3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une attestation de demande d'asile dans un délai d'un mois ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à son avocat au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat.
Il soutient que :
- les dispositions de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ; au cours de l'entretien, l'interprète en langue dari n'a pas traduit oralement l'ensemble des informations dont il aurait dû bénéficier sur ses droits et obligations ;
- les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ; le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant d'appliquer les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; il existe un risque de renvoi en Afghanistan où il existe un contexte de violation généralisée à l'encontre des droits fondamentaux ; sa demande d'asile a été définitivement rejetée par les autorités autrichiennes ; son recours a été rejeté par la cour constitutionnelle autrichienne le 8 juin 2020.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 janvier 2021, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 9 novembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant afghan né en janvier 1992, a déposé en France une demande d'asile qui a été enregistrée le 10 juillet 2020 auprès de la préfecture du Calvados. Par une décision du 29 juillet 2020, le préfet de la Seine-Maritime a prononcé son transfert auprès des autorités autrichiennes pour l'examen de sa demande d'asile. M. A... relève appel du jugement du 14 septembre 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 juillet 2020.
2. En premier lieu, l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par le même règlement, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Tout demandeur reçoit, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend, une information sur ses droits et obligations en application dudit règlement, dans les conditions prévues à son article 4 (...) ". Par ailleurs, l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dispose que : " Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre l'ensemble des éléments d'information prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. La remise de ces éléments doit intervenir en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations. Eu égard à leur nature, la remise par l'autorité administrative de ces informations prévues par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... s'est vu remettre, le 10 juillet 2020, le jour même de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture du Calvados, et à l'occasion de l'entretien individuel, les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées, en langue dari, qu'il a déclaré comprendre. Dans ces conditions, et quand bien même ainsi que le soutient l'intéressé, l'interprète en langue dari qui l'a assisté lors de l'entretien n'aurait pas traduit l'ensemble des informations, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) du 26 juin 2013 et de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas fondé et doit être écarté.
5. En second lieu, l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Lorsque l'autorité administrative estime que l'examen d'une demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat qu'elle entend requérir, l'étranger bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la fin de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1 mentionne la procédure dont il fait l'objet. Elle est renouvelable durant la procédure de détermination de l'Etat responsable et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. / Le présent article ne fait pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne dont l'examen de la demande relève de la compétence d'un autre Etat ". Par ailleurs, l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dispose que : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...)". Par ailleurs, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Enfin, l'article 2 de cette même convention stipule que : " Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi (...) ".
6. M. A... fait valoir que sa demande d'asile présentée en Autriche a été rejetée par les autorités de ce pays et que son recours formé en dernier lieu devant la cour constitutionnelle autrichienne a été rejeté par une décision du 8 juin 2020. Il ajoute qu'en conséquence il va être reconduit en Afghanistan, pays où il craint pour son intégrité en raison notamment de son travail aux côtés des autorités afghanes. Toutefois, d'une part, en principe, l'arrêté en litige a seulement pour objet de renvoyer l'intéressé en Autriche et non dans son pays d'origine. D'autre part, l'Autriche, Etat membre de l'Union européenne, est partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut de réfugié, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. L'intéressé ne produit par ailleurs pas d'élément de nature à établir qu'il existerait des raisons sérieuses de croire à l'existence de défaillances systémiques en Autriche dans la procédure d'asile ou que les juridictions autrichiennes n'auraient pas traité sa demande d'asile dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties procédurales exigées par le respect du droit d'asile. Enfin, si M. A... produit une série de photographies, il n'établit pas par ces seuls documents encourir des risques de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le transfert du requérant en Autriche l'exposerait à un refoulement indirect vers son pays d'origine susceptible d'entraîner pour lui des traitements inhumains ou dégradants. Il n'est par ailleurs pas établi que l'intéressé ne pourrait, alors même que les autorités autrichiennes ont rejeté sa demande d'asile, faire utilement valoir tout nouvel élément tenant à sa situation personnelle, ou à celle régnant en Afghanistan, avant qu'il soit procédé à un éventuel éloignement après son transfert. Dès lors, il n'est pas établi que le préfet de la Seine-Maritime aurait entaché la décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés pour les mêmes motifs.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 juillet 2020. Il suit de là que ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience du 19 janvier 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président-assesseur,
- Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 février 2021.
La rapporteure,
M. D...Le président,
L. LAINÉ
La greffière,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT03268