Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 août 2017, M.A..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 21 juillet 2017 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 18 juillet 2017 de la préfète de la Loire-Atlantique ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire-Atlantique de prendre en charge sa demande d'asile et de lui remettre une attestation de demandeur d'asile en procédure normale, ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours à compter du présent arrêt.
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que la décision de remise aux autorités allemandes est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière, d'une part en méconnaissance des dispositions du paragraphe 1 de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, faute pour le préfet de lui avoir notifié les informations prévues par ces dispositions, dès sa demande d'asile et dans une langue qu'il comprend, et d'autre part en méconnaissance de l'article 5 de ce même règlement (UE) n° 604/2013 dès lors qu'il n'est pas établi que l'entretien individuel aurait été régulièrement mené par une personne qualifiée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2018, la préfète de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Elle déclare s'en remettre à ses écritures de première instance.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 août 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Besse a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant guinéen né le 30 novembre 1996 qui déclare être entré irrégulièrement en France le 7 mai 2017, a présenté une demande d'asile auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique le 20 juin 2017. Les recherches effectuées sur le fichier Eurodac ont révélé que ses empreintes avaient été précédemment relevées en Allemagne, où il a sollicité l'asile le 24 mars 2017. La préfète de la Loire-Atlantique a alors saisi, le même jour, les autorités allemandes d'une demande de reprise en charge de l'intéressé sur le fondement du 1 de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Le 28 juin 2017, les autorités allemandes ont expressément accepté cette reprise en charge. Par arrêtés du 18 juillet 2017, la préfète de la Loire-Atlantique a décidé la remise de M. A...aux autorités allemandes ainsi que son assignation à résidence. M. A...relève appel du jugement du 27 juin 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de remise aux autorités allemandes :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 susvisé du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement,(...) 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de1'entretien individuel visé à l'article 5. / (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier, notamment des mentions figurant sur le formulaire qu'il a signé à l'issue de l'entretien individuel dont il a bénéficié le 20 juin 2017, le jour même de sa demande d'asile auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique, que M. A...a reçu communication du guide du demandeur d'asile, d'une brochure d'information sur le règlement " Dublin " contenant une information générale sur la demande d'asile et le relevé d'empreintes (guide A) et d'une brochure d'information pour les demandeurs d'asile dans le cadre de la procédure " Dublin " (guide B), rédigées en français, langue que l'intéressé a déclaré comprendre. M. A...a en outre reconnu que les informations contenues dans ces documents lui ont été communiquées oralement. Par ailleurs, les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 n'imposent pas que les informations visées au paragraphe 1 soient délivrées au demandeur avant même le relevé d'empreintes et l'entretien individuel. Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas reçu, dès le début de la procédure, une information complète sur ses droits en méconnaissance de l'article 4 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Entretien individuel : 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / 2. (...) / 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé ".
5. Il ressort des pièces du dossier, notamment des mentions figurant sur le formulaire signé par l'intéressé le 20 juin 2017, que M. A...a bénéficié le jour même, soit avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 précité du règlement n° 604/2013. Cet entretien s'est tenu en français, langue que l'intéressé a déclaré comprendre. En outre, d'une part, l'absence d'indication de l'identité et de la qualité de l'agent ayant conduit cet entretien individuel n'a pas privé M. A...de la garantie que constitue le bénéfice de cet entretien ni de la possibilité de faire valoir toutes observations utiles, ainsi que le révèle son compte-rendu. D'autre part, aucun élément du dossier ne permet de tenir pour établi que ce même entretien individuel n'aurait pas été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national et dans des conditions qui n'en auraient pas garanti la confidentialité. Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 doit être écarté.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant assignation à résidence :
6. M. A...ne soulève en appel aucun moyen à l'encontre de l'arrêté du 18 juillet 2017 par lequel la préfète de la Loire-Atlantique a ordonné son assignation à résidence.
7. Il résulte de ce tout qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 18 juillet 2017. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise à la préfète de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 6 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Tiger-Winterhalter, présidente,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,
- M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 novembre 2018.
Le rapporteur,
P. BesseLa présidente,
N. Tiger-Winterhalter
Le greffier,
V. Desbouillons
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT02974