Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 4 octobre 2017, M. A..., représenté par Me Calvo Pardo, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1616964/1-2 du 25 avril 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté du 12 septembre 2016 est insuffisamment motivé ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, le préfet de police était tenu d'examiner sa demande de titre de séjour fondée sur l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se prononçant sur la possibilité de lui délivrer une carte de séjour portant la mention salarié ;
- le préfet de police aurait dû saisir la commission du titre de séjour ;
- l'arrêté attaqué méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 12 décembre 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 7 février 2018, la clôture d'instruction a été fixée au
21 février 2018.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 septembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Jimenez,
- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.
1. Considérant que M.A..., né le 23 juin 1979 à Gharbeya, de nationalité égyptienne, entré en France le 1er juin 2004 selon ses déclarations, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 12 septembre 2016, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ; que M. A...relève appel du jugement n° 1616964/1-2 du 25 avril 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 12 septembre 2016 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans " ; qu'aux termes de l'article
L. 312-1 du même code : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...produit pour chacune des années de nombreux documents de nature à démontrer qu'il réside en France depuis au moins le mois de janvier 2006 ; que s'agissant notamment des années 2011 à 2013 et du premier semestre 2014, contestés en défense par le préfet de police, ces pièces sont constituées, outre des factures de gaz et d'électricité à son nom, de relevés bancaires faisant apparaître des retraits, ainsi que de courriers de l'assurance maladie et de l'agence solidarité transports ; que pour le premier semestre 2014, M. A...produit en outre une ordonnance du 20 mai ainsi qu'une attestation du 23 février 2014 de chargement de passe navigo sur la période du 1er janvier au 23 février 2014 ; que les pièces ainsi produites forment un ensemble cohérent et sont suffisamment nombreuses et variées pour démontrer la résidence habituelle en France de
M. A...depuis plus de dix ans à la date de la décision litigieuse ; qu'ainsi l'intéressé est fondé à soutenir que le préfet de police ne pouvait rejeter sa demande de titre de séjour sans saisir au préalable la commission du titre de séjour mentionnée à l'article L. 312-1 du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré du vice de procédure résultant du défaut de la saisine de cette commission, qui constitue une garantie, doit donc être accueilli ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
5. Considérant que le présent arrêt n'implique pas qu'un titre de séjour soit délivré à
M. A...mais seulement que sa demande d'admission exceptionnelle au séjour soit réexaminée, après avoir été préalablement soumise, pour avis, à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 de code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il y a lieu de prescrire ce réexamen dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
6. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Calvo Pardo, avocat de
M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Calvo Pardo de la somme de 1 500 euros ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1616964/1-2 du 25 avril 2017 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 12 septembre du préfet de police sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de soumettre la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M. A...à la commission du titre de séjour et de procéder au réexamen de cette demande dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Me Calvo Pardo sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 11 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Appèche, président assesseur,
- Mme Jimenez, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 mai 2018.
Le rapporteur,
J. JIMENEZLe président,
I. BROTONS
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 17PA03176