Vu :
- la Constitution de la République française et notamment son article 53-1 ;
- le règlement (UE) n°604/2013 du parlement européen et du conseil en date du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Francfort, président-assesseur,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., substituant MeB..., représentant M.D....
Considérant ce qui suit :
Les faits, la procédure :
1. M. D..., de nationalité afghane, né en 1992, est entré irrégulièrement sur le territoire français une première fois le 26 juin 2017. Il a sollicité l'asile auprès de la préfecture d'Ille-et-Vilaine le 6 juillet suivant. La consultation du fichier " Eurodac " faite sur la base de son relevé d'empreintes digitales a révélé que celles-ci avaient été enregistrées en Italie en 2011, rendant cet Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile en application des dispositions du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Les autorités italiennes ont été saisies, le 11 juillet 2017, d'une demande de prise en charge de M. D.... Elles ont implicitement accepté leur responsabilité dans le traitement de cette demande d'asile. A la suite, le préfet d'Ille-et-Vilaine a pris à l'encontre de M. D... un arrêté en date du 18 septembre 2017 par lequel cette autorité a décidé sa remise aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile. Après le rejet par le tribunal, le 16 octobre 2017, de la requête n° 1704447 contestant la légalité de cet arrêté, M. D... s'est soumis à la décision de transfert vers l'Italie, celle-ci étant exécutée le 7 décembre 2017.
2. Toutefois, M. D... est revenu irrégulièrement en France à la fin du mois de décembre 2017. Il a, à nouveau, sollicité l'asile auprès de la préfecture d'Ille-et-Vilaine le 2 janvier 2018. Les autorités italiennes ont été saisies à nouveau, le 31 janvier 2018, d'une demande de prise en charge de M. D... sur le fondement des dispositions du 1 de l'article 13 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Elles ont implicitement accepté, en application du 7 de l'article 22 du même règlement, leur responsabilité dans le traitement de cette demande d'asile. Par deux arrêtés du 14 mars 2018, notifiés le même jour, le préfet d'Ille-et-Vilaine a décidé que M. D... ferait l'objet d'un transfert aux autorités italiennes. M. D... a demandé au tribunal l'annulation de l'arrêté de transfert. Le préfet d'Ille-et-Vilaine relève appel du jugement du 20 mars 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté de transfert du 14 mars 2018 et enjoint au préfet d'autoriser M. D...à solliciter l'asile en France.
Sur les conclusions à fins d'annulation du jugement :
3. Aux termes de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 : " Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. /2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ".
4. Il résulte des dispositions précitées que lorsque le délai de six mois fixé pour l'exécution de la mesure de transfert a été interrompu par l'introduction d'un recours suspensif, il recommence à courir à compter de la décision juridictionnelle statuant sur ce recours.
5. Le délai de six mois dont disposait le préfet d'Ille-et-Vilaine pour procéder à l'exécution de sa décision de transférer M. D...vers l'Italie a été interrompu par la saisine du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes. Ce délai a recommencé à courir à compter du jugement du 20 mars 2018 rendu par ce magistrat et n'a fait l'objet d'aucune prolongation. Par suite, la décision de transfert est devenue caduque sans avoir reçu de commencement d'exécution. La France est donc devenue responsable de la demande d'asile sur le fondement des dispositions du 2 de l'article 29 du règlement n°604-2013 rappelées ci-dessus. Le litige ayant perdu son objet, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du préfet d'Ille-et-Vilaine tendant à l'annulation du jugement du 20 mars 2018.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Rennes du 20 mars 2018.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C...D.... Copie en sera transmise à la préfète d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-rapporteur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 avril 2019.
Le rapporteur,
J. FRANCFORTLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT01462 2
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