Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 11 juillet 2014, M. F... et Mme B..., représentés par MeD..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1219041/7-1 du 13 mai 2014 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 22 mai 2012 refusant le changement de nom, ensemble la décision du 3 septembre 2012 portant rejet du recours gracieux ;
3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de procéder au changement du nom de leurs enfants mineurs en " F... " ou subsidiairement en " F...-B... " ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les décisions des 22 mai 2012 et 3 septembre 2012 sont insuffisamment motivées en fait ;
- le garde des sceaux a fait une inexacte application des dispositions de l'article 61 du code civil dès lors qu'il existe un intérêt légitime à assurer l'unité du nom familial ; que, par ailleurs, le changement de nom permettra d'éviter la disparition du nom " F... " qui, sinon, ne sera pas transmis par les enfants ;
- l'officier d'état civil les a induits en erreur le 22 février 2006 sur l'ordre des noms lors de la reconnaissance par M. F...de leur premier enfant.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 décembre 2015, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 94-52 du 20 janvier 1994 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Amat,
- et les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public.
1. Considérant que M. F...et Mme B...ont sollicité le changement du nom de leurs enfants mineurs A...et G...B...- - F...en " F... " ou subsidiairement en " F...-B... " ; que par décision du 22 mai 2012, confirmée le 3 septembre 2012, le garde des sceaux, ministre de la justice a refusé de faire droit à cette demande ; que M. F...et Mme B... relèvent appel du jugement du 13 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces décisions ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 du décret du 20 janvier 1994 " Le refus de changement de nom est motivé (...) " ;
3. Considérant qu'après avoir rappelé les dispositions de l'article 61 du code civil, le garde des sceaux ministre de la justice a, dans sa décision du 22 mai 2012, indiqué aux requérants que la seule circonstance que Mme B...utilise comme nom d'usage celui de son mari, alors que le mariage n'a aucune incidence juridique sur le nom de l'épouse, ne peut constituer un intérêt légitime au sens des dispositions de l'article 61 du code civil ; que le garde des sceaux ministre de la justice a ainsi suffisamment motivé sa décision ; que, par ailleurs, la décision du 3 septembre 2012 vise expressément la décision du 22 mai 2012 qu'elle confirme et dont elle a entendu s'approprier tant les motifs que le dispositif ; que les requérants ne sont dès lors pas fondés à soutenir que la décision du 3 septembre 2012 portant rejet de recours gracieux est insuffisamment motivée ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 61 du code civil : " Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom. La demande de changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré. Le changement de nom est autorisé par décret " ;
5. Considérant, d'une part, que des motifs d'ordre affectif peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, caractériser l'intérêt légitime requis par l'article 61 du code civil pour déroger aux principes de dévolution et de fixité du nom établis par la loi ;
6. Considérant que M. F...et MmeB..., qui a choisi depuis son mariage célébré le 26 juin 2010 de porter à titre d'usage le nom de " F... ", font valoir les difficultés affectives ainsi que celles de la vie courante liées à la différence de patronyme entre eux et leurs enfants ; que, cependant, alors qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à Mme B...de ne porter que le nom de son mari à titre de nom d'usage et que les requérants ne produisent aucun élément au soutien de leur allégation selon laquelle la disparité de noms nuirait à l'unité de leur famille, la différence de noms entre eux et leurs enfants ne saurait constituer l'intérêt légitime requis pour déroger aux principes de dévolution et de fixité du nom établis par la loi, sauf circonstances exceptionnelles ; que, par ailleurs, la circonstance, au demeurant non établie, selon laquelle ils auraient été induits en erreur par l'officier d'état civil en 2006 lors de la reconnaissance de leur premier enfant par le père ne constitue pas davantage un intérêt légitime au sens des dispositions de l'article 61 du code civil ; que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le garde des sceaux, ministre de la justice a commis une erreur d'appréciation en refusant le changement de nom demandé ;
7. Considérant, d'autre part, qu'il est constant que les requérants n'ont pas invoqué devant l'administration à l'appui de leur demande tendant au changement de nom de leurs enfants mineurs le risque d'extinction du nom " F... " ; que, par suite, ils ne peuvent utilement soutenir que l'administration aurait fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 61 du code civil relatives au risque d'extinction d'un patronyme en rejetant leur demande ; qu'au surplus, ils ne produisent aucun élément au soutien de l'allégation suivant laquelle le nom " F... " serait susceptible de disparaître, alors qu'en tout état de cause il est susceptible, en application de l'article 311-21 du code civil, d'être transmis par leurs enfants qui le portent ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. F... et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. F... et Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... F..., à Mme E... B...et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 23 février 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Diémert, président assesseur,
- Mme Amat, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 17 mars 2016.
Le rapporteur,
N. AMATLa présidente,
S. PELLISSIER Le greffier,
F. TROUYETLa République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA03037