1°) l'annulation du jugement du tribunal administratif d'Orléans du 19 décembre 2017 ;
2°) la décharge de la somme qui lui est réclamée par une décision du 17 septembre 2015 du directeur général de l'agence de l'eau Loire-Bretagne, relative à un trop-perçu de rémunération au titre d'une rente complémentaire d'invalidité versée par la CPAM et en exécution d'un contrat de prévoyance souscrit auprès de la MACIF ;
3°) la condamnation de l'agence de l'eau Loire-Bretagne à lui verser une somme de 1 221 euros à parfaire au titre des préjudices subis du fait des fautes commises par son employeur dans l'exécution des stipulations contractuelles du contrat de prévoyance obligatoire et collectif passé avec la MACIF, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 août 2015 et capitalisation des intérêts ;
4°) d'enjoindre à l'agence de l'eau Loire-Bretagne de régulariser le versement de sa pension d'invalidité à compter du 1er juillet 2015, comprenant le calcul des cotisations sociales dues, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous peine d'une astreinte de 50 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- le tribunal a requalifié sa demande de manière erronée, dans la mesure où elle n'a jamais sollicité la compensation de créances ;
Sur le bien-fondé du jugement :
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, la juridiction administrative est compétente pour apprécier la responsabilité d'un employeur public à l'égard de son agent public quant à l'inexécution fautive d'un contrat de prévoyance collectif et obligatoire ;
- ses conclusions indemnitaires sont recevables dès lors qu'elle a lié le contentieux par une demande indemnitaire préalable du 14 août 2015 ;
- quand bien même elle n'aurait pas formé une demande indemnitaire préalable ou chiffré sa demande préalable, le défendeur n'ayant opposé aucune fin de non-recevoir sur ce point, il appartenait à la juridiction de l'inviter à régulariser sa requête avant de relever d'office cette irrecevabilité, conformément aux dispositions de l'article R. 612-1 du code de justice administrative ;
En ce qui concerne la responsabilité pour faute :
- les erreurs commises par l'agence de l'eau Loire-Bretagne lors de l'établissement de ses bulletins de salaire depuis août 2014 et le refus de régulariser ces erreurs lui ont causé des préjudices qu'il appartient à l'agence de l'eau de réparer :
l'indemnité perçue au titre de son compte épargne temps n'était pas soumise à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) et cette indemnité n'avait pas à être prise en compte dans ses revenus de référence pour le calcul de sa pension d'invalidité ;
cette faute lui a causé un préjudice, à savoir une baisse des montants versés de sa pension d'invalidité par la CPAM ;
- l'agence de l'eau a commis des erreurs dans le calcul du montant de la rente invalidité du contrat obligatoire de prévoyance auquel elle avait droit :
son salaire de référence ayant été calculé sur la base des douze derniers mois où elle était pour moitié sur l'échelon 9 et pour moitié sur l'échelon 10, le montant mensuel de référence communiqué à la MACIF pour le calcul de sa rente d'invalidité ne correspondait pas à son salaire actuel à l'échelon 10 sur la base d'un temps plein ;
l'agence de l'eau a appliqué une revalorisation de 508 euros brut mensuel sur la période allant de novembre 2015 à septembre 2016, mais à partir d'octobre 2016, le montant de la rente a été porté définitivement à 548,61 euros et n'a jamais été revalorisé ;
- l'agence de l'eau a engagé sa responsabilité dès lors qu'elle lui a octroyé pendant une longue durée un avantage financier indu ;
- l'agence de l'eau n'était pas fondée à récupérer les sommes supposément indument perçues par son agent sans au préalable retirer la décision illégale créatrice de droit acquis et le refus de l'agence de l'eau de procéder à l'effacement de son trop-perçu est fautif ;
En ce qui concerne la responsabilité quasi-délictuelle:
- l'agence de l'eau a engagé sa responsabilité quasi-délictuelle du fait des nombreuses fautes de gestion administrative commises.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2018, l'agence de l'eau Loire-Bretagne, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme E...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à bon droit que le tribunal a considéré que l'appelante devait être regardée comme demandant la compensation entre la dette mise à sa charge et la créance dont elle se prévaut ;
- la juridiction administrative est incompétente pour apprécier sa responsabilité dans le cadre de l'exécution du contrat en litige qui ne relève pas des procédures de mise en concurrence telles que prévues par le code des marchés publics et le contrat de prévoyance à adhésion obligatoire souscrit avec la MACIF ne constitue nullement un contrat administratif.
- le contentieux n'étant pas lié, les conclusions indemnitaires sont irrecevables et ne peuvent être que rejetées et en tout état de cause aucune faute ne peut lui être reprochée dans la gestion du dossier de MmeE....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
- l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ;
- le décret n° 2002-634 du 29 avril 2002 ;
- le décret n°2007-832 du 11 mai 2007 ;
- le décret n° 2007- 1373 du 19 septembre 2007 ;
- le décret n° 2007-1597 ;
- le décret n° 2016-32 du 20 janvier 2016 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pons,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- les observations de Me D...substituant MeA..., représentant MmeE..., et de Me Tissier-Lotz, avocate de l'agence de l'eau Loire-Bretagne.
Considérant ce qui suit :
1. MmeE..., agent contractuel de droit public, exerce ses fonctions en qualité d'agent de niveau 2, 10ème échelon de son grade au sein de l'agence de l'eau Loire-Bretagne. Par décision du 27 juin 2014, elle a été placée en invalidité à compter du 1er août 2014 et perçoit à ce titre une pension d'invalidité servie par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM). Elle a par ailleurs été autorisée, par décision du 22 avril 2015, à exercer ses fonctions à mi-temps à compter du 1er août 2014. L'agence de l'eau ayant souscrit auprès de la MACIF, au bénéfice de ses agents, une assurance prévoyance obligatoire, Mme E...perçoit à ce titre une rente destinée à compenser la perte de traitement résultant de son incapacité de travail. Cette rente est versée par l'agence de l'eau en même temps que le traitement, l'agence étant remboursée par la MACIF. Dans l'attente de la notification du montant de la rente à verser par la MACIF, l'agence de l'eau a versé mensuellement à l'intéressée la somme de 805,39 euros au titre de la rente d'invalidité à compter du 1er août 2014. Par lettre du 23 avril 2015, la MACIF a communiqué à l'agence de l'eau le montant annuel de la rente invalidité à verser à la requérante, évalué à 5 537,50 euros, soit un montant mensuel de 478,12 euros, lui rappelant à cette occasion qu'il appartient à l'employeur de précompter sur cette somme le montant de la CSG et la CRDS. Au vu de ces éléments, l'agence de l'eau a recalculé les sommes dues à la requérante et lui a adressé, le 11 mai 2015, une simulation du montant de sa rémunération pour le mois de mai 2015 faisant apparaître un trop-perçu de 478,22 euros. En juin 2015, la MACIF a informé l'agence de l'eau de la modification du montant annuel de la rente invalidité à verser à Mme E... portée à 6 099,05 euros, soit un montant mensuel de 508,29 euros. Par lettre du 14 août 2015, la requérante a contesté la validité du trop-perçu réclamé, faisant valoir l'existence d'un moins-perçu dont elle a demandé le reversement à l'agence de l'eau, contestant le montant de la rente versée par la MACIF, ainsi que le montant de la pension servie par la CPAM, pris en compte pour le calcul de cette rente, lui-même entaché d'erreurs.
2. Par décision du 17 septembre 2015, le directeur général de l'agence de l'eau a rejeté la demande de la requérante relative à la régularisation de la rente complémentaire versée par la MACIF, l'a informé qu'un rappel de 1 070, 14 euros brut allait lui être versé au titre de la rente d'invalidité versée par la CPAM et qu'une régularisation de ses bulletins de salaire allait être effectuée sur le mois d'octobre 2015, consistant à substituer au montant négatif de 478,22 réclamé le 11 mai 2015, un montant positif de 543,35 euros.
3. D'une part, les articles L. 142-1 à L.142-3 du code de la sécurité sociale attribuent compétence au tribunal des affaires de sécurité sociale pour connaître des litiges relevant du contentieux de la sécurité sociale. En ce qui concerne les fonctionnaires ou agents de l'Etat et des collectivités publiques, le critère de la compétence des organismes du contentieux de la sécurité sociale est lié, non à la qualité des personnes en cause, mais à la nature même du différend. Les litiges à caractère individuel qui peuvent s'élever au sujet de l'affiliation d'une personne à un régime de sécurité sociale relèvent de la compétence des juridictions du contentieux général de la sécurité sociale. Il en va ainsi, même dans le cas où les décisions contestées sont prises par des autorités administratives, dès lors du moins que ces décisions sont inhérentes à la gestion, suivant des règles de droit privé, du régime de sécurité sociale en cause. Enfin, les rapports entre les salariés et les employeurs qui ont trait aux obligations de ces derniers au regard d'une institution de prévoyance gérant un régime complémentaire de retraite, sont des rapports de droit privé.
4. D'autre part, dans la mesure où la faute dont il est demandé réparation se rattache au fonctionnement d'un service mettant en cause une législation dont le contentieux relève des juridictions judiciaires, seules celles-ci peuvent statuer sur une action en responsabilité, quand bien même la faute résulterait d'une action ou d'une inaction reprochée à une personne publique.
5. Enfin, les agents contractuels de l'Etat doivent être affiliés au régime général de sécurité sociale et ont vocation à percevoir les prestations du régime général de sécurité sociale, conformément à l'article 2 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986. Selon les articles L.341-1 et suivants du code de la sécurité sociale, l'assurance maladie comporte pour l'assuré social le droit à une pension d'invalidité en cas de diminution de sa capacité de travail.
6. En l'espèce, le directeur général de l'agence de l'eau a versé à MmeE..., de façon provisionnelle, sa pension d'invalidité d'août 2014 à mars 2015 en même temps que sa rémunération mensuelle, l'agence étant ensuite remboursée par les organismes de sécurité sociale. L'action de l'intéressée contestant la décision en cause et l'obligation de payer les sommes en résultant tendant au remboursement d'une partie de la rente d'invalidité perçue ou qu'elle aurait perçu à tort se rattache à la répétition de prestations versées à un assuré social, en application du code de la sécurité sociale. Il en résulte que la juridiction compétente est celle de l'ordre judiciaire. De même, la faute de service reprochée au directeur général de l'agence de l'eau dans l'exercice de ses attributions de gestionnaire du régime de sécurité sociale des personnels de l'agence concerne le fonctionnement d'un service mettant en oeuvre une législation dont le contentieux relève de juridictions rattachées à l'ordre judiciaire. Le litige résultant d'une éventuelle faute commise à cette occasion relève également de la compétence de cet ordre de juridiction.
7. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif d'Orléans s'est prononcé au fond sur la demande de Mme E...tendant à la décharge des sommes en cause constitutives d'un trop perçu de rémunération au titre d'une rente complémentaire d'invalidité. Il y a lieu d'annuler le jugement attaqué et, statuant par voie d'évocation, de rejeter la demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ainsi que, par voie de conséquence, les demandes d'injonction et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 19 décembre 2017 du tribunal administratif d'Orléans est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme C...E...devant le tribunal administratif d'Orléans est rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...E...et à l'agence de l'eau Loire-Bretagne.
Délibéré après l'audience du 5 juillet 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 juillet 2019.
Le rapporteur,
F. PONSLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et solidaire, en ce qui la concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
5
N° 18NT00756