Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 18 mai 2018, M.B..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 29 novembre 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 5 août 2015 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) refusant de lui reconnaître la qualité d'apatride ;
3°) d'enjoindre au directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), à titre principal, de lui reconnaître la qualité d'apatride, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de soixante-quinze euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il justifie ne disposer ni de la nationalité russe, ni de la nationalité moldave, ni de la nationalité ukrainienne.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er août 2018, le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. B...n'est fondé.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de New-York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Besse ;
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public ;
- et les observations de MeD..., représentant M.B....
Considérant ce qui suit :
1. Le requérant, se présentant sous l'identité d'Igor B...et déclarant être né le 27 octobre 1967 à Novovasilievka, alors situé sur le territoire de l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques et désormais sur le territoire ukrainien, puis avoir rejoint la Moldavie au cours de l'année 1991 et enfin la France en septembre 2002, relève appel du jugement du 29 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 août 2015 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a refusé de lui reconnaître la qualité d'apatride.
2. Aux termes de l'article 1er de la convention de New-York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides : " (...) Le terme apatride désigne une personne qu'aucun Etat ne considère comme son ressortissant par application de sa législation (...) ". Il incombe à toute personne se prévalant de cette qualité d'apporter la preuve qu'en dépit de démarches répétées et assidues, l'Etat de la nationalité duquel elle se prévaut a refusé de donner suite à ses démarches.
3. Le requérant fait valoir que ni la Fédération de Russie, ni l'Ukraine, sur le territoire de laquelle se trouve désormais sa ville de naissance, ni la Moldavie, où il a vécu de 1991 à 2002, ne l'ont reconnu comme l'un de leurs ressortissants.
4. Toutefois, d'une part, il ressort des pièces du dossier que le requérant, qui déclare être né en 1967 dans l'ancienne République socialiste soviétique d'Ukraine, alors membre de l'Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) et y avoir vécu jusqu'en 1991 avant de résider en Moldavie, anciennement République socialiste soviétique Moldave, jusqu'en 2002, entrait dans les prévisions du d) de l'article 18 de la loi sur la nationalité russe du 28 novembre 1991 permettant aux citoyens résidant en permanence sur le territoire d'autres républiques faisant directement partie de l'ex-URSS au 1er septembre 1991 et n'étant pas citoyens de ces républiques, d'acquérir la nationalité russe par enregistrement, sur la base d'une déclaration d'intention d'acquérir la nationalité russe effectuée dans les trois ans suivant l'entrée en vigueur de cette loi. Or, il ne justifie avoir entrepris aucune démarche à fin d'obtention de la nationalité russe et doit être ainsi considéré comme s'étant volontairement placé dans la situation d'être privé de la nationalité russe.
5. D'autre part, la production par M. B...de courriers datés du 1er avril 2015 adressés respectivement aux ambassades de Moldavie et d'Ukraine en France en vue d'obtenir de ces autorités la délivrance d'un acte de naissance n'est pas de nature à établir la réalité de démarches répétées et assidues de sa part tendant à l'acquisition de la nationalité de l'un de ces deux pays. Par ailleurs, les deux attestations établies à des dates postérieures à celle de la décision litigieuse, respectivement par le consulat de Moldavie en France le 8 septembre 2015 et par le consulat d'Ukraine en France, le 7 octobre 2015, selon lesquelles le requérant, qui n'a jamais demandé la nationalité moldave, ne possède ni cette nationalité ni la nationalité ukrainienne, ne permettent pas d'établir que les autorités de ces deux pays lui auraient expressément refusé, après examen d'une demande en ce sens, leur nationalité. Il en résulte que le moyen invoqué par le requérant, qui ne justifie pas entrer dans le champ d'application des stipulations précitées de l'article 1er de la convention de New-York du 28 septembre 1954, selon lequel la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, doit être écarté.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 août 2015. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
Délibéré après l'audience du 26 février 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Tiger-Winterhalter, présidente,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,
- M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 mars 2019.
Le rapporteur,
P. BesseLa présidente,
N. Tiger-Winterhalter
Le greffier,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT02052