1°) d'annuler le jugement du 11 juin 2019 du tribunal administratif d'Orléans ;
2°) d'annuler les arrêtés précités du 28 décembre 2016 du préfet de la région Centre-Val de Loire ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Total Quadran SAS la somme de 1 000 euros dans le dernier état de ses écritures sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa demande était recevable ;
- le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation en ne répondant pas au moyen, pourtant opérant, aux termes duquel aucun photomontage n'a pu être réalisé depuis le château du Plessis ;
- l'étude d'impact était insuffisante, ainsi que le projet architectural ;
- l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme a été méconnu.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 novembre 2019 et 5 mai 2020, la société Total Quadran SAS, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge du requérant la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la demande de 1ère instance était irrecevable car M. B... n'avait pas intérêt à agir ;
- le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact est inopérant ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme n'est pas fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2020, le ministre de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- la demande de 1ère instance était irrecevable car M. B... n'avait pas intérêt à agir ;
- le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact est inopérant ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme n'est pas fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant le requérant, et de Me A..., représentant la société Total Quadran SAS.
Considérant ce qui suit :
1. Par deux arrêtés du 28 décembre 2016, le préfet de la région Centre-Val de Loire a retiré le refus implicite et accordé à la société Quadran les permis de construire pour six éoliennes et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Montlouis et pour deux éoliennes sur le territoire de la commune d'Ineuil. M. B..., propriétaire du château du Plessis, a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler ces arrêtés. Par un jugement du 11 juin 2019, le tribunal a rejeté sa demande. Il fait appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Si le tribunal administratif d'Orléans ne s'est pas prononcé, dans le jugement attaqué, sur l'absence de photomontage réalisé depuis le château du Plessis, il s'agissait d'un simple argument, auquel le tribunal n'était pas tenu de répondre, au vu de sa formulation au milieu d'autres éléments mentionnés par le demandeur à l'appui des moyens tirés de l'insuffisance du dossier de demande de permis de construire et de la méconnaissance de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également : (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ".
4. La régularité de la procédure d'instruction d'un permis de construire requiert la production par le pétitionnaire de l'ensemble des documents exigés par le code de l'urbanisme. Pour autant, la circonstance que le dossier de demande ne les comporterait pas tous ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
5. D'autre part, aux termes des dispositions de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme dans sa rédaction issue du décret n° 2016-1110 du 11 août 2016 : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : / a) L'étude d'impact ou la décision de l'autorité environnementale dispensant le projet d'évaluation environnementale lorsque le projet relève du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement. L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'urbanisme vérifie que le projet qui lui est soumis est conforme aux mesures et caractéristiques qui ont justifié la décision de l'autorité environnementale de ne pas le soumettre à évaluation environnementale ; / b) L'étude d'impact actualisée lorsque le projet relève du III de l'article L. 122-1-1 du code de l'environnement ainsi que les avis de l'autorité environnementale compétente et des collectivités territoriales et leurs groupements intéressés par le projet rendus sur l'étude d'impact actualisée ; (...) ".
6. Les dispositions précitées de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme sont issues du décret n° 2016-1110 du 11 août 2016 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes. L'article 6 de cette ordonnance prévoit que ses dispositions s'appliquent " aux projets faisant l'objet d'une évaluation environnementale systématique pour lesquels la première demande d'autorisation est déposée à compter du 16 mai 2017 ". La demande de permis de construire ayant été déposée le 11 mars 2014, l'étude d'impact, réalisée en décembre 2015 dans le cadre de la demande d'autorisation présentée au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement, n'est pas, en conséquence, celle visée par ces dispositions.
7. En outre, le photomontage n° 17 de l'étude d'impact qui était joint à la demande de permis de construire et réalisé depuis une route à proximité du château du Plessis, indique qu' " en l'absence d'un accord entre son nouveau propriétaire et la société Quadran, aucune prise de vue n'a pu être faite depuis le château du Plessis. Le point de vue proposé est ainsi localisé depuis le sentier périphérique du parc, ouvert sur l'horizon, sans pouvoir traduire les effets de filtres végétaux créés par le parc. Ce point de vue traduit donc une perspective sur la plaine et le parc éolien. Situé proche du château du Plessis où les éoliennes sont probablement directement visibles depuis les jardins mais protégées par les arbres depuis la bâtisse qui est désaxée de la composition des jardins. Ainsi protégé par son parc, le château reste à l'abri de risque d'effets d'écrasement ". S'il est constant qu'aucun photomontage n'a été réalisé depuis le château, l'étude d'impact reconnait que les éoliennes sont " probablement directement visibles depuis les jardins ". En outre, il est constant qu'il n'y a pas eu d'accord entre M. B... et la société Quadran pour la prise de photographies dès lors que le requérant souhaitait également connaître, préalablement à la réalisation du photomontage depuis le château du Plessis, les implantations des machines envisagées, alors que la société pétitionnaire lui a fourni un plan mais lui a répondu que l'implantation n'était pas arrêtée. S'agissant des vues du projet depuis le bourg de Montlouis, un photomontage réalisé depuis la place de l'église, point d'intérêt du village, a été produit, avec une vue panoramique et il n'est pas établi qu'un autre photomontage aurait été nécessaire depuis le haut de la colline de Montlouis. L'étude d'impact comporte plusieurs photomontages démontrant l'absence de visibilité du projet depuis l'église Saint-Denis de la Celle-Condé. Plusieurs photomontages portent sur la vue sur le parc éolien depuis Châteauneuf-sur-Cher, avec une absence de visibilité significative depuis le parvis de la basilique, laquelle est adossée au château, un photomontage pris depuis le château n'étant donc pas nécessaire. Enfin, plusieurs photomontages, localisés sur une carte mentionnée dans l'étude d'impact, font figurer la vue depuis la route départementale D940. Si aucun d'entre eux ne porte sur la vue depuis cette route vers l'église de Montlouis et vers le château du Plessis, les vues sur le parc seront fugitives. Dès lors, les moyens tirés de l'insuffisance de l'étude d'impact et du projet architectural ne peuvent qu'être écartés, alors même que le chef du service territorial de l'architecture et du patrimoine du Cher a émis un avis défavorable au projet le 8 août 2014.
8. En second lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ".
9. Si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.
10. Il ressort des pièces du dossier et notamment de l'étude d'impact, dont les conclusions ne sont pas utilement contredites par les requérants, que le projet éolien en cause est situé dans une plaine céréalière, ouverte et destinée à la grande culture, ne présentant pas de sensibilité forte, avec la présence d'une route départementale et des lignes électriques à haute tension, alors même qu'elle présente un reliquat bocager et qu'un projet de zone de développement de l'éolien avait donné lieu à un refus par un arrêté préfectoral en 2009. Plusieurs monuments historiques sont cependant présents dans le site en cause.
11. Si le projet litigieux est à 1,5 kilomètre du village de Montlouis, 2 kilomètres de l'église Saint-Martin de Montlouis et de l'ancien domaine agricole dit de Varennes, situé à Montlouis, à 7,7 kilomètres des terrasses du château de Châteauneuf-sur-Cher, qui est inscrit sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, à 1,6 kilomètre du jardin à la française du château du Plessis situé à Lignières et à 3,1 kilomètres de l'église Saint-Denis de La Celle Condé, il ressort des pièces du dossier et notamment de l'étude d'impact, dont les conclusions ne sont pas utilement remises en cause par les documents produits par le requérant, que la distance, la topographie et la végétation permettent d'atténuer les covisibilités et l'effet imposant du projet. Si quatre éoliennes sont visibles depuis les jardins du château du Plessis, seuls les façades, toitures et intérieurs du château ont été inscrits sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques et en raison de la distance et de la configuration des lieux, aucun effet d'écrasement ne ressort des pièces du dossier. En outre, l'arrêté d'autorisation " ICPE " du 22 décembre 2016, prescrit, dans son article 7.1, sous réserve de l'accord des propriétaires des terrains concernés, la mise en place d'écrans végétaux permettant de réduire les vues sur les éoliennes depuis l'église Saint-Martin et le parc du château de Plessis. Si, le 8 août 2014, le chef du service territorial de l'architecture et du patrimoine du Cher a émis un avis défavorable au projet, il ressort des pièces du dossier que cet avis défavorable est pour l'essentiel fondé sur l'insuffisance du dossier de demande. Ainsi, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré de ce que le préfet de la région Centre-Val de Loire aurait entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ne peut qu'être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Orléans a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et de la société Total Quadran SAS, qui ne sont pas les parties perdantes, la somme demandée par le requérant sur le fondement de ces dispositions. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme demandée par la société Quadran à ce titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la société Total Quadran SAS sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., à la société Total Quadran SAS et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la région Centre-Val de Loire.
Délibéré après l'audience du 18 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- Mme Buffet, président assesseur,
- Mme E..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 6 octobre 2020.
Le rapporteur,
P. E...
Le président,
T. CELERIER
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 19NT03107