Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 octobre 2017, M. A...C...et Mlle E...C...et Mme E...C..., représenté par MeB..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 mai 2017 ;
2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France ;
3°) d'enjoindre au ministre, à titre principal, de leur délivrer les visas sollicités dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, subsidiairement d'enjoindre au ministre de procéder à un réexamen de leurs demandes, dans le même délai et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mlle C...et les autres requérants soutiennent que :
- la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France est entachée d'une erreur d'appréciation ;
- les documents d'état-civil qui ont été produits présentent une valeur probante suffisante et permettent d'établir la réalité du lien de filiation ;
- aucune fraude n'a été commise ;
- les jugements supplétifs ayant été rendus à leur profit doivent être regardés comme faisant foi ;
- ils justifients de l'existence d'une situation de possession d'état ;
- le refus opposé aux demandes de visas méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 novembre 2017, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Le ministre fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par les requérants n'est fondé.
Mme E...C...n'a pas été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 16 août 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mony,
- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. D...C...et de Mme E...C..., ressortissants guinéens, sont entrés irrégulièrement en France en 1997 et 2000. Mme C...a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 13 octobre 2010. M. A...C...et Mlle E...C..., ressortissants guinéens nés respectivement le 11 juin 1992 et le 22 août 1994, se disant les enfants de M. D... C...et de Mme E...C..., ont alors sollicité la délivrance de visas de long séjour au titre de la réunification familiale. Ils relèvent appel, ainsi que Mme E...C..., du jugement en date du 18 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande d'annulation de la décision du 2 avril 2015 de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France rejetant leurs demandes de visas de long séjour.
Sur la recevabilité de l'appel de Mme E...C...
2. Il ressort des pièces du dossier que Mme E...C..., mère alléguée des enfants Alpha et FatoumataC..., n'était pas partie à l'instance ayant donné lieu au jugement critiqué et se trouve ainsi dépourvue, en application des dispositions de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, de qualité pour interjeter appel de cette décision. Son appel ne peut ainsi qu'être rejeté pour irrecevabilité. En tout état de cause, un parent ne justifie pas en cette seule qualité d'un intérêt lui permettant de contester, tant devant la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France que devant le juge administratif, la légalité d'un refus de visa opposé à son enfant majeur.
Sur les conclusions en annulation :
En ce qui concerne les actes d'état-civil produits
3. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. (...) ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que si l'article 47 précité pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère, il incombe néanmoins à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question.
4. Par ailleurs, la circonstance qu'une demande de visa de long séjour ait pour objet le rapprochement familial d'un membre de la famille d'une personne bénéficiant de la protection subsidiaire ne fait pas obstacle à ce que l'autorité administrative refuse la délivrance du visa sollicité en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur un motif d'ordre public, et l'absence de caractère probant des actes d'état civil produits constitue l'un de ces motifs.
5. Il ressort des pièces du dossier que pour refuser de délivrer des visas de long séjour aux enfants Alpha et FatimatouC..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur la circonstance que les actes de naissance produits pour attester de leur identité et du lien de filiation les unissant à M. et Mme C...n'étaient pas authentiques.
6. C'est au terme d'une motivation suffisante, développée au point 5 de son jugement, et qu'il y a par suite lieu d'adopter, que le tribunal administratif a indiqué les différents motifs attestant du caractère non probant des documents produits en première instance, tenant en particulier à l'absence d'éléments suffisamment précis concernant la date de naissance des parents et la domiciliation de ces derniers, et à l'absence de tout indication, s'agissant du document concernant Alpha, de toute référence permettant de retrouver la trace de l'acte correspondant dans les registres d'état-civil.
7. Si les requérants produisent en appel un jugement supplétif rendu le 31 juillet 2017 par le tribunal de première instance de Conakry, ainsi qu'un extrait d'acte de transcription de ce jugement devant tenir lieu d'acte de naissance pour le seul enfant AlphaC..., il ressort des pièces du dossier que ce jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance mentionne avoir été rendu au vu d'une requête du même jour, alors que l'acte de transcription, pris le 2 août suivant, l'a été avant même que le délai d'appel ouvert contre un tel jugement n'ait expiré, et qu'il comporte une grave incohérence, s'agissant de l'indication du millésime du registre où le jugement devait être transcrit. Les documents produits à hauteur d'appel, qui ne concernent au surplus que le seul AlphaC..., ne peuvent ainsi, eu égard à ce qui précède, être davantage tenus pour probants.
En ce qui concerne la possession d'état
8. Les requérants se prévalent d'une situation de possession d'état de la part de leurs parents allégués. Les éléments qu'ils produisent ne suffisent cependant pas à établir l'existence d'une telle situation. Ainsi les factures téléphoniques versées au dossier remontent seulement à l'année 2015 alors que Mme C...a rejoint la France dès l'année 2000 et les requérants ne fournissent aucun élément incontestable faisant apparaître que les numéros appelés seraient effectivement ceux leur permettant de garder le contact avec leurs enfants allégués, désormais majeurs. Les photographies versées ne sont ni datées ni circonstanciées, notamment en ce qui concerne l'identité des personnes y figurant, Il en va également de même des versements d'argent effectués au profit d'Alpha et de Fatoumata, dont les plus anciens remontent également à 2015 et ne permettent ainsi pas d'établir le caractère constant du soutien dont ils bénéficieraient.
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
9. En l'absence d'établissement du lien de filiation entre M. et Mme D...et Fatoumata C...et les demandeurs de visa, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait porté atteinte à leur droit au respect de leur vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
10. M. A...C...et Mlle E...C..., eu égard à ce qui précède, ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France.
Sur les conclusions en injonction sous astreinte
11. Le présent arrêté, qui rejette la demande des requérants, n'appelle aucune mesure particulière en vue de son exécution. Les conclusions en injonction sous astreinte présentées par M. et Mlle C...ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans le présent litige, verse à M. et Mlle C...la somme que ceux-ci réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Leurs conclusions en ce sens ne peuvent ainsi qu'être également rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...C..., de Mlle E...C... et de Mme E...C...est rejetée.
Article 2: Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., à Mlle E...C..., à Mme E... C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 5 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Dussuet, président,
- M. Degommier, président assesseur,
- M. Mony, premier conseiller,
Lu en audience publique le 22 octobre 2018
Le rapporteur,
A. MONYLe président,
J-P. DUSSUET
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT03164