Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 1er octobre 2020, M. A... F... C..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 21 septembre 2020 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 17 août 2020 du préfet de Maine-et-Loire ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de lui délivrer une attestation de demande d'asile dans un délai de 48 heures à compter de la décision à intervenir et, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
sur la régularité du jugement : sa signature par le magistrat et le greffier n'est pas établie ;
en ce qui concerne l'arrêté de transfert :
- il n'est pas suffisamment motivé ;
- l'arrêté procède d'une application manifestement erronée de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 qui permet de déroger aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande ;
en ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'un détournement de procédure.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 novembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant ivoirien né le 3 octobre 2015, est entré irrégulièrement en France le 10 juin 2020 selon ses déclarations. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile auprès des services de la préfecture de la Loire-Atlantique le 27 juillet 2020. A la suite de la consultation du fichier Eurodac le préfet de Maine-et-Loire a considéré que les autorités italiennes étaient responsables de l'instruction de sa demande d'asile et il les a saisies, le 28 juillet 2020, d'une demande de transfert de M. C... à laquelle elles ont implicitement accédé. Par deux arrêtés du 17 août 2020, le préfet de Maine-et-Loire a décidé, d'une part, le transfert de M. C... aux autorités italiennes et, d'autre part, de l'assigner à résidence pour une durée maximale de quarante-cinq jours renouvelable. Par un jugement du 21 septembre 2020, dont M. C... relève appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de ces arrêtés.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Le moyen tiré de ce que, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, la minute du jugement ne serait pas signée manque en fait et doit donc être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision de transfert :
3. En premier lieu, en application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.
4. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application. Ainsi, doit notamment être regardée comme suffisamment motivée, s'agissant d'un étranger ayant, dans les conditions posées par le règlement, présenté une demande d'asile dans un autre Etat membre et devant, en conséquence, faire l'objet d'une reprise en charge par cet Etat, la décision de transfert à fin de reprise en charge qui, après avoir visé le règlement, relève que le demandeur a antérieurement présenté une demande dans l'Etat en cause, une telle motivation faisant apparaître qu'il est fait application du b), c) ou d) du paragraphe 1 de l'article 18 ou du paragraphe 5 de l'article 20 du règlement.
5. La décision de transfert contestée vise notamment le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier son article L. 742-3, et indique que M. C... a présenté une demande d'asile auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique et que les recherches entreprises sur le fichier Eurodac ont fait apparaître qu'il avait déposé une demande d'asile en Italie le 16 mai 2016. Elle doit être regardée comme suffisamment motivée, une telle motivation faisant apparaître qu'il est fait application du paragraphe 1 de l'article 18 du règlement. Cette décision comporte également un exposé de son parcours migratoire en Europe, de sa situation personnelle et familiale et des problèmes médicaux dont il a indiqué souffrir. Elle comporte ainsi un exposé détaillé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de Maine-et-Loire s'est fondé pour considérer l'Italie comme responsable de l'examen de la demande d'asile de M. C... et décider son transfert auprès des autorités de ce pays. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision ne satisferait pas à l'exigence légale de motivation doit être écarté.
6. En second lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013, : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...)".
7. D'une part, si M. C... indique souffrir d'épilepsie, les documents produits ne l'établissent pas et ne permettent pas à eux seuls de démontrer que son état de santé le placerait dans une situation d'exceptionnelle vulnérabilité. Il se borne ainsi à produire une convocation pour une consultation dans un service de psychiatrie du CHU de Nantes en octobre 2020, ainsi que des ordonnances prescrivant des médicaments destinés à soigner des pathologies de nature psychiatrique. D'autre part, si M. C... fait valoir que les autorités italiennes ont méconnu son droit à bénéficier d'un examen de sa demande d'asile, la seule circonstance qu'il a quitté ce pays pour les Pays-Bas, puis dans un second temps pour la France, à des dates non établies, ne permet pas de corroborer ses dires. Enfin, les conditions d'un éventuel transfert de M. C... en Italie en application de la décision contestée sont sans incidence sur sa légalité. Dans ces conditions M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté serait entaché d'une erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées.
En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :
8. En premier lieu, il y a lieu par adoption des motifs exposés aux points 24 et 26 du jugement attaqué d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur d'appréciation de la décision d'assignation au regard de la situation sanitaire du requérant et des conditions requises de présentation hebdomadaire au commissariat central de Nantes.
9. En second lieu, le détournement de procédure allégué, consistant à adopter une décision d'assignation à résidence en lieu et place d'une mesure de rétention administrative, et l'atteinte ainsi portée à son droit à un recours effectif ne sont pas établis par les éléments du dossier.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 17 août 2020 du préfet de Maine-et-Loire. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. A... F... C... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 9 mars 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. B..., président assesseur,
- Mme E..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2021.
Le rapporteur,
C. B...
Le président,
L. Lainé
La greffière,
V. Desbouillons
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT03134