Procédure devant la cour :
I. Par une requête n° 17NT01824, enregistrée le 16 juin 2017, M. C...B..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans n° 1701548 du 23 mai 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 avril 2017 par lequel le préfet d'Indre-et-Loire a prononcé sa remise aux autorités italiennes ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il n'a pas été destinataire de l'ensemble des informations qui doivent être communiquées aux demandeurs d'asile ;
- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article 10 du règlement n°1560/2003 de la commission du 2 septembre 2003 ;
- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions des articles 3 et 17 du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2017, le préfet d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 10 juillet 2017.
II. Par une requête n° 17NT01825, enregistrée le 16 juin 2017, Mme A...D...épouseB..., représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans n° 1701549 du 23 mai 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 avril 2017 par lequel le préfet d'Indre-et-Loire a prononcé sa remise aux autorités italiennes ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- elle n'a pas été destinataire de l'ensemble des informations qui doivent être communiquées aux demandeurs d'asile ;
- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article 10 du règlement n°1560/2003 de la commission du 2 septembre 2003 ;
- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions des articles 3 et 17 du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2017, le préfet d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.
Mme A...D...épouse B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 17 juillet 2017.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le règlement (CE) n°1560/2003 de la commission du 2 septembre 2003 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Bouchardon a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. et MmeB..., ressortissants congolais entrés irrégulièrement en France le 1er novembre 2016, ont déposé le 8 décembre suivant une demande d'asile en préfecture ; qu'ayant constaté, après consultation du fichier " Eurodac ", que les intéressés étaient déjà connus des autorités italiennes, les autorités préfectorales ont saisi ces dernières, en tant que responsables de l'examen des demandes d'asile, d'une demande de prise en charge de M. et Mme B...sur le fondement de l'article 13.1 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; que les autorités italiennes l'ayant acceptée par une décision implicite du 16 février 2017, le préfet d'Indre-et-Loire a ordonné la remise des intéressés à ces autorités par des arrêtés du 25 avril 2017 ; que, par les requêtes enregistrées sous les n°s 17NT01824 et 17NT01825, M. et Mme B...relèvent appel des jugements du 23 mai 2017 par lesquels le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces décisions ; qu'il y a lieu de joindre ces requêtes et de statuer par un seul arrêt ;
Sur les conclusions à fin d'annulation des arrêtés contestés :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 du règlement n° 604/2013 susvisé du 26 juin 2013 : "1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de 1'application du présent règlement, et notamment : a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un État membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'État membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée; b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un État membre peut mener à la désignation de cet État membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères; c) de l'entretien individuel en vertu de 1'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les États membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations; d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement; f) de 1'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de1'entretien individuel visé à l'article 5. / 3. La Commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune (...), contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n°603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les Etats membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux Etats membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme B...ont certifié par leur signature, à l'issue de leur entretien individuel le 8 décembre 2016, qui s'est déroulé en français, langue qu'ils ont déclaré comprendre, en préfecture de région à Orléans où ils ont déposé leur demande, que " toutes les informations et l'attestation [leur] ont été délivrées " ; qu'il suit de là que les requérants doivent être regardés comme ayant reçu toute l'information prévue par les dispositions précitées de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, en dépit de ce que la case " le guide du demandeur d'asile et l'information sur les règlements communautaires m'ont été remis " n'a pas été cochée sur le compte-rendu des entretiens ; que dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable " et qu'aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) " ;
5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet d'Indre-et-Loire n'aurait pas examiné la possibilité, prévue par les articles 3 et 17 du règlement du 26 juin 2013, d'examiner la demande d'asile présentée et relevant de la compétence d'un autre Etat, en considération d'éléments tenant à l'état de santé de M. et MmeB..., aux défaillances systémiques dans la procédure d'asile et aux conditions d'accueil dans le pays désigné par les décisions de réadmission, notamment au regard des garanties exigées par le respect du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si les requérants font état de la situation exceptionnelle dans laquelle se trouve l'Italie, confrontée à un afflux sans précédent de réfugiés, et de leur particulière vulnérabilité du fait de leur état de santé, ils n'établissent toutefois pas que ces circonstances exposeraient leur demande d'asile à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; qu'ils ne démontrent pas davantage qu'ils seraient personnellement exposés à des risques de traitements inhumains ou dégradants en Italie, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, les moyens tirés de ce qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile, les décisions contestées auraient été prises en méconnaissance des articles 3 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ne peuvent qu'être écartés ;
6. Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 10 du règlement susvisé de la Commission du 2 septembre 2003, relatif au transfert suite à une acceptation implicite : " 1. Lorsque, en vertu de l'article 18, paragraphe 7, ou de l'article 20, paragraphe 1, point c), du règlement (CE) no 343/2003, selon le cas, l'État membre requis est réputé avoir acquiescé à une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge, il incombe à l'État membre requérant d'engager les concertations nécessaires à l'organisation du transfert. 2. Lorsqu'il en est prié par l'État membre requérant, l'État membre responsable est tenu de confirmer, sans tarder et par écrit, qu'il reconnaît sa responsabilité résultant du dépassement du délai de réponse (...) " ; que la méconnaissance de l'obligation instituée par le 2 de cet article, qui incombe à l'Etat membre responsable de l'examen de la demande d'asile, en l'espèce les autorités italiennes, est sans incidence sur la légalité de la décision de remise dès lors que cet Etat membre doit être regardé, en vertu du 1 du même article, comme ayant implicitement accepté la demande formulée par les autorités françaises ; que le moyen tiré de la violation du 2 de l'article 10 du règlement du 2 septembre 2003 doit dès lors être écarté comme inopérant ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le magistrat désigné du tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes ;
Sur le surplus des conclusions :
8. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par les requérants, ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B..., à Mme A...D...épouse B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Une copie sera transmise pour information au préfet d'Indre-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 4 mai 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- M. Pons, premier conseiller,
- M. Bouchardon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 mai 2018.
Le rapporteur,
L. BOUCHARDON
Le président,
J. FRANCFORT
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N°s 17NT01824 et 17NT01825