1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 juin 2018 ;
2°) d'annuler les décisions litigieuses de la commission ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'Intérieur de délivrer un visa court ou long séjour d'entrée en France à M. B...E...C...dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ;
4°) d'enjoindre au ministre de l'Intérieur de réexaminer la demande de visa long et court séjour d'entrée en France à M. B...E...C..., dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le refus de visa de court séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le refus de visa de long séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré, le 14 mars 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Picquet.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B...et M. B... E...C..., ressortissant ivoirien né en 1993, ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler d'une part la décision du 28 avril 2016 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours préalable formé devant elle contre la décision du consul général de France à Abidjan (Côte d'Ivoire) du 3 mars 2016 rejetant la demande de visa de court séjour présentée par M. C...et d'autre part la décision en date du 23 mars 2017 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visas d'entrée en France a rejeté le recours préalable formé devant elle contre la décision du consul général de France à Agadir (Maroc) du 24 novembre 2016 rejetant la demande de visa de long séjour présentée par M. C.... Par un jugement du 15 juin 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes. Ils font appel de ce jugement.
Sur le refus de visa de court séjour :
2. En premier lieu, la critique développée par les requérants et relative à une éventuelle contradiction de motifs relève du bien-fondé de ce jugement et non de sa régularité.
3. En second lieu, il est constant que M. C...avait formé sa demande de visa de court séjour le 29 février 2016 pour assister à l'anniversaire de sa mère, qui devait être célébré le 9 mars suivant. Mme B...soutient en appel qu'elle a exposé à la commission qu'elle souhaitait la présence de M. C...pour assister à la première communion de son frère, qui a été célébrée en mai 2016, dès lors que son anniversaire était déjà passé au moment où la commission s'est prononcée. Cependant, il ressort des pièces du dossier que la commission ne s'est pas fondée sur ce changement de motif pour rejeter la demande de visa. Alors même que la mention de ce que M. C...sera scolarisé en France résulterait d'une imprécision de rédaction d'un courrier de MmeB..., cette dernière ayant seulement voulu indiquer à la commission qu'elle demanderait un visa de long séjour le moment venu, en vue de cette scolarisation, il résulte de l'instruction que la commission aurait retenu le même motif tiré du risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires en ne retenant que les autres éléments mentionnés dans la décision litigieuse à l'appui de ce motif et tenant à la situation familiale de M.C..., qui est célibataire, à son âge de 22 ans, et à l'absence d'intérêts matériels ou familiaux suffisants dans son pays d'origine, ses parents étant notamment en France. Enfin, si les requérants soutiennent avoir justifié, par les pièces produites à l'appui de l'autre requête dirigée contre le refus de visa de long séjour, de l'inscription scolaire de M. C... en Côte d'Ivoire, ces éléments sont postérieurs à la décision de la commission du 28 avril 2016. Par conséquent, c'est sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation que la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a pu estimer que la demande en cause présentait un risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires.
Sur le refus de visa de long séjour :
4. Lorsqu'elles sont saisies d'une demande tendant à la délivrance d'un visa de long séjour par un ressortissant étranger faisant état de sa qualité de descendant à charge de ressortissant français, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France peut légalement fonder sa décision de refus sur la circonstance que le demandeur ne saurait être regardé comme étant à la charge de son ascendant, dès lors qu'il dispose de ressources propres, que son ascendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire.
5. Pour rejeter le recours formé contre le refus de visa de long séjour opposé à la demande présentée par M.C..., en qualité d'enfant majeur à charge d'un ressortissant français, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a relevé que le demandeur ne justifiait pas être bénéficiaire de virements réguliers et consistants depuis une période significative de la part de sa mère résidant en France, et que celle-ci ne justifiait pas être en mesure d'assurer une telle prise en charge et une scolarisation en Suisse.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. C...est étudiant et n'exerce pas d'activité professionnelle. MmeB..., ressortissante française et mère de M.C..., justifie de revenus mensuels de l'ordre de 3 000 euros et est locataire avec son époux d'un appartement de près de 80 m², ce qui leur permettrait d'accueillir leur fils et de subvenir à son entretien et à sa scolarisation. En outre, il ressort également des pièces du dossier que Mme B...a effectué deux transferts d'argent en 2014, soit deux ans avant le dépôt de la demande de visa en cause, à destination de sa mère, d'un montant total de 1 046,18 euros, un transfert également à destination de sa mère d'un montant de 600 euros en 2015, près d'une dizaine de transferts en 2016 d'un montant total de 3 675 euros et deux transferts d'argent en janvier et février 2017 pour un montant total de 1 155 euros, alors que la requérante fait valoir sans être contestée que le salaire mensuel minimum garanti en Côte d'Ivoire est de 91 euros. De plus, si certains de ces transferts ont été adressés non pas à M.C..., alors pourtant majeur, mais aux parents de MmeB..., il ressort des pièces du dossier que M. C...réside avec ses grands-parents et que ces derniers ont attesté, sans que la défense ne les contredise utilement, que les sommes reçues de la part de Mme B...étaient destinées à l'entretien de M.C.... Dès lors, et alors même que Mme B... est partie en France dès 2002, en estimant que M. C...ne justifiait pas de sa qualité de descendant à charge de ressortissant français, la commission de recours a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
7. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'intérêt à agir de MmeB..., que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande n° 1604020 dirigée contre le refus de visa de court séjour. En revanche, ils sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande n° 1704371 dirigée contre le refus de visa de long séjour.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
8. L'exécution du présent arrêt implique nécessairement, eu égard au motif qui le fonde, qu'un visa de long séjour soit délivré à M.C.... Il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer un tel visa à l'intéressé dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au bénéfice de M. C...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 15 juin 2018 du tribunal administratif de Nantes est annulé en tant qu'il porte sur la demande de visa de long séjour de M.C....
Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer un visa de long séjour à M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. C...une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de Mme B...et M. C...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., à M. B...E...C...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Dussuet, président de chambre,
- M. Degommier, président assesseur,
- Mme Picquet, premier conseiller.
Lu en audience publique le 4 juin 2019.
Le rapporteur,
P. PICQUET
Le président,
J-P. DUSSUET
Le greffier,
C. POPSE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°18NT02883