Procédure devant la cour :
I - Par une requête enregistrée sous le n°20NT00367 le 3 février 2020 M. G... E..., représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 septembre 2019 en tant qu'il rejette sa demande ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2018 pris à son encontre ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les décisions lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ont été prises en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- ces décisions ont été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 août 2020, le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.
Il s'en rapporte à ses écritures de première instance.
M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 décembre 2019.
II - Par une requête enregistrée sous le n°20NT00369 le 3 février 2020 M. C... E..., représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 septembre 2019 en tant qu'il rejette sa demande ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2018 pris à son encontre ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il invoque les mêmes moyens que ceux exposés dans l'instance n°20NT00367.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 août 2020, le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.
Il s'en rapporte à ses écritures de première instance.
M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 décembre 2019.
III - Par une requête enregistrée sous le n°20NT00370 le 3 février 2020 Mme A... E..., née H..., représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 septembre 2019 en tant qu'il rejette sa demande ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2018 pris à son encontre ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle invoque les mêmes moyens que ceux exposés dans l'instance n°20NT00367.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 août 2020 le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.
Il s'en rapporte à ses écritures de première instance.
Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 décembre 2019.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... ;
- et les observations de Me B... représentant les consorts E....
Considérant ce qui suit :
1. M. C... E..., Mme A... E... née H... et leur fils, M. G... E..., ressortissants géorgiens, nés respectivement les 23 mai 1968, 20 septembre 1966 et 21 juillet 1989, ont déclaré être entrés irrégulièrement sur le territoire national au cours des années 2010 et 2012. Par des arrêtés du 26 octobre 2018 le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 18 septembre 2019 le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes respectives tendant à l'annulation de ces arrêtés. Les requêtes des consorts E... enregistrées respectivement sous les n° 20NT00369, 20NT00370 et 20NT00367, dirigées contre un même jugement, présentent à juger des questions connexes et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.
Sur la requête de M. G... E... :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent
11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre. "
3. Par un avis du 3 juillet 2018 le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de M. E..., qui souffre d'un syndrome autistique le rendant tributaire de l'assistance de sa famille, nécessitait une prise en charge médicale mais que le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Les certificats médicaux et prescriptions médicamenteuses produits par M. E..., ainsi que ses allégations relatives aux conditions d'accès aux soins en Géorgie ne permettent pas, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, de remettre en cause le sens de cet avis. Il en va de même des difficultés auxquelles auraient donné lieu, le 4 octobre 2019, la tentative d'exécution par l'administration de la mesure d'éloignement prise à l'encontre de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré de ce que, en se fondant sur cet avis, le préfet d'Ille-et-Vilaine aurait, par la décision contestée du 26 octobre 2018 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
4. Enfin M. E..., entré irrégulièrement en France en 2012, fait valoir que sa situation médicale impose son maintien en France pour y bénéficier du soutien de sa famille. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé, qui a séjourné en France principalement de façon irrégulière et qui ne justifie ni d'une particulière intégration ni, ainsi qu'il a été dit au point 3, de son nécessaire maintien en France pour des raisons médicales, n'allègue, ni n'établit ne pas pouvoir bénéficier hors du territoire français de l'assistance de ses parents, lesquels font eux-mêmes l'objet de refus de titres de séjour et de mesures d'éloignement à la date de l'arrêté contesté. Le requérant ne peut utilement se prévaloir de ce que la cour, par un arrêt du 17 janvier 2020, a enjoint au préfet d'Ille-et-Vilaine, sous réserve d'un changement dans les circonstances de fait ou de droit, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dès lors que, le père de l'intéressé n'étant plus pourvu d'un titre de séjour à la date de la décision aujourd'hui contestée, les circonstances de fait ont précisément été modifiées.
5. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions d'entrée et de séjour en France de M. E..., le refus de titre de séjour qui lui a été opposé n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.
6. Pour contester l'obligation de quitter le territoire et la décision fixant le pays de destination qui lui ont été adressés, le requérant se prévaut des mêmes moyens que ceux invoqués à l'encontre du refus de titre et qui, pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus, doivent être écartés.
Sur la requête de M. C... E... :
7. En premier lieu, par un avis du 5 juillet 2018 que le préfet d'Ille-et-Vilaine s'est également approprié, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé notamment que l'état de santé de M. C... E... nécessitait une prise en charge médicale mais que le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. En se bornant à se prévaloir, en des termes généraux, des conditions d'accès aux soins en Géorgie et de l'automutilation qu'il s'est infligée à l'occasion de la tentative d'exécution par l'administration, le 4 octobre 2019, de la mesure d'éloignement prise à son encontre, le requérant, qui n'invoque par ailleurs aucun élément précis relatif à son état de santé, ne conteste pas utilement le sens de cet avis.
Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté du 26 octobre 2018 dont il a fait l'objet aurait été pris en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
8. En second lieu, M. E..., entré irrégulièrement en France en 2010, soutient que son épouse et lui-même s'investissent auprès de leur fils malade ainsi que dans le bénévolat et l'apprentissage de la langue française. Il ressort toutefois des pièces du dossier que si l'intéressé a été un temps autorisé à séjourner régulièrement en France pour raisons médicales, il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire après le 10 novembre 2017, date d'expiration de la dernière autorisation provisoire de séjour qui lui a été accordée, ne justifie pas d'une particulière intégration, notamment professionnelle, et ne dispose pas pour son foyer d'un logement autonome. Il n'établit pas être dans l'impossibilité de reconstituer
sa cellule familiale hors du territoire français et de pouvoir continuer à fournir à son fils l'assistance que nécessite son état de santé. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, le requérant ne peut utilement se prévaloir de ce que la cour a enjoint au préfet d'Ille-et-Vilaine, par un arrêt du 17 janvier 2020, de délivrer une carte de séjour temporaire à son fils.
9. Compte-tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions d'entrée et de séjour en France de M. E..., cet arrêté n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, le refus de titre de séjour prononcé par le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. C... E....
10. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus, M. E... n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire et fixation du pays de destination.
Sur la requête de Mme A... E... :
11. En premier lieu, Mme E..., qui est entrée irrégulièrement en France en 2012 et y a séjourné principalement en qualité de demandeur d'asile et de façon irrégulière, se prévaut des mêmes éléments personnels et familiaux que ceux exposés ci-dessus. Pour les mêmes motifs, les moyens tirés de ce que l'arrêté du 26 octobre 2018, en tant qu'il porte refus de titre de séjour, aurait été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle doivent être écartés.
12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, l'arrêté contesté du
26 octobre 2018 pris à l'encontre de Mme E... n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
13. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
D E C I D E
Article 1er : Les requêtes n° 20NT00369, 20NT00370 et 20NT00367 des consorts E... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... E..., à M. C... E..., à Mme A... E..., née H... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président ;
- Mme D... président-assesseur;
- M. Berthon, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 mars 2021.
La présidente-assesseure
C. D... La présidente
I. PerrotLe greffier,
A. Martin
La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Nos 20NT00367, 20NT00369,20NT003702