Par un jugement n° 1203881 du 11 juillet 2014, le tribunal administratif de Nantes a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande tendant à la reprise des relations contractuelles avec le syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " et a rejeté la demande indemnitaire de MmeC....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 septembre 2014, Mme A...C..., représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 juillet 2014 ;
2°) d'ordonner la poursuite des relations contractuelles pour l'exécution du marché d'aménagement scénographique en tant qu'il n'a pas été complètement exécuté ;
3°) d'annuler la décision du syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " du 7 mars 2014 rejetant sa demande préalable d'indemnisation ;
4°) condamner le syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " à lui verser la somme de 12 914,54 euros, en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de la résiliation ;
5°) de mettre à la charge du syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle était recevable à saisir le juge du contrat d'un recours de plein contentieux tendant à la reprise des relations contractuelles ;
- elle a formé une réclamation préalable, de sorte que ses conclusions indemnitaires étaient également recevables ;
- le tribunal administratif a admis que la résiliation du 27 mars 2012 était irrégulière en raison de l'absence de mise en demeure préalable, d'un défaut de motivation et car les manquements justifiant la résiliation n'étaient pas établis ; ce point devra être confirmé ;
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, seule une partie des travaux prévus par son marché a fait l'objet d'un nouveau marché ;
- elle a établi un décompte très précis récapitulant les travaux effectués et les honoraires déjà payés, d'où il ressort que la somme de 6 914,54 euros lui reste due, ainsi qu'une somme de 6 000 euros au titre de son préjudice moral et de son préjudice d'image.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2015, le syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme C...la somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- même si le marché de substitution comportait des prestations supplémentaires, dés lors qu'il comprenait les prestations initialement confiées à MmeC..., il n'y a pas lieu de statuer sur la reprise des relations contractuelles ;
- Mme C...n'apporte en appel aucune pièce supplémentaire de nature à établir la réalité et le montant des préjudices dont elle demande à être indemnisée ;
- la demande indemnitaire de Mme C...était en tout état de cause irrecevable en l'absence de mémoire en réclamation préalable tel que prévu par le CCAG prestations intellectuelles de 2009.
Par une ordonnance du 1er juin 2016 prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat.
Par un courrier du 7 juin 2016, la cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions de Mme C...tendant à l'annulation de la décision du 7 mars 2014.
Une réponse au moyen d'ordre public, présentée pour Mme C...a été enregistrée le 14 juin 2016.
Une réponse au moyen d'ordre public, présentée pour le syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " a été enregistrée le 17 juin 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rimeu, premier conseiller,
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,
- et les observations de Me Le Baron, avocat de MmeC..., et celles de Me Plateaux, avocat du syndicat intercommunal à vocation unique " sentier ligérien Oudon Champtoceaux ".
Une note en délibéré, présentée pour le syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " a été enregistrée le 24 novembre 2016.
1. Considérant que, par un marché de maîtrise d'oeuvre signé le 12 avril 2010, le syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " a confié à un groupement composé de Mme C...et de M.B..., dont Mme C...était le mandataire, l'aménagement scénographique intérieur partiel de la tour d'Oudon et l'aménagement extérieur de l'enceinte du château d'Oudon ; que, par une décision du 27 mars 2012, le président du SIVU a résilié ce marché aux torts du groupement ; que Mme C...relève appel du jugement du 11 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la reprise des relations contractuelles, à l'annulation de la décision de résiliation du 27 mars 2012 et à la condamnation du SIVU à lui verser une somme de 12 093,27 euros en réparation des préjudices subis du fait de la résiliation du marché ; qu'elle reprend ses conclusions indemnitaires et celles tendant à la reprise des relations contractuelles et demande en outre l'annulation de la décision du 7 mars 2014 par laquelle le syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " a refusé de lui accorder une indemnité de résiliation ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 7 mars 2014 :
2. Considérant que la décision du 7 mars 2014 par laquelle le SIVU " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " a rejeté la demande d'indemnité de Mme C...constitue un acte uniquement destiné à lier le contentieux indemnitaire introduit par la requérante et ne constitue pas un acte susceptible d'être annulé par le juge ; qu'il suit de là que la demande de Mme C...tendant à son annulation est irrecevable ;
Sur les conclusions à fin de reprise des relations contractuelles :
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les travaux d'aménagement extérieur de l'enceinte du château d'Oudon, dont la maîtrise d'oeuvre était confiée à Mme C...et M. B...par le marché signé le 12 avril 2010, résilié le 27 mars 2012, étaient entièrement exécutés à la date à laquelle le tribunal administratif de Nantes a statué ; que par suite les prestations de maîtrise d'oeuvre non réalisées par Mme C...et M. B...ont nécessairement été réalisées et la reprise des relations contractuelles en vue de leur exécution n'est plus possible ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que le tribunal administratif de Nantes a estimé que la demande de Mme C...tendant à la reprise des relations contractuelles était sans objet et qu'il n'y avait donc pas lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions indemnitaires :
En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par le syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " :
4. Considérant que si le syndicat intercommunal invoque l'article 37 du cahier des clauses administratives générales-prestations intellectuelles (CCAG-PI) de 2009, issu d'un arrêté du 16 septembre 2009, qui prévoit que lorsqu'un différend survient entre le pouvoir adjudicateur et le titulaire du marché celui-ci doit former une lettre de réclamation, il résulte de l'article 2.2 du cahier des clauses particulières (CCP) du marché signé le 12 avril 2010 que ce document ne fait pas partie des pièces contractuelles, les parties ayant choisi d'appliquer le CCAG-PI de 1978 approuvé par le décret n° 78-1306 du 26 décembre 1978 modifié ; qu'il suit de là que la fin de non recevoir soulevée par le syndicat intercommunal ne peut qu'être écartée ;
En ce qui concerne les conditions de la résiliation :
5. Considérant qu'il appartient au juge de rechercher si la résiliation litigieuse est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité pour MmeC... ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article 37.1 du CCAG-PI applicable au marché signé le 12 avril 2010, repris par l'article 24 du CCP : " La personne publique peut résilier le marché aux torts du titulaire, après mise en demeure restée infructueuse, lorsque : / (...) b) Le titulaire ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels (...) La mise en demeure doit être notifiée par écrit et assortie d'un délai." ;
7. Considérant, en premier lieu, que le syndicat intercommunal n'établit pas que Mme C...aurait reçu le courrier du 23 juin 2011 intitulé " mise en demeure de réaliser les prestations objet du contrat " ; que par suite, à supposer même que ce courrier, adressé plus de neuf mois avant la résiliation litigieuse, ait pu être regardé comme la mise en demeure exigée par les stipulations précitées du CCAG-PI, la résiliation prononcée le 27 mars 2012 est, pour ce premier motif, irrégulière ;
8. Considérant, en deuxième lieu, que le syndicat intercommunal ne conteste pas qu'ainsi que l'a retenu le tribunal administratif de Nantes, la décision de résiliation du 27 mars 2012, qui n'indique pas les considérations de faits sur lesquelles elle se fonde, n'est pas suffisamment motivée et est, pour ce second motif également, irrégulière ;
9. Considérant enfin, d'une part, que, s'agissant des prestations relatives au quatrième niveau de la tour d'Oudon, le syndicat n'établit pas que la requérante aurait manqué à ses obligations contractuelles, dès lors notamment que, en l'absence de précisions et de justifications adéquates sur le contenu du marché, il n'établit pas que l'aménagement de cet étage était effectivement compris dans les prestations confiées au groupement susmentionné ; que, d'autre part, s'agissant du retard dans la remise d'un avant-projet détaillé chiffré pour l'aménagement extérieur de l'enceinte du château d'Oudon, il résulte de l'instruction, d'une part, qu'un dossier d'avant projet sommaire - avant projet détaillé (APS-APD) a été présenté au syndicat intercommunal le 9 mai 2011 et que le chiffrage de l'avant projet détaillé, qui a été réclamé par le syndicat à Mme C...et M. B...par un courrier du 16 septembre 2011, a été remis dès le 29 septembre 2011 ; que, dans ces conditions, la requérante est fondée à soutenir que la résiliation litigieuse n'était pas justifiée ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la résiliation du marché du 12 avril 2010 aux torts du groupement titulaire du marché revêt un caractère abusif ; que Mme C...est par suite fondée à demander la réparation des préjudices qui en ont résulté ;
En ce qui concerne les préjudices :
11. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 36 du CCAG-PI applicable au marché : " 1. Lorsque la personne publique résilie le marché, en tout ou partie, sans qu'il y ait faute du titulaire (...) Le titulaire est indemnisé dans les conditions prévues au 2 du présent article. / 2. Sauf stipulation particulière du marché, le décompte de liquidation comprend (...)/ b) Au crédit du titulaire : (...)/ 4° Une somme forfaitaire calculée en appliquant au montant hors T.V.A., non révisé, de la partie résiliée du marché, un pourcentage fixé par le marché ou, à défaut, égal à 4 p. 100. " ;
12. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le montant hors TVA de la partie résiliée du marché s'élève à la somme de 32 850,80 euros ; qu'en l'absence de pourcentage fixé par le marché, il convient, pour déterminer le montant de l'indemnité forfaitaire due en application du 4° du b) du 2 de l'article 36 du CCAG-PI, d'appliquer le taux de 4% prévu par ces stipulations ; que par suite, MmeC..., dont la requête est présentée à titre personnel et non en qualité de mandataire du groupement constitué avec M.B..., est fondée à demander une indemnité forfaitaire égale à la moitié de 1 314,032 euros, soit la somme de 657,02 euros ;
13. Considérant, en deuxième lieu, que le syndicat intercommunal ne conteste pas que le groupement de maîtrise d'oeuvre a exécuté, avant la résiliation du marché le 27 mars 2012, une partie des prestations de la phase PRO, qu'il y a lieu d'évaluer, en l'état de l'instruction, à la moitié ; que, dés lors que le marché prévoyait pour cette phase, un total d'honoraires de 6 944 euros, dont 556,34 euros pour l'aménagement intérieur partiel de la tour et 6 387,66 euros pour l'aménagement extérieur du château, il y a lieu d'accorder à Mme C...le paiement de la moitié des honoraires prévus pour la moitié de ces prestations, soit la somme de 1 736 euros HT, assortie de la TVA à 5,5%, soit 1831,48 euros TTC ;
14. Considérant, en troisième lieu, que si Mme C...demande une somme de 1 800 euros en paiement d'un panneau concernant les insectes des bords de Loire réalisé en janvier 2012, il ne résulte de l'instruction ni que cette prestation faisait partie de celles prévues par le marché du 12 avril 2010 ni qu'il s'agirait d'une prestation supplémentaire qui aurait été demandée par le syndicat intercommunal, alors surtout qu'il résulte d'un échange de courriels que ce dernier ne l'avait accepté que sous réserve que cela n'entraîne aucune dépense supplémentaire ; que par suite, Mme C...n'est pas fondé à demander le paiement de cette somme de 1 800 euros ;
15. Considérant, enfin, que la résiliation litigieuse, prononcée abusivement aux torts du groupement dont Mme C...était le mandataire a porté atteinte à l'image commerciale de celle-ci ; que par suite, il y a lieu d'accorder à MmeC..., en réparation de ce préjudice, une indemnité de 1 000 euros ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 11 juillet 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation du syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " à l'indemniser du préjudice subi du fait de la décision de résiliation du 27 mars 2012 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que MmeC..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse au syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
18. Considérant qu'en revanche, il y a lieu de mettre à la charge du syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux ", au titre de la seule instance d'appel, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme C...et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 juillet 2014 est annulé.
Article 2 : Le syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " est condamné à verser à Mme C...la somme de 3 488,50 euros.
Article 3 : Le syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " versera à Mme C...la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...est rejeté.
Article 5 : Les conclusions présentées par le syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux " sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C... et au syndicat intercommunal à vocation unique " Sentier ligérien Oudon Champtoceaux ".
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 décembre 2016.
Le rapporteur,
S. RIMEULe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT02399