1°) d'annuler ce jugement du 25 septembre 2017 du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 août 2017 du préfet d'Ille-et-Vilaine ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer un récépissé en qualité de demandeur d'asile dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir
ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour dans cette attente ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de
1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet et approfondi de sa situation et n'a pas suffisamment motivé sa décision ;
- l'arrêté méconnaît les dispositions des articles 20 et 21 du règlement (UE)
n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- les dispositions du 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du
26 juin 2013 ont été méconnues.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mai 2018, le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par une correspondance enregistrée le 11 juin 2018 le préfet d'Ille-et-Vilaine a indiqué, en réponse à une demande du greffe, que le délai de transfert avait été prolongé.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier. Vu :
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne C-670/16 du 26 juillet 2017 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Francfort,
- et les observations de MeC..., substituant Me A...E..., représentant M.D....
Considérant ce qui suit :
1. M.D..., ressortissant russe né le 3 décembre 1991, déclare être entré en France le 14 février 2017. Le 30 mars 2017, il a sollicité son admission provisoire au séjour au titre de
l'asile auprès de la préfecture d'Ille-et-Vilaine. La comparaison de ses empreintes dans le système Visabio a révélé qu'il était titulaire d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour délivré par les autorités allemandes, valable du 8 février 2017 au 15 février 2017. Les autorités allemandes, saisies d'une demande de prise en charge du 21 juin 2017 sur le fondement des dispositions du 4 de l'article 12 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ont donné leur accord le 12 juillet 2017. Par un arrêté du 24 août 2017, le préfet d'Ille-et-Vilaine a prononcé son transfert aux autorités allemandes, responsables de l'examen de sa demande d'asile. M. D...relève appel du jugement du 25 septembre 2017 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 août
2017.
En ce qui concerne le délai prévu à l'article 21 du règlement Dublin III :
2. Aux termes de l'article 20 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013 : " Début de la procédure - 1. Le processus de détermination de l'Etat membre responsable commence dès qu'une demande de protection internationale est introduite pour la première fois auprès d'un Etat membre. / 2. Une demande de protection internationale est réputée introduite à partir du moment où un formulaire présenté par le demandeur ou un procès-verbal dressé par les autorités est parvenu aux autorités compétentes de l'Etat membre concerné. Dans le cas d'une demande non écrite, le délai entre la déclaration d'intention et l'établissement d'un procès- verbal doit être aussi court que possible. (...) ". Et aux termes de l'article 21 du même règlement : " Présentation d'une requête aux fins de prise en charge- 1. L'Etat membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre Etat membre est responsable de l'examen de cette demande peut, dans les plus brefs délais et, en tout état de cause, dans un délai de trois mois à compter de la date de l'introduction de la demande au sens de l'article 20, paragraphe 2, requérir cet autre Etat membre aux fins de prise en charge du demandeur. / (...) / Si la requête aux fins de prise en charge d'un demandeur n'est pas formulée dans les délais fixés par le premier et le deuxième alinéa, la responsabilité de l'examen de la demande de protection internationale incombe à l'Etat membre auprès duquel la demande a été introduite
3. En premier lieu il résulte des dispositions précitées de l'article 20, ainsi que l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt C-670/16 du 26 juillet 2017, qu'une décision de transfert vers un Etat membre autre que celui auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite ne saurait être valablement adoptée une fois expiré le délai de trois mois prévu par le 1 précité de l'article 21.
4. En second lieu, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit, par son arrêt C-670/16 déjà mentionné, que le paragraphe 2 de cet article 20 devait être interprété en ce sens qu'une demande de protection internationale est réputée introduite lorsqu'un document écrit, établi par une autorité publique et attestant qu'un ressortissant de pays tiers a sollicité la protection internationale, est parvenu à l'autorité chargée de l'exécution des obligations découlant de ce règlement et, le cas échéant, lorsque seules les principales informations figurant dans un tel document, mais non celui-ci ou sa copie, sont parvenues à cette autorité. La Cour a également précisé dans cet arrêt que, pour pouvoir engager efficacement le processus de détermination de l'Etat responsable, l'autorité compétente a besoin d'être informée, de manière certaine, du fait qu'un ressortissant de pays tiers a sollicité une protection internationale, sans qu'il soit nécessaire que le document écrit dressé à cette fin revête une forme précisément déterminée ou qu'il comporte des éléments supplémentaires pertinents pour l'application des critères fixés par le règlement Dublin III ou, a fortiori, pour l'examen au fond
de la demande, et sans qu'il soit nécessaire à ce stade de la procédure qu'un entretien individuel ait déjà été organisé.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. D...s'est présenté le 22 février 2017 à la plateforme d'accueil des demandeurs d'asile de Rennes, gérée par l'association Coallia, et a manifesté l'intention de demander l'asile. Cependant, si le requérant verse en cause d'appel une attestation établie le 22 février 2017 par un responsable de Coallia, selon laquelle " M. D...est dans l'attente d'un rendez-vous au Guichet Unique de l'Asile (GUA) en préfecture de Rennes ", les termes de cette attestation, d'ailleurs non produite au premier juge, ne suffisent pas à établir que le formulaire de demande d'asile aurait été transmis au guichet unique de la préfecture d'Ille-et-Vilaine à la date de son établissement. Dans ces conditions cette date ne peut être retenue comme le point de départ du délai de trois mois prévu à l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Dès lors le point de départ de ce délai ne peut être fixé, dans les circonstances de la présente espèce, antérieurement au 30 mars 2017, date à laquelle la convocation a été transmise à l'intéressé par la préfecture, qui avait nécessairement reçu communication de la demande d'asile de M.D.... Par suite le délai de trois mois prévu à l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 n'était pas expiré le 21 juin 2017, date à laquelle le préfet a formulé une demande de prise en charge auprès des autorités allemandes.
En ce qui concerne les autres moyens de la requête :
6. Pour le surplus de sa requête, M. D...se borne à reprendre les moyens invoqués en première instance, tirés de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen complet et approfondi de sa situation, de ce que l'arrêté serait insuffisamment motivé et qu'il méconnaîtrait les dispositions de l'article 17-1 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Dès lors qu'il n'apporte aucun élément de droit ou de fait nouveau à l'appui de ces moyens auxquels le tribunal a suffisamment et pertinemment répondu, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le premier juge.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions aux fins d'injonction présentées par le requérant et celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E : Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise à la préfète d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 11 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président,
- Mme Gélard, premier conseiller,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 janvier 2019.
Le président,
J. FRANCFORT
L'assesseur le plus ancien,
V. GELARD
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.