour est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;
- en l'absence de menace à l'ordre public, cette décision a été prise en méconnaissance de la présomption d'innocence et des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée le 3 janvier 2019 au préfet d'Ille-et-Vilaine qui n'a pas produit de mémoire.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 décembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Coiffet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 19 octobre 2018, le préfet d'Ille-et-Vilaine a obligé M. B..., ressortissant marocain, à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, lui interdisant également un retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. B... relève appel du jugement du 13 novembre 2018 par lequel le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Il est constant que M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 20 décembre 2018. Par suite, ses conclusions tendant à son admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
3. La décision contestée comporte la mention des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et les principaux éléments relatifs à la situation personnelle et administrative de M. B.... Par suite, cette décision, qui ne révèle pas un défaut d'examen particulier de la situation du requérant, est suffisamment motivée.
4. M. B... soutient qu'il est entré en France en 2017 alors qu'il était mineur, qu'il a effectué des stages grâce à sa prise en charge au titre de l'aide sociale à l'enfance et qu'il a signé un contrat de jeune majeur le 17 octobre 2018. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé, entré irrégulièrement sur le territoire français où il a fait usage d'une fausse identité, ne justifie pas d'une particulière intégration. M. B..., célibataire et sans famille, ne se prévaut d'aucun lien affectif en France et n'est pas dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où résident ses parents et où il a lui-même vécu la majeure partie de sa vie. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des conditions et de la durée de séjour en France du requérant, la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour :
5. Aux termes du III de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
6. Pour prononcer à l'encontre de M. B... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, le préfet d'Ille-et-Vilaine s'est notamment fondé sur la circonstance que l'intéressé, entré récemment et irrégulièrement en France, ne justifiait pas y avoir d'attaches particulières et que sa présence constituait une menace pour l'ordre public. Il ressort en effet des pièces du dossier que l'intéressé, qui ne justifie pas d'une intégration linguistique et professionnelle, a indiqué avoir fait usage d'une fausse identité par crainte de la police et a été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance sous de faux nom et date de naissance, a admis être déjà connu des services de police et causer des problèmes par son comportement et a été interpelé dans une affaire de vol et tentative de vol en réunion. La circonstance que M. B... n'aurait pas fait l'objet d'une condamnation pénale dans cette affaire ne faisait pas obstacle à ce que le préfet, qui a pu exercer le pouvoir de police qui lui est conféré sans méconnaître la présomption d'innocence, prenne en compte les faits pour lesquels l'intéressé était connu des services de police. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. Pour le surplus, M. B... se borne à invoquer devant le juge d'appel, sans plus de précisions ou de justifications, les mêmes moyens que ceux développés en première instance. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges et tirés de ce que la décision portant interdiction de retour n'est entachée ni d'une insuffisance de motivation ni d'un défaut d'examen de situation.
8. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
D E C I D E
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Berthon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 juin 2019.
Le rapporteur
O.Coiffet Le président
I.Perrot
Le greffier
M. C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18NT04356 2