Par une requête enregistrée le 3 juillet 2019, M. A... C... représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 mai 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 6 août 2013 par laquelle le président de la communauté de communes du Pays de Chantonnay a refusé de le réintégrer sur son poste à compter du 10 juillet 2013 et l'a maintenu en position de disponibilité ;
3°) d'enjoindre à la communauté de communes du Pays de Chantonnay de le réintégrer à compter du 10 juillet 2013 et de reconstituer sa carrière ;
4°) de condamner la communauté de communes du Pays de Chantonnay à lui verser la somme de 53 394,40 euros en réparation de son préjudice ;
5°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays de Chantonnay le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête n'était pas tardive ; le courrier du 6 août 2013 qui comportait une décision portant refus de réintégration anticipée lui faisant grief ne comportait pas mention des voies et délais de recours ; s'il n'a pas formé sa requête dans le " délai raisonnable " d'un an posé par la décision du Conseil d'Etat du 13 juillet 2016, il y a lieu de tenir compte de " circonstances particulières " qui tiennent aux difficultés rencontrées auprès de la collectivité de communes pour obtenir des informations lui permettant d'apprécier la décision de non réintégration anticipée ;
- ses conclusions indemnitaires étaient bien recevables ; l'obligation de liaison du contentieux par une demande indemnitaire préalable peut en effet intervenir en cours d'instance ; c'est ainsi à la date du jugement de l'affaire que doit s'apprécier la condition tenant à l'existence d'une décision administrative refusant expressément ou implicitement d'indemniser un préjudice ; au cas d'espèce, un recours préalable obligatoire permettant de lier le contentieux a bien été transmise à la communauté de de communes de Chantonnay dans sa correspondance du 21 juin 2016 ;
- la décision contestée est illégale du fait qu'elle intervenue sans que la commission administrative paritaire ait été saisie ; il n'a pas non plus été satisfait à l'obligation de vérifier son aptitude médicale avant la réintégration sollicitée ;
- l'obligation de placement en surnombre à l'occasion d'un maintien en disponibilité opposé pour absence de poste vacant, qui est prévue par l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984, a été méconnue ; le centre de gestion territorialement compétent n'a pas été saisi ;
- l'absence de poste vacant qui fonde la décision contestée n'est pas établi ;
- la nomination de l'agent stagiaire qui a été nommé à sa place est entachée d'irrégularité ;
- son poste devait être considéré comme vacant à la date de sa demande de réintégration le 13 juillet 2013 et la personne nommée sur ce poste, considérée comme un agent contractuel ;
- les préjudices qui en découlent tiennent à la perte de chance subie de ne pas avoir été réintégré et au défaut de placement en surnombre entrainant une absence de prise en charge financière par le centre de gestion.
Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 juin et 27 août 2020, pour la communauté de communes du Pays de Chantonnay représentée par Me D... conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. C... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- et les observations de Me E..., représentant M. C... et de Me D... représentant la communauté de communes du Pays de Chantonnay.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., qui est employé en qualité d'assistant territorial de conservation du patrimoine des bibliothèques par la communauté de communes du Pays de Chantonnay depuis le 29 mars 2012, a été placé sur sa demande en disponibilité pour raisons familiales à compter du 1er décembre 2012 pour une période de trois ans. Le 10 juillet 2013, il a sollicité sa réintégration de manière anticipée au sein de la communauté de communes. Par un courrier du 6 août 2013, le président de la communauté de communes du Pays de Chantonnay a, au motif de l'absence de poste vacant, refusé de faire droit à cette demande de réintégration et a maintenu cet agent en disponibilité. Le 21 juillet 2015, M. C... a de nouveau demandé sa réintégration. Par un arrêté du 23 septembre 2015, la communauté de commune a créé un poste d'animateur des réseaux des bibliothèques. M. C... en a été informé et il lui a été proposé de réintégrer les effectifs de la communauté de communes. Cet agent qui, après avis favorable de la commission administrative paritaire, avait été réintégré par un arrêté du 23 novembre 2015 a, par un courrier du même jour adressé à la collectivité et reçu par cette dernière le 26 novembre 2015, refusé cette proposition. L'intéressé a alors été placé en disponibilité d'office par un arrêté du 30 novembre 2015. Il a ensuite sollicité les 12 avril et 21 juin 2016 sa réintégration à la date du 10 juillet 2013. Par un courrier du 3 août 2016, la communauté de communes du pays de Chantonnay a informé cet agent qu'en raison de l'occupation effective de son ancien poste et de l'absence d'un autre poste vacant à la date de sa demande de réintégration, elle ne pouvait faire droit à sa demande.
2. M. C... a, le 29 septembre 2016, demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, d'annuler la décision du 6 août 2013 par laquelle le président de la communauté de communes du Pays de Chantonnay a refusé de faire droit à sa demande de réintégration et l'a maintenu en position de disponibilité et d'enjoindre, en conséquence, à cette collectivité de le réintégrer à compter du 10 juillet 2013 en reconstituant sa carrière, et d'autre part, de condamner la communauté de communes à lui verser la somme de 25 818,90 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi. M. C... relève appel du jugement du 2 mai 2019 par lequel cette juridiction a rejeté comme irrecevables ses demandes. Il maintient ses demandes en portant toutefois ses prétentions indemnitaires à la somme de 53 394,40 euros.
Sur la régularité du jugement attaqué :
En ce qui concerne la recevabilité des conclusions d'annulation dirigées contre la décision du 6 août 2013 :
3. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative applicable à la date de la décision contestée : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " et aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".
4. Il résulte, par ailleurs, du principe de sécurité juridique que le destinataire d'une décision administrative individuelle qui a reçu notification de cette décision ou en a eu connaissance dans des conditions telles que le délai de recours contentieux ne lui est pas opposable doit, s'il entend obtenir l'annulation ou la réformation de cette décision, saisir le juge dans un délai raisonnable, qui ne saurait, en règle générale et sauf circonstances particulières, excéder un an.
5. Au cas d'espèce, il ressort des pièces du dossier que le courrier du 6 août 2013 contenant la décision contestée refusant de faire droit à la demande de réintégration anticipée de M. C... a été transmis, comme d'ailleurs le rappelle le requérant dans ses écritures, par lettre recommandée avec accusé de réception n°1A082198 9556 1 et qu'il n'est ni soutenu ni établi qu'il ne l'aurait pas reçue en dehors du délai normal de distribution. Si cette décision portant, sans ambiguïté refus de réintégration de l'agent, dont le requérant rappelle d'ailleurs en appel qu'elle lui faisait grief, ne comportait pas de notification faisant mention des voies et délais de recours, il ressort des pièces du dossier que M. C... a expressément évoqué cette décision dans un courrier qu'il a adressé à la communauté de communes du Pays de Chantonnay le 21 juillet 2015. Cette circonstance permet ainsi d'établir qu'il en a eu connaissance au plus tard à cette dernière date, soit plus d'un an avant l'enregistrement de sa requête présentée le 29 septembre 2016 devant le tribunal administratif de Nantes. S'il fait valoir qu'il n'aurait pas été en mesure d'apprécier le bien-fondé de cette décision, qu'il qualifie pourtant une nouvelle fois de " défavorable ", et dont il aurait en réalité ignoré l'illégalité jusqu'au moment où il a obtenu communication de la totalité des documents qu'il avait demandés à l'administration, ces éléments ne constituent pas une circonstance particulière de nature à prolonger le délai raisonnable défini au point 4. En tout état de cause, et comme l'ont rappelé justement les premiers juges, il ressort des pièces versées au dossier que M. C... a envisagé d'exercer un recours contre la décision contestée du 6 août 2013 dès le mois de novembre 2015 et n'a commencé à demander la communication de documents à l'administration qu'au mois d'avril 2016. Par suite, la décision du 6 août 2013 étant devenue définitive à la date d'introduction de la requête devant le tribunal le 29 septembre 2016, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les conclusions présentées par M. C... tendant à son annulation n'étaient pas recevables.
En ce qui concerne la recevabilité des conclusions indemnitaires présentées par M. C... :
6. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction résultant du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 portant modification du code de justice administrative, applicable à la date à laquelle le tribunal administratif s'est prononcé : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle ".
7. Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence d'une décision de l'administration rejetant une demande formée devant elle par le requérant ou pour son compte, une requête tendant au versement d'une somme d'argent est irrecevable et peut être rejetée pour ce motif même si, dans son mémoire en défense, l'administration n'a pas soutenu que cette requête était irrecevable, mais seulement que les conclusions du requérant n'étaient pas fondées. En revanche, les termes du second alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative n'impliquent pas que la condition de recevabilité de la requête tenant à l'existence d'une décision de l'administration s'apprécie à la date de son introduction. Cette condition doit être regardée comme remplie si, à la date à laquelle le juge statue, l'administration a pris une décision, expresse ou implicite, sur une demande formée devant elle. Par suite, l'intervention d'une telle décision en cours d'instance régularise la requête, sans qu'il soit nécessaire que le requérant confirme ses conclusions et alors même que l'administration aurait auparavant opposé une fin de non-recevoir fondée sur l'absence de décision.
8. Au cas d'espèce, il est constant tout d'abord que la communauté de communes du Pays de Chantonnay a, dans ses écritures de première instance, opposé une fin de non-recevoir tirée de l'absence de demande préalable indemnitaire adressée par M. C... permettant de lier le contentieux. Il ne résulte pas de l'instruction, comme l'ont justement estimé les premiers juges, que M. C... lui a effectivement adressé une telle demande permettant de faire naitre une décision, expresse ou implicite, de l'administration la rejetant et dont l'existence aurait été établie à la date à laquelle les premiers juges ont statué. Le courrier de quatre pages en date du 21 juin 2016, adressé par M. C... à la communauté de communes et auquel il se réfère, dont l'objet, après que plusieurs motifs d'illégalité de la décision du 6 août 2013 aient été longuement développés, était clairement, ainsi qu'il résulte des termes utilisés, de " mettre en demeure la communauté de communes de procéder à sa réintégration effective à la date du 10 juillet 2013 ", ne saurait en aucune façon être regardé comme une demande indemnitaire. La seule circonstance que cet agent a, au stade du rappel des démarches qu'il avait engagées indiqué " qu'il regrettait que la communauté de communes lui ait caché cette illégalité et qu'il demandait donc désormais réparation des préjudices causés ", et ce, sans davantage de précisions et de développements dans ce courrier, ne saurait pas plus tenir lieu d'une telle demande indemnitaire. Dans ces conditions, le contentieux n'étant pas lié, c'est à bon droit que les premiers juges ont, lorsqu'ils se sont prononcés, rejeté comme irrecevables les conclusions indemnitaires présentées par M. C....
9. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes en excès de pouvoir et indemnitaires.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté de communes du Pays de Chantonnay, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. C... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier le versement d'une somme à la communauté de communes au titre des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté de communes du Pays de Chantonnay tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à la communauté de communes du Pays de Chantonnay.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président de chambre,
- M. B..., président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2020.
Le rapporteur,
O. B...Le président,
O. GASPON
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 19NT02593 2