Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 octobre 2017, M. C... A..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 21 septembre 2017 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 11 septembre 2017 du préfet de Maine-et-Loire ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de réexaminer sa situation et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
en ce qui concerne la décision de réadmission en Italie :
- la décision est insuffisamment motivée ;
- le préfet de Maine-et-Loire n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article 3 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013 ;
en ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant réadmission en Italie.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2018, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. C... A...n'est fondé.
M. C... A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 24 mai 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n°603/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Allio-Rousseau a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D...A..., ressortissant soudanais né le 11 janvier 1990, déclare être entré irrégulièrement en France le 3 juin 2017. Le 5 juillet 2017, il a sollicité l'asile auprès de la préfecture de Maine-et-Loire. La comparaison de ses empreintes avec la base de données Eurodac a révélé que l'intéressé est entré sur le territoire des Etats membres par 1'Italie, le 29 mai 2017. Par deux arrêtés du 11 septembre 2017, le préfet de Maine-et-Loire a ordonné sa remise aux autorités italiennes, qui ont accepté implicitement sa reprise en charge, et son assignation à résidence. M. C... A...relève appel du jugement du 21 septembre 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions.
2. En premier lieu, l'arrêté décidant la remise de M. C... A...aux autorités italiennes comporte les motifs de droit et de fait qui le fondent. Contrairement à ce qu'il prétend, la circonstance que le préfet de Maine-et-Loire n'a pas mentionné, dans cette décision, les conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Italie ne traduit pas un défaut de motivation. Ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté portant remise aux autorités italiennes doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux (...). La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / 2. (...) / Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable (...) ". L'application de ces critères peut toutefois être écartée en vertu de l'article 17 du même règlement, aux termes duquel : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". Il résulte de ces dispositions que si le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 pose en principe dans le 1 de son article 3 qu'une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre et que cet Etat est déterminé par application des critères fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, l'application des critères d'examen des demandes d'asile est toutefois écartée en cas de mise en oeuvre de la clause dérogatoire énoncée au 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre.
4. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen complet et rigoureux de la situation de M. C... A...et des conséquences de sa réadmission en Italie au regard notamment des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté qu'il conteste serait entaché d'un défaut d'examen sérieux.
5. D'autre part, l'intéressé fait état de la situation exceptionnelle dans laquelle se trouve l'Italie, confrontée à un afflux sans précédent de réfugiés. Toutefois, il n'est pas établi, par les pièces produites, que cette circonstance exposerait sa demande d'asile à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Il n'est pas davantage établi qu'il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants en Italie, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, doit être écarté le moyen tiré de ce qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de sa demande d'asile, la décision contestée aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.
6. En troisième lieu, il résulte des points 2 à 5 du présent arrêt que M. C... A...n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision ordonnant sa remise aux autorités italiennes pour contester la décision l'assignant à résidence.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de Maine-et-Loire du 11 septembre 2017. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 2 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 octobre 2018.
Le rapporteur,
M-P. Allio-RousseauLe président,
L. Lainé
Le greffier,
V. Desbouillons
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT03213