Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 5 janvier 2017, le 6 et le 9 février 2018 et le 20 juin 2018, M. A...G..., représenté par MeE..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 3 novembre 2016 ;
2°) d'annuler la décision du 20 mai 2014 par laquelle le président du conseil d'administration du SDIS du Calvados a décidé de ne pas renouveler son contrat de travail à durée déterminée ;
3°) de condamner le SDIS du Calvados à lui verser une somme de 150 000 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter de sa réclamation préalable en réparation des préjudices subis ;
4°) d'enjoindre au directeur du SDIS du Calvados de le réintégrer dans ses fonctions et de lui proposer un contrat à durée indéterminée dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge du SDIS du Calvados la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- le jugement est irrégulier en ce que le tribunal n'a pas répondu au moyen soulevé en première instance tenant à la possibilité de le rétrograder sur un poste de catégorie B, même si son poste avait réellement été supprimé ;
Sur le bien-fondé du jugement :
- c'est à tort que le tribunal a estimé que le recrutement et le renouvellement de sa situation contractuelle avaient été conclus sur le fondement des dispositions de l'article 3-2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le tribunal a considéré à tort que de 2012 à 2014, il avait occupé des fonctions de technicien d'hygiène et de sécurité se rattachant au cadre d'emplois des techniciens territoriaux relevant de la catégorie B, alors qu'il a systématiquement occupé des fonctions et assumé des responsabilités correspondant à des emplois de niveau de catégorie A ;
- il peut se prévaloir d'un contrat à durée indéterminée sur le fondement des dispositions de l'article 3-4 de la loi du 26 janvier 1984, dans la mesure où les fonctions qu'il a assumées relevaient de la même catégorie hiérarchique ; il a poursuivi dans les faits des fonctions de catégorie A après 2012, qu'il s'agisse de la filière sport ou de la filière technique, eu égard aux responsabilités occupées et au niveau de diplôme pour lequel il a été recruté ; son poste de conseiller des activités physiques et sportives n'a pas été supprimé ;
- dès lors qu'il justifiait d'une durée de services publics effectifs de six ans au moins sur des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique, le renouvellement de son contrat le 1er octobre 2013 ne pouvait être conclu que pour une durée indéterminée, de sorte que la décision de mettre fin aux relations contractuelles à compter du 30 septembre 2014 doit s'analyser comme un licenciement ouvrant droit à son profit aux indemnités de licenciement visées par l'article 46 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- son recrutement était irrégulier et il aurait dû, par suite, être recruté en contrat à durée indéterminée, de sorte que la décision de non renouvellement contestée doit s'analyser comme une décision de licenciement, irrégulière par voie de conséquence ;
- la décision de licenciement dont il a fait l'objet est illégale :
elle est insuffisamment motivée ;
elle a été signée par une autorité incompétente ;
* elle est irrégulière car elle n'est fondée ni sur une inaptitude physique, ni sur un motif disciplinaire ou une insuffisance professionnelle ;
- en tout état de cause, la décision de ne pas renouveler son contrat est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle est insuffisamment motivée et fondée sur des motifs étrangers au service, en l'occurrence la volonté d'éviter qu'il ne bénéficie d'un contrat à durée indéterminée ;
- la responsabilité du SDIS est engagée pour avoir conclu avec lui des contrats illégaux et pour avoir refusé de renouveler son contrat à compter du 30 septembre 2014 et il est fondé à demander la somme de 150 000 euros en réparation de ses préjudices ;
Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er mars 2018 et 18 juin 2018, le SDIS du Calvados conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A...G...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 2010-1357 du 9 novembre 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pons,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- les observations de MeD..., représentant le SDIS du Calvados.
Des notes en délibéré, présentées pour le SDIS du Calvados et M. A...G..., ont été enregistrées respectivement les 7 et 13 novembre 2018.
Considérant ce qui suit :
1. M. A...G...a été recruté par le SDIS du Calvados à compter du 1er novembre 2007 jusqu'au 30 septembre 2012 par le biais de plusieurs contrats successivement reconduits pour exercer les fonctions de conseiller des activités physiques et sportives. A compter du 1er octobre 2012, le requérant a bénéficié d'un nouveau contrat à durée déterminée de douze mois pour exercer les fonctions de chef de service hygiène et sécurité sur un grade de technicien principal de 1ère classe. Ce contrat a été renouvelé jusqu'au 30 septembre 2014. Au cours d'un entretien en date du 22 avril 2014, M. A...G...a été informé que son contrat ne serait pas renouvelé à son terme, compte tenu de la réorganisation du groupement des ressources humaines et du redéploiement de ses effectifs. Par une décision du 20 mai 2014, le président du conseil d'administration du SDIS a décidé de ne pas renouveler le contrat de l'intéressé. Par un courrier du 30 juillet 2014, le requérant a présenté un recours gracieux contre cette décision ainsi qu'une demande préalable indemnitaire tendant à la réparation des préjudices subis, lesquels ont été implicitement rejetés. Par sa présente requête, M. A...G...relève appel du jugement du tribunal administratif de Caen ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 mai 2014 et à la condamnation du SDIS à lui verser une somme de 150 000 euros en réparation des préjudices subis.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, M. F...C..., directeur administratif et financier du SDIS du Calvados, a reçu délégation de signature, par arrêté du 13 février 2012 affiché en un lieu ouvert au public à compter du 18 février 2012, à l'effet de signer " tous actes administratifs et conventions relevant des compétences et attributions du Président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Calvados ", à l'exception de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions de non-renouvellement des contrats à durée déterminée des agents non titulaires. Par suite, M. C...était compétent pour signer l'arrêté attaqué.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que (...) pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi. (...) ". Aux termes de l'article 3-2 de la même loi : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée et pour les besoins de continuité du service, les emplois permanents des collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 de la présente loi peuvent être occupés par des agents contractuels pour faire face à une vacance temporaire d'emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire. / Le contrat est conclu pour une durée déterminée qui ne peut excéder un an. (...) ". Aux termes de l'article 3-3 de la même loi : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée et sous réserve de l'article 34 de la présente loi, des emplois permanents peuvent être occupés de manière permanente par des agents contractuels dans les cas suivants : (...) 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A lorsque les besoins des services ou la nature des fonctions le justifient et sous réserve qu'aucun fonctionnaire n'ait pu être recruté dans les conditions prévues par la présente loi ; (...) Les agents ainsi recrutés sont engagés par contrat à durée déterminée d'une durée maximale de trois ans. (...) ". Aux termes de l'article 3-4 de la même loi : " (...) II. Tout contrat conclu ou renouvelé pour pourvoir un emploi permanent en application de l'article 3-3 avec un agent qui justifie d'une durée de services publics effectifs de six ans au moins sur des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique est conclu pour une durée indéterminée. / La durée de six ans mentionnée au premier alinéa du présent II est comptabilisée au titre de l'ensemble des services accomplis auprès de la même collectivité ou du même établissement dans des emplois occupés sur le fondement des articles 3 à 3-3. (...) Lorsqu'un agent remplit les conditions d'ancienneté mentionnées aux deuxième à quatrième alinéas du présent II avant l'échéance de son contrat en cours, les parties peuvent conclure d'un commun accord un nouveau contrat, qui ne peut être qu'à durée indéterminée ".
4. Il ressort des pièces du dossier que le contrat à durée déterminée conclu par M. A... G...pour la période du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2014 vise l'article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 et précise dans son intitulé que ce contrat porte " nomination d'un agent non titulaire dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire " et stipule que l'intéressé est recruté pour exercer les fonctions de technicien hygiène et sécurité qui se rattachent au grade de technicien principal de 1ère classe du cadre d'emplois des techniciens territoriaux relevant, selon le décret du 9 novembre 2010 visé, de la catégorie B. Ainsi que l'a relevé le tribunal, la seule circonstance que le contrat stipule également que " la nature des fonctions le justifie " ne saurait suffire à considérer que le contrat a été conclu sur le fondement des dispositions citées de l'article 3-3 de la loi du 6 janvier 1984. Dans ces conditions, le requérant ne saurait utilement soutenir, en se référant aux dispositions de l'article 3-4 de la loi du 26 janvier 1984, que le contrat en cause serait en fait un contrat à durée indéterminée au motif que les fonctions qu'il a assumées relèveraient en fait, après 2012, de la catégorie A, qu'il s'agisse de la filière sport ou de la filière technique. Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que M. A... G...ne pouvait utilement soutenir que son contrat de travail aurait, à la date de la décision du 20 mai 2014, le caractère d'un contrat à durée indéterminée et, par conséquent, que la décision attaquée devait bien s'analyser comme une décision de non-renouvellement de contrat à durée déterminée et non comme un licenciement.
5. En troisième lieu, la circonstance, à la supposer établie, que M. A...G...aurait été illégalement recruté entre 2007 et 2013 pour exercer les fonctions qui lui ont été contractuellement dévolues sur le fondement de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 visée est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision de ne pas renouveler le contrat de travail de l'intéressé.
6. En quatrième lieu, un agent dont le contrat est arrivé à échéance n'a aucun droit au renouvellement de celui-ci. Il en résulte qu'alors même que la décision de ne pas renouveler ce contrat serait fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur son aptitude professionnelle et se trouverait ainsi prise en considération de sa personne, elle n'est, sauf à revêtir le caractère d'une mesure disciplinaire, pas au nombre des mesures qui doivent être motivées en application des dispositions de la loi du 11 janvier 1979. Il n'est ni soutenu ni même allégué, que la décision attaquée du 20 mai 2014 constituerait une mesure disciplinaire. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision doit être écarté comme inopérant. Il en est de même du moyen tiré de ce que la décision n'est fondée sur aucun des cas de licenciement autorisés par la loi dès lors qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'elle constitue une décision de refus de renouveler un contrat à durée déterminée et non une mesure de licenciement.
7. En cinquième lieu, le titulaire d'un contrat à durée déterminée ne saurait se prévaloir d'un droit au renouvellement de ce contrat et l'administration peut toujours, pour des motifs tirés de l'intérêt du service, décider de ne pas renouveler et de mettre fin aux fonctions de l'agent recruté sur son fondement. En l'espèce, si M. A...G...soutient que la décision en litige n'est pas justifiée par l'intérêt du service mais a eu en réalité pour but de ne pas le faire bénéficier d'un contrat à durée indéterminée en application de l'article 3-4 de la loi du 26 janvier 1984, il ressort toutefois des pièces du dossier que la décision attaquée est motivée par la réorganisation du groupement des ressources humaines et le redéploiement des effectifs. Il est constant que cette réorganisation a permis d'ouvrir deux postes de chef de bureau et de chef de service qualité environnement du travail, lesquels ont été pourvus par des agents titulaires. Le recrutement d'un agent titulaire sur le poste qu'occupait M. A...G...avant la réorganisation est conforme à la finalité du recrutement de l'intéressé, justifiée par le recours à un agent non titulaire " dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire ". Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de ne pas renouveler le contrat de M. A... G...soit fondée sur des motifs étrangers au service.
8. Il résulte de ce qui précède que M. A...G...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement :
9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant ait soulevé en première instance le moyen tiré de l'impossibilité de le rétrograder sur un poste de catégorie B, qui, au demeurant, est sans incidence sur la légalité de la décision de non-renouvellement contestée. Par suite, le jugement n'est pas entaché d'irrégularité.
Sur les conclusions indemnitaires :
10. Il résulte de ce qui précède que le SDIS du Calvados n'a commis aucune faute. Par suite, les conclusions indemnitaires du requérant ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
11. M. A...G...n'étant pas fondé à demander l'annulation de la décision du 20 mai 2014 par laquelle le président du conseil d'administration du SDIS a décidé de ne pas renouveler le contrat de l'intéressé, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du SDIS du Calvados, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M. A...G...au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...G...la somme réclamée par le SDIS du Calvados au titre des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...G...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du SDIS du Calvados sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...G...et au service départemental d'incendie et de secours du Calvados.
Délibéré après l'audience du 26 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 novembre 2018.
Le rapporteur,
F. PONSLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, en ce qui la concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT00046