Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés respectivement le 18 décembre 2015, et les 6 juin et 3 août 2016, la société Gestion Hôtel Arcueil, représentée par Me B...A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1410875/3 du 15 octobre 2015 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de prononcer la réduction sollicitée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que l'administration comme le tribunal administratif ont écarté la méthode d'évaluation par comparaison alors que cette méthode doit être appliquée en priorité et qu'elle pouvait être mise en oeuvre dans la mesure où il existe des locaux-types, tels ceux qu'elle propose, susceptibles de servir de termes de comparaison;
- la méthode d'appréciation directe n'est qu'infiniment subsidiaire et ne se justifie pas en l'espèce.
Par trois mémoires en défense, enregistrés respectivement les 13 juin, 27 juillet et
27 septembre 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance en date du 28 septembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée
au 13 octobre 2016, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Appèche,
- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.
1. Considérant que la société Gestion Hôtel Arcueil exploite sous l'enseigne " Campanile " un hôtel classé en catégorie deux étoiles, situé avenue Aristide Briand à Arcueil (Val-de-Marne), construit en 1990, d'une surface pondérée de 1 954 m2 pour lequel elle a été assujettie à la cotisation foncière des entreprises au titre de l'année 2013 à hauteur d'un montant de 40 754 euros ; qu'après avoir demandé en vain au Tribunal administratif de Melun de réduire cette cotisation, elle relève appel du jugement de ce tribunal rejetant sa demande ;
2. Considérant qu'en vertu du troisième alinéa de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à compter de l'imposition 2010, la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée, pour l'établissement de la cotisation foncière des entreprises, suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe ; qu'aux termes de l'article 1498 du même code : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date,/ Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; / 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe. " ; qu'en application des dispositions de l'article 324 AK de l'annexe III au code général des impôts, qui n'ont pas fait l'objet d'actualisation, la date de référence de la révision visée au b du 2° précité de l'article 1498 s'entend du 1er janvier 1970 ; qu'aux termes de l'article 324 AA de la même annexe au code général des impôts : " La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un titre autre que celui de locataire, vacants ou concédés à titre gratuit est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. - Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le local type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance " ; qu'aux termes de l'article 324 Z de ladite annexe : " I. L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types. / II. Les types dont il s'agit doivent correspondre aux catégories dans lesquelles peuvent être rangés les biens de la commune visés aux articles 324 Y à 324 AC, au regard de l'affectation de la situation de la nature de la construction de son importance de son état d'entretien et de son aménagement. Ils sont inscrits au procès-verbal des opérations de la révision. " ;
3. Considérant que, pour déterminer l'assiette de la cotisation foncière des entreprises assignée à la société Gestion Hôtel Arcueil en raison de l'hôtel susmentionné, l'administration a initialement évalué la valeur locative de l'hôtel par comparaison avec le local-type n° 43 du procès-verbal complémentaire des opérations de la révision des évaluations foncières des propriétés bâties de la commune de Villejuif, sur la base d'un ajustement à 18,99 euros du tarif unitaire de référence de 22,87 euros/m² ; que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a estimé que ce local-type ne pouvait régulièrement servir de terme de comparaison, que faute d'autres termes de comparaison susceptibles d'être valablement utilisés, il n'était pas possible de déterminer la valeur locative de l'immeuble par voie de comparaison, et que cette valeur ne pouvait être définie qu'en suivant la méthode subsidiaire de l'appréciation directe ; qu'après avoir constaté que cette nouvelle méthode conduirait à une valeur locative supérieure à celle initialement retenue par l'administration pour l'établissement de l'imposition litigieuse, le tribunal a rejeté la demande de la société Gestion Hôtel Arcueil tendant à la réduction de l'imposition litigieuse ;
4. Considérant, que la société Gestion Hôtel Arcueil conteste cet abandon, par les premiers juges, de la méthode d'évaluation par comparaison, au motif qu'il était, selon elle, possible de procéder à une évaluation par comparaison et se prévaut de l'existence de plusieurs autres locaux-type alternatifs, susceptibles, selon elle, de servir de termes de référence ;
5. Considérant, d'une part, que c'est à bon droit que, pour les motifs exposés dans son jugement et qu'il y a lieu pour la Cour d'adopter, le tribunal administratif a estimé que le local-type n° 43 du procès-verbal complémentaire des opérations de la révision des évaluations foncières des propriétés bâties de la commune de Villejuif susmentionné devait être abandonné ; que s'agissant du local type n° 111 du quartier de la porte Dauphine dans le XVIème arrondissement de Paris, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il correspond à un immeuble de conception classique et ancienne édifié en 1880 et qui ne peut pertinemment être comparé au 1er janvier de l'année d'imposition, et alors même qu'il a fait l'objet depuis 1970 d'aménagements destinés à améliorer le niveau de ses équipements et prestations, avec l'hôtel moderne de chaîne édifié en 1990 exploité par la société requérante ; qu'au surplus, la valeur locative à retenir pour ce local-type ne saurait être celle qui lui a été assignée au procès-verbal dressé en 1972, dès lors que les données applicables à ce local-type n° 111 ont été modifiées par un procès-verbal rectificatif et complémentaire des opérations de révision foncière du 63ème quartier " La Porte Dauphine " dans le XVIème arrondissement de Paris établi en 1973 ; que les nouvelles données assignées à ce local-type ne pouvant toutefois être tenues comme se rattachant à un bail en cours à la date de référence, ce local-type ne peut valablement servir de terme de comparaison ;
6. Considérant, d'autre part, que le local-type n°1 du procès-verbal ME de la commune de Cergy, proposé par la société requérante, et correspondant à un hôtel deux étoiles construit en 1844 ne peut, outre le fait qu'il est trop ancien, être retenu, faute d'information fiable concernant la manière dont il a été évalué ; que le local-type n° 6 figurant au procès-verbal ME de la commune d'Enghien-les-Bains ne peut davantage être retenu, dès lors qu'occupé et exploité par la société propriétaire, il n'a pu être évalué au vu d'un bail consenti à des conditions normales et qu'il résulte de l'instruction qu'il n'a pas été évalué selon les autres modalités requises par les dispositions susénoncées ; que le local-type n° 48 de la commune de Chelles, d'une superficie très inférieure à celle du local à évaluer, est constitué d'un immeuble construit en 1952, correspondant à un hôtel de type traditionnel n'ayant jamais fait l'objet de classement et qui, eu égard à ses caractéristiques, ne peut être valablement comparé avec l'hôtel en cause dans le présent litige ; que, de surcroît, ce bien a été évalué au vu d'un bail conclu postérieurement au 1er janvier de l'année 1970 ;
7. Considérant, par ailleurs, que dans son dernier mémoire, la société requérante propose cinq autres locaux-types ; que le premier, à savoir le local type n° 114 du procès-verbal des opérations de révision de la commune de Corbeille Essonne, correspond à un immeuble construit en 1987 et il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait été évalué par comparaison à un autre immeuble lui-même existant et loué au 1er janvier 1970 ; que le local-type n° 116 du procès-verbal des opérations de révision de la commune d'Aubervilliers, également proposé, correspond à un café-hôtel meublé construit en 1930, n'ayant jamais fait l'objet d'aucun classement, et qui ne peut être pertinemment comparé avec un hôtel de chaîne de conception moderne ; que, de surcroit, alors que la valeur de cet immeuble, dont le bail a été renouvelé en 1967, a été estimée par comparaison, le terme de comparaison alors retenu ne peut, faute d'être identifié, être tenu comme satisfaisant les conditions posées par les dispositions susénoncées ; que le local-type n° 130 du procès verbal des opérations de révision de la commune d'Athis-Mons, qui était occupé par son propriétaire, n'a pu être évalué régulièrement par référence au bail ; que le local type n° 23 du procès-verbal des opérations de révision de la commune de Gentilly a été évalué par comparaison avec un local-type ne constituant plus une référence valable puisqu'il a été rayé du procès-verbal suite à sa restructuration en habitation en 1979 ; que le local-type n° 31 du procès-verbal des opérations de révision de la commune d'Alfortville ne peut davantage être retenu dès lors qu'il a été évalué par comparaison avec le local-type n° 10 de la commune de Chennevières, lequel était loué par l'usufruitière à son fils nu-propriétaire dans des conditions anormales ; qu'au surplus, ces locaux-types ont une superficie très inférieure à celle de l'immeuble à évaluer ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et en l'absence d'autre local-type satisfaisant aux exigences posées par les textes mentionnés ci-dessus pour permettre l'évaluation de l'immeuble en cause appartenant à la société requérante, selon la méthode comparative prévue au 2° de l'article 1498 du code général des impôts, que la détermination de sa valeur locative ne pouvait régulièrement être opérée par la voie de cette méthode comparative et devait être déterminée selon la méthode subsidiaire de l'appréciation directe prévue au 3° de cet article ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que le recours à la méthode d'évaluation directe proposée par l'administration, dont les modalités de calcul ne sont pas contestées par la société requérante, conduit à une valeur locative, à laquelle il conviendrait de se référer, supérieure à celle initialement retenue pour l'établissement de l'imposition litigieuse ; que, par suite, la société Gestion Hôtel Arcueil n'est pas fondée à soutenir que la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2013 serait exagérée et à en demander la réduction ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Gestion Hôtel Arcueil n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que les conclusions de la requête tendant à l'annulation du jugement et à la réduction des impositions litigieuses doivent, par suite, être rejetées ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, de celles présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Gestion Hôtel Arcueil est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Gestion Hôtel Arcueil et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 30 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Appèche, président assesseur,
- Mme Jimenez, premier conseiller
Lu en audience publique, le 14 décembre 2016
Le rapporteur,
S. APPECHELe président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA04630