Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 décembre 2021, M. A... B..., représenté par Me Kaddouri, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 novembre 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 juin 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit d'office ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la décision à intervenir et de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour est intervenue en violation de l'article 9 de la convention franco-ivoirienne de 1992 et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la cohérence de son parcours universitaire et du sérieux de ses études ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle est entachée d'une violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire est insuffisamment motivée ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'un défaut d'examen de sa situation particulière dès lors qu'il poursuivait une formation ;
- la décision portant fixation du pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2022, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 janvier 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention franco-ivoirienne relative à la circulation et au séjour des personnes, signée le 21 septembre 1992 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Rivas a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant ivoirien né le 4 août 1989, est entré en France muni d'un visa de long séjour en qualité d'étudiant le 14 octobre 2016. Il a obtenu une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant valable du 4 octobre 2016 au 3 octobre 2017, renouvelée jusqu'au 3 octobre 2019. Par un courrier du 27 septembre 2019, il a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour. Par un arrêté du 26 juin 2020, le préfet de Maine-et-Loire a refusé ce renouvellement, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. Par un jugement du 23 novembre 2021, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté du 26 juin 2020.
Sur la décision de refus de renouvellement du titre de séjour :
2. L'arrêté contesté vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment l'article L. 511-1 alors en vigueur dont il est fait application. De même il retrace le parcours de formation de M. B... depuis son entrée sur le territoire français en 2016 en qualité d'étudiant et conclut à de " nombreux changements d'orientation et [de l'] absence de progression dans son parcours ". Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de renouvellement de titre de séjour serait insuffisamment motivée.
3. En deuxième lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, alors en vigueur, " sous réserve des conventions internationales ". L'article 9 de la convention franco-ivoirienne du 21 septembre 1992 stipule que : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation de niveau supérieur sur le territoire de l'autre État doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou d'une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage, ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. / Les intéressés reçoivent un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite effective des études ou du stage et de la possession de moyens d'existence suffisants. (...) ".
4. Pour l'application des stipulations de l'article 9 de la convention franco-ivoirienne du 21 septembre 1992, il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour présentée en qualité d'étudiant, d'apprécier, sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études effectivement poursuivies en tenant compte de l'assiduité, de la progression et de la cohérence du cursus suivi.
5. Il ressort des pièces du dossier que depuis son entrée en France M. B... a validé en 2017 un master 2 en psychologie, spécialité psychologie de la sécurité routière, qu'il a obtenu avec la mention assez-bien. Si l'intéressé s'est ensuite réorienté en master 1 de démographie en 2017/2018 il n'a pas validé cette année et, au titre de l'année universitaire suivante, il n'établit le suivi d'aucune formation. A l'appui de sa demande du 27 septembre 2019 de renouvellement de son titre de séjour, arrivant à échéance le 3 octobre 2019, il a fait état de son inscription dans un centre de formation afin de devenir accompagnant éducatif et social tout en exposant son objectif de création d'un " cabinet conseil multidimentionnel orienté dans la prévention des risques et dans l'intervention sociale ". Il s'est donc alors agi d'une nouvelle réorientation de son parcours de formation, après son échec en master de démographie, dont le lien avec sa formation initiale en psychologie appliquée à la sécurité routière n'est pas établi. Par ailleurs, aucune explication sérieuse n'est donnée à l'absence de toute étude pendant l'année universitaire 2018/2019. Enfin le projet de création d'entreprise dont M. B... fait état est flou et sans lien clair avec la nouvelle formation envisagée à l'appui de sa demande de renouvellement de titre de séjour présentée le 27 septembre 2019, tout comme avec son master obtenu en 2017. Il s'ensuit que les études suivies par M. B... ne peuvent être regardées comme sérieuses, faute de progression et de cohérence de son parcours depuis 2017, et que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) ". Par application de cette disposition, M. B... ne peut utilement se prévaloir d'un défaut de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français alors qu'il s'est vu opposer un refus de renouvellement de titre de séjour tel que prévu au 3° de ce même article.
7. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 5 que M. B... n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".
9. M. B..., célibataire et sans enfant, n'est présent sur le territoire français à la date de la décision contestée que depuis moins de quatre ans alors qu'il a vécu préalablement en Côte d'Ivoire où il est constant qu'il continue à séjourner pour des vacances. Comme il a été exposé, son parcours dans l'enseignement supérieur en France entre 2016 et 2019 ne présente pas un caractère sérieux eu égard à ses changements d'orientation à compter de 2017 et à l'interruption de toute formation pendant un an. M. B... fait par ailleurs état dans sa demande de renouvellement de titre de séjour de son souhait de développer son projet de création d'entreprise en Côte d'Ivoire. Par suite, alors même que M. B... maitrise la langue française et a obtenu un master en France, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation ne peuvent qu'être écartés.
Sur la décision portant fixation du délai de départ volontaire :
10. En premier lieu, contrairement à ce que soutient M. B... la décision contestée, qui fixe à un mois le délai qui lui est accordé pour quitter volontairement le territoire français, comporte un rappel circonstancié de son parcours dans l'enseignement supérieur depuis 2016. Ainsi l'intéressé n'est pas fondé à soutenir qu'elle serait insuffisamment motivée en fait.
11. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 6 à 9 que M. B... n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. ' L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) ". Eu égard au défaut de sérieux du parcours de formation de M. B... à compter de 2017 tel qu'évoqué au point 5, et alors même qu'il suivait une formation devant se terminer le 16 novembre 2020, le préfet de Maine-et-Loire n'a pas fait une inexacte application de cette disposition, et n'a pas entaché la décision contestée du 26 juin 2020 d'un défaut d'examen particulier de la situation de M. B..., en fixant à trente jours le délai accordé pour quitter volontairement le territoire français.
Sur la décision portant fixation du pays de retour :
13. Il résulte de ce qui a été dit aux points 6 à 9 que M. B... n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2020 du préfet de Maine-et-Loire. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. A... B..., à Me Kaddouri et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 8 mars 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Béria-Guillaumie, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mars 2022.
Le rapporteur,
C. Rivas
Le président,
L. Lainé
La greffière,
S. Levant
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT03446