Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 octobre 2017, M. et MmeF..., représentés par MeB..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 9 août 2017 ;
2°) d'annuler les arrêtés de la préfète de la Loire-Atlantique du 4 août 2017 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire-Atlantique de leur remettre une autorisation provisoire de séjour en qualité de demandeur d'asile, ou à défaut de réexaminer leurs demandes dans un délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
en ce qui concerne les décisions de remise aux autorités allemandes :
- elles ne sont pas suffisamment motivées ;
- la confusion existant sur le fondement légal de la demande de reprise en charge par l'Allemagne traduit un défaut d'examen préalable et sérieux de la part du préfet ;
- ces décisions sont entachées en conséquence d'un défaut de base légale ;
- les décisions sont entachées d'une erreur de droit dès lors que c'est l'Italie qui leur a délivré un visa de court séjour pour entrer sur le territoire des Etats membres ; les dispositions de l'article 12 du règlement 604/2013 ont été méconnues ;
en ce qui concerne les décisions d'assignation à résidence :
- elles sont insuffisamment motivées ;
- elles sont illégales en raison de l'illégalité des décisions portant réadmission vers l'Allemagne ;
- elles méconnaissent les dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2018, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. et Mme F...n'est fondé.
M. et Mme F...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 1er septembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Allio-Rousseau ;
- et les observations de MeE..., représentant M. et Mme F....
Considérant ce qui suit :
1. M. H...F..., ressortissant russe né le 7 novembre 1986, et son épouse, Mme D...G..., ressortissante russe née le 28 octobre 1994, relèvent appel du jugement du 9 août 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 4 août 2017 par lesquels le préfet de la Loire-Atlantique a décidé, d'une part, leurs remises aux autorités allemandes et, d'autre part, leur assignation à résidence dans le département de la Loire-Atlantique.
En ce qui concerne les arrêtés portant remise aux autorités allemandes :
2. En premier lieu, les arrêtés contestés visent les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention de Genève et le protocole de New-York, le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, notamment son article 18.1.b), et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment ses articles L. 742-3 à L. 742-6. Par ailleurs, le préfet de la Loire-Atlantique y relate le parcours personnel des requérants, rappelle qu'ils ont déposé une demande d'asile en Allemagne sous une autre identité, leur entrée irrégulière en France, l'envoi aux autorités allemandes d'une demande de reprise en charge des intéressés, l'acceptation de ces autorités, l'absence de motif de dérogation au titre des articles 3-2 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013. Enfin les arrêtés font état de ce que, compte tenu de leur arrivée récente en France, le transfert des requérants en Allemagne ne porte pas d'atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale et qu'ils n'établissent pas l'existence de risques personnellement encourus portant atteinte au droit d'asile en cas de transfert en Allemagne. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de motivation des décisions en litige doit être écarté comme manquant en fait.
3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la préfecture de la Loire-Atlantique a saisi les autorités allemandes et que celles-ci ont accepté la reprise des époux F...sur la base du b) du §1 de l'article 18 du règlement 604/2013. Si les requérants font valoir que, la demande d'asile formée par M. F... en Allemagne ayant été rejetée, sa situation relève en principe du d) du §1 et non du b) de l'article 18, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette mention erronée du b) de l'article 18 du règlement, qui détermine la nature des obligations incombant aux autorités de l'Etat membre responsable de l'examen de la demande d'asile, identique à celles découlant du d), caractériserait, en ce qui concerne M. F..., l'existence d'une erreur de droit résultant du défaut d'examen, par l'autorité préfectorale, de sa situation personnelle. Il résulte en outre de ce qui vient d'être dit au point 2 que la préfète de la Loire-Atlantique a procédé à un examen personnel de la situation des requérants avant l'édiction des arrêtés en litige.
4. En troisième lieu, si les requérants font valoir qu'ils sont entrés sur le territoire des Etats membres en étant détenteurs d'un visa de court séjour délivré par les autorités italiennes, rendant ces autorités responsables de l'examen de leur demande d'asile en application de l'article 12 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, ils n'en justifient pas.
En ce qui concerne les arrêtés portant assignation à résidence :
5. En premier lieu, les arrêtés contestés visent les articles L. 561-2 et R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indiquent les raisons pour lesquelles M. et Mme F...sont assignés à résidence ainsi que la durée et les modalités de ces mesures. Par suite, les arrêtés contestés sont suffisamment motivés.
6. En deuxième lieu, il résulte des points 2 à 4 du présent arrêt que M. et Mme F...ne sont pas fondés à se prévaloir de l'illégalité des arrêtés ordonnant leur remise aux autorités allemandes.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.-L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : 1° Doit être remis aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 ou fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ; (...) / Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve de la durée maximale de l'assignation, qui ne peut excéder une durée de 45 jours, renouvelable une fois. ". Il résulte de ces dispositions que le préfet peut prendre à l'encontre d'un étranger qui fait l'objet d'une décision de transfert et qui présente des garanties propres à prévenir le risque de soustraction à l'exécution de la mesure d'éloignement, une mesure d'assignation à résidence.
8. M. et Mme F...se bornent à faire valoir que la préfète de la Loire-Atlantique n'a pas suffisamment caractérisé le risque qu'ils puissent prendre la fuite, alors justement que la mesure d'assignation à résidence est justifiée par le fait qu'ils présentent des garanties propres à prévenir ce risque de fuite. Ainsi et alors qu'une exécution de la décision d'éloignement restait, par ailleurs, une perspective raisonnable, le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme F...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes. Leurs conclusions à fin d'annulation ainsi que par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme F...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F..., à Mme G... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 18 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 octobre 2018.
Le rapporteur,
M-P. Allio-RousseauLe président,
L. Lainé
Le greffier,
M. Guérin
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT03037