Procédure devant la Cour :
Par une requête, des pièces complémentaires et un mémoire en réplique enregistrés les 29 juin 2019, 6 septembre 2019 et 24 septembre 2019, M. D..., représenté par Me F..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1903823/2-1 du 11 juin 2019 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 29 janvier 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté a été signé par une autorité incompétente ;
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- le préfet ne pouvait instruire sa demande de titre de séjour comme étant une première demande ;
- l'arrêté méconnaît l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne renouvelant pas son titre de séjour au regard des effets de la décision sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 octobre 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc, signé le 9 octobre 1987, en matière de séjour et d'emploi ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant marocain né en septembre 1972 et entré en France en septembre 2003 selon ses déclarations, a obtenu le 29 mars 2016 la régularisation de sa situation et la délivrance d'un titre de séjour " salarié " d'un an par le préfet du Val d'Oise pour exercer des fonctions de " vendeur manutentionnaire " auprès de la SARL du Faubourg à Paris. Il fait appel du jugement du 11 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 29 janvier 2019 lui refusant le renouvellement de ce titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.
2. En premier lieu, l'arrêté attaqué du 29 janvier 2019 a été signé par Mme I... H..., cheffe du 9ème bureau de la direction de la police nationale de la préfecture de police, qui bénéficiait à cette fin, en cas d'absence ou d'empêchement de MM. C..., E... et G..., d'une délégation de signature du préfet de police en vertu d'un arrêté n° 2018-00802 du 20 décembre 2018, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de Paris du 21 décembre 2018. D'une part, l'absence de mention dans l'arrêté contesté de l'absence ou de l'empêchement des supérieurs hiérarchiques de son signataire est sans incidence sur sa régularité. D'autre part, il revient à M. D..., contrairement à ce qu'il soutient, d'apporter des éléments démontrant que MM. C..., E... et G... n'auraient pas été absents ou empêchés. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté comme manquant en fait.
3. En deuxième lieu, l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". L'article L. 211-5 du même code dispose : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
4. L'arrêté contesté vise l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 et l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui constituent le fondement en droit de la demande de titre de séjour, et mentionne les motifs de fait, notamment l'absence de contrat de travail visé par les autorités compétentes et de visa de long séjour, ainsi que le non-respect de la précédente autorisation de travail, qui justifient le refus d'octroi du titre de séjour. Le refus de séjour est ainsi suffisamment motivé au regard des dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration. Dès lors que l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile énonce que l'obligation de quitter le territoire français qui accompagne un refus de titre de séjour " n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour ", M. D... ne peut utilement soutenir que l'arrêté n'est pas suffisamment motivé au motif qu'il se borne à viser l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans préciser que l'obligation de quitter le territoire français intervient sur le fondement du 3° du I de ct article. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
5. En troisième lieu, l'article 3 de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 stipule : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. / Après trois ans de séjour continu en France, les ressortissants marocains visés à l'alinéa précédent pourront obtenir un titre de séjour de dix ans. Il est statué sur leur demande en tenant compte des conditions d'exercice de leurs activités professionnelles et de leurs moyens d'existence (...) ". L'accord franco-marocain renvoie, sur tous les points qu'il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code du travail pour autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'accord et nécessaires à sa mise en oeuvre. Il en va notamment ainsi, pour le titre de séjour " salarié " mentionné à l'article 3 cité ci-dessus qui est délivré sur présentation d'un contrat de travail " visé par les autorités compétentes ", des dispositions des articles R. 5221-17 et suivants du code du travail, qui précisent les modalités selon lesquelles et les éléments d'appréciation en vertu desquels le préfet se prononce, au vu notamment du contrat de travail, pour accorder ou refuser une autorisation de travail. De même, lui sont applicables l'article R. 311-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoit que la carte de séjour temporaire est retirée à l'étranger qui cesse de remplir les conditions pour l'obtenir et l'article R. 313-36 du même code qui dispose : " Lorsque l'étranger sollicite le renouvellement de la carte de séjour temporaire délivrée au titre des dispositions du 1° de l'article L. 313-10, il doit présenter, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 313-4-1, les pièces suivantes : 1° En cas de poursuite de son contrat à durée indéterminée, l'autorisation de travail accordée à son employeur correspondant à l'emploi occupé ; 2° Dans les autres cas, un formulaire de demande d'autorisation de travail, pour la conclusion d'un contrat à durée indéterminée avec un employeur établi en France correspondant à l'emploi sollicité. Ce formulaire est conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé du travail ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a reçu une autorisation de travail pour occuper un emploi en tant que " vendeur manutentionnaire " auprès de la SARL du Faubourg, conformément à une demande en date du 29 décembre 2015, mais n'a pas, après la délivrance de sa carte de séjour salarié en mars 2016, travaillé pour cette société. Le préfet n'a donc pas commis d'erreur de droit en considérant qu'il avait cessé de remplir, en cours de validité de son titre de séjour, les conditions pour l'obtenir et que, n'ayant ni respecté les termes de son autorisation, ni prévenu l'administration de son changement d'employeur, il ne pouvait se prévaloir d'un droit au renouvellement de son titre de séjour. Il a donc pu fonder le refus de délivrance d'un nouveau titre de séjour sur la circonstance que M. D... ne justifiait ni d'un visa de long séjour ni d'un contrat de travail signé.
7. En tout état de cause, si M. D... fait valoir qu'il était titulaire d'un nouveau contrat de travail à durée indéterminée signé le 2 mai 2018 avec la société Amanouz, il n'établit pas que cet emploi aurait donné lieu à la présentation d'une demande d'autorisation de travail dans les conditions prévues à l'article R. 313-36 rappelé ci-dessus. Dans ces conditions, le préfet a pu sans erreur de droit ni d'appréciation estimer qu'il ne replissait pas les conditions prévues pour le renouvellement de son titre de séjour portant la mention salarié. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de l'accord franco-marocain doit être écarté.
8. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. D..., s'il invoque une longue durée de présence en France et son insertion professionnelle, y est célibataire et sans charges familiales. En revanche, il n'établit pas être dépourvu de lien privé ou familial au Maroc, pays dont il est ressortissant et où il a vécu jusqu'à l'âge de 31 ans. Dès lors, il n'a pas été porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi. Il ne ressort pas plus des pièces du dossier que l'arrêté contesté comporte des conséquences d'une extrême gravité. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit également être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête d'appel doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et, l'Etat n'étant pas partie perdante, celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. K... D... et au ministre de l'intérieur
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 24 octobre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme J..., présidente de chambre,
- M. B..., premier conseiller,
- M. Platillero, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 novembre 2019.
Le rapporteur,
A. B...La présidente,
S. J...La greffière,
M. A...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA02081