3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- les premiers juges ont insuffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de la faiblesse de la motivation de la décision de transfert ;
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les dispositions de l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- il méconnaît les dispositions de l'article 16 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- il méconnait les dispositions des articles 3 et 17 du règlement 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 juin et 17 juillet 2017, le préfet du Calvados conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce que la somme réclamée par la requérante au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 soit minorée.
Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Mme B...A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 8 août 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution du 4 octobre 1958 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Bouchardon, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme B...A..., ressortissante érythréenne entrée irrégulièrement en France le 26 septembre 2016, a sollicité son admission au titre de l'asile le 18 octobre suivant ; qu'ayant constaté, après consultation du fichier Eurodac, que l'intéressée était déjà connue des autorités italiennes, le préfet du Calvados a saisi ces dernières, en tant que responsables de l'examen de la demande d'asile de Mme B...A..., d'une demande de prise en charge de l'intéressée sur le fondement de l'article 13.1 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 ; qu'après leur accord implicite né le 20 décembre 2016, le préfet du Calvados a, par arrêté du 14 mars 2017, décidé de remettre Mme B...A...aux autorités italiennes ; que la requérante relève appel du jugement du 4 avril 2017 par lequel le président du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté contesté vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le règlement n° 604/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 ainsi que les différentes dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et rappelle la situation administrative de Mme B...A... ; qu'il mentionne par ailleurs que, le 20 décembre 2016, les autorités italiennes ont accepté implicitement de prendre en charge Mme B...A..., en application de l'article 22-7 dudit règlement ; que, par suite, l'arrêté est suffisamment motivé en droit et en fait ; que la circonstance que le préfet n'ait pas mentionné que Mme B...A...aurait des attaches en France ou suit des cours de français n'est pas davantage de nature à caractériser une insuffisance de motivation de l'arrêté contesté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. Cette décision est notifiée à l'intéressé. Elle mentionne les voies et délais de recours ainsi que le droit d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. Lorsque l'intéressé n'est pas assisté d'un conseil, les principaux éléments de la décision lui sont communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend " ;
4. Considérant que si les conditions dans lesquelles un acte administratif est notifié peuvent, dans l'hypothèse d'une notification irrégulière, avoir une incidence sur l'opposabilité des voies et délais de recours, elles restent sans influence sur la légalité de cet acte ; que, dès lors, la circonstance que la décision de transfert aux autorités italiennes n'aurait pas été notifiée à la requérante dans une langue qu'elle comprend, à la supposer établie, n'entache pas d'illégalité cette décision ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Lorsque l'Etat membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge d'un demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), l'Etat membre requérant notifie à la personne concernée la décision de le transférer vers l'Etat membre responsable et, le cas échéant, la décision de ne pas examiner sa demande de protection internationale (...)/ 2. La décision visée au paragraphe 1 contient des informations sur les voies de recours disponibles, y compris sur le droit de demander un effet suspensif, le cas échéant, et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours et à la mise en oeuvre du transfert et comporte, si nécessaire, des informations relatives au lieu et à la date auxquels la personne concernée doit se présenter si cette personne se rend par ses propres moyens dans l'Etat membre responsable (...) " ; qu'aux termes de l'article 29 du même règlement : " 1. Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. / 2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite " ;
6. Considérant qu'il ne résulte pas des dispositions citées ci-dessus de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, invoquées par la requérante, que le préfet ait l'obligation d'indiquer le délai dans lequel sa prise en charge devait être mise en oeuvre ; qu'en tout état de cause, l'article 2 de l'arrêté contesté précise que le transfert de l'intéressée " doit avoir lieu dans les six mois suivant l'accord des autorités italiennes ", en ajoutant que ce " délai peut être porté à douze mois en cas d'emprisonnement et à dix-huit mois en cas de fuite " ; que le moyen tiré d'une prétendue irrégularité de procédure doit dès lors être écarté ;
7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 16 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé, relatif aux personnes à charges : " 1. Lorsque, du fait d'une grossesse, d'un enfant nouveau-né, d'une maladie grave, d'un handicap grave ou de la vieillesse, le demandeur est dépendant de l'assistance de son enfant, de ses frères ou soeurs, ou de son père ou de sa mère résidant légalement dans un des Etats membres, ou lorsque son enfant, son frère ou sa soeur, ou son père ou sa mère, qui réside légalement dans un Etat membre est dépendant de l'assistance du demandeur, les Etats membres laissent généralement ensemble ou rapprochent le demandeur et cet enfant, ce frère ou cette soeur, ou ce père ou cette mère, à condition que les liens familiaux aient existé dans le pays d'origine, que l'enfant, le frère ou la soeur, ou le père ou la mère ou le demandeur soit capable de prendre soin de la personne à charge et que les personnes concernées en aient exprimé le souhait par écrit. / 2. Lorsque l'enfant, le frère ou la soeur, ou le père ou la mère visé au paragraphe 1 réside légalement dans un Etat membre autre que celui où se trouve le demandeur, l'Etat membre responsable est celui dans lequel l'enfant, le frère ou la soeur, ou le père ou la mère réside légalement, à moins que l'état de santé du demandeur ne l'empêche pendant un temps assez long de se rendre dans cet État membre. Dans un tel cas, l'Etat membre responsable est celui dans lequel le demandeur se trouve. Cet Etat membre n'est pas soumis à l'obligation de faire venir l'enfant, le frère ou la soeur, ou le père ou la mère sur son territoire " ;
8. Considérant que si elle fait valoir que plusieurs membres de sa famille résident en France, dont certains de manière régulière, la requérante n'établit aucunement qu'elle relevait, à la date de l'arrêté contesté, du champ d'application des dispositions susmentionnées ; que le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 16 du règlement du 26 juin 2013 ne peut qu'être écarté ;
9. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes du 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable " et qu'aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) " ;
10. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Calvados n'aurait pas examiné la possibilité, prévue par les articles 3 et 17 du règlement du 26 juin 2013, d'instruire la demande d'asile présentée et relevant de la compétence d'un autre Etat, en considération d'éléments tenant à la situation personnelle de Mme B...A..., aux défaillances systémiques dans la procédure d'asile et aux conditions d'accueil dans le pays désigné par la décision de réadmission, notamment au regard des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; que si Mme B...A...fait état de la situation exceptionnelle dans laquelle se trouve l'Italie, confrontée à un afflux sans précédent de réfugiés, elle n'établit toutefois pas que ces circonstances exposeraient sa demande d'asile à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; qu'elle ne démontre pas davantage qu'elle serait personnellement exposée à des risques de traitements inhumains ou dégradants en Italie, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, les moyens tirés de ce qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile, l'arrêté contesté aurait été pris en méconnaissance de l'article 53-1 de la Constitution et de celles des articles 3 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ne peuvent qu'être écartés ;
11. Considérant, en sixième et dernier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que Mme B...A...reprend en appel sans plus de précision ou de justification, doit être écarté par adoption des motifs du jugement attaqué, retenus à bon droit par le premier juge ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le président du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur le surplus des conclusions :
13. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par Mme B...A...ainsi que celles tendant au bénéfice des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B...A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 13 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- M. Durup de Baleine, premier conseiller,
- M. Bouchardon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 mai 2018.
Le rapporteur,
L. BOUCHARDONLe président,
J. FRANCFORT
La greffière,
E. HAUBOIS La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT01425