Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 29 septembre 2017 et 14 septembre 2018, la société Hôtel Paris Voltaire Bercy, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1508354/3 du 31 juillet 2017 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de prononcer une réduction de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie et de la taxe spéciale d'équipement auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2014 pour un montant total de 91 527 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- peuvent être retenus comme points de comparaison les locaux-types n° 210 du XIVème arrondissement de Paris, n° 6 du procès-verbal de la Commune d'Enghien, n° 48 du
procès-verbal de la commune de Chelles, n° 32 du procès-verbal de la commune de Champigny-sur-Marne et n° 6 de Sète ;
- la méthode d'appréciation directe n'est qu'infiniment subsidiaire et ne se justifie pas en l'espèce ;
- les transactions retenues, réalisées en 1981 et 1984, sont trop éloignées de la date de référence du 1er janvier 1970.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 juin 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.
Par ordonnance du 27 août 2018, la clôture d'instruction a été fixée au
17 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts ;
- le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.
1. Considérant que la société Hôtel Paris Voltaire exploite un hôtel au Kremlin-Bicêtre, sous l'enseigne " Novotel Paris Porte d'Italie " ; que, pour déterminer l'assiette de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie et de la taxe spéciale d'équipement auxquelles ladite société a été assujettie au titre de l'année 2014, l'administration, après avoir admis que la valeur locative de l'immeuble en cause avait été initialement déterminée à partir d'un local-type irrégulier, a estimé qu'elle n'était pas en mesure de proposer un autre terme de comparaison pertinent et que l'évaluation par appréciation directe, dès lors seule possible, aboutissait à une valeur locative bien supérieure à celle ayant servi à asseoir les impositions litigieuses ; que la société Hôtel Paris Voltaire relève appel du jugement n° 1508354/3 du 31 juillet 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en réduction des impositions susmentionnées ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; / 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe " ;
Sur la méthode d'évaluation par comparaison :
3. Considérant que la société requérante soutient qu'il était possible de procéder à une évaluation par comparaison, et se prévaut de l'existence de plusieurs autres locaux-type alternatifs, susceptibles, selon elle, de servir de termes de référence ;
4. Considérant que la société Hôtel Paris Voltaire propose que la valeur locative de l'hôtel trois étoiles qu'elle exploite au Kremlin-Bicêtre, sous l'enseigne " Novotel Paris Porte d'Italie ", construit en 2004 et d'une superficie de 5 489 m2, soit déterminée par comparaison avec les locaux-type n° 210 du procès-verbal du 55ème quartier de Paris, n° 6 du procès-verbal de la commune d'Enghien-les-Bains, n° 48 de celui de la commune de Chelles, n° 32 de celui de la commune de Champigny-sur-Marne et n° 6 du procès-verbal de la commune de Sète ; que le local-type n° 210 du procès-verbal du 55ème quartier de Paris correspond à un hôtel de taille réduite, installé dans un bâtiment ancien, construit en 1926, qui ne peut, à supposer même qu'il aurait fait l'objet de travaux d'aménagement interne, être comparé à l'hôtel de chaîne, de conception moderne, qu'exploite la société requérante ; qu'ainsi, ce local ne peut être retenu ; que le procès-verbal initial des opérations de révision des maisons exceptionnelles de la commune d'Enghien-les-Bains ne fait pas état de ce que le local-type n° 6 aurait été loué
au 1er janvier 1970 ; que les pièces du dossier ne permettent pas de constater qu'il aurait été lui-même évalué dans les conditions prévues par le 2° de l'article 1498 du code général des impôts ; que, de plus, et en tout état de cause, cet immeuble correspond à un hôtel construit en 1950, lequel ne saurait raisonnablement être comparé à un hôtel de chaîne de conception moderne exploité au Kremlin- Bicêtre ; que, dès lors, ce terme de comparaison ne peut être retenu pour procéder à l'évaluation de l'ensemble hôtelier concerné ; que le local-type n° 48 du procès-verbal des évaluations foncières de la commune de Chelles correspond à un hôtel construit en 1910, d'une superficie de 343 m2, qui ne peut, dès lors, être comparé à un hôtel de chaîne de conception moderne ; que, par suite, ce local ne peut être utilement retenu pour la mise en oeuvre de la méthode d'évaluation par comparaison ; que le local-type n° 32 du procès-verbal des évaluations foncières de la commune de Champigny-sur-Marne, d'une superficie de 419 m2, correspond à un hôtel d'une capacité réduite et qui ne peut valablement être comparé à l'établissement à évaluer, en sa qualité d'hôtel de chaîne de conception moderne ; que les photographies produites au dossier par la société requérante ne sont pas de nature à remettre en cause les considérations qui précèdent ; que, par suite, il ne peut pas davantage être retenu comme terme de référence ; que la commune du Kremlin-Bicêtre située en Île-de-France, d'une part, et la commune de Sète, située en province, d'autre part, diffèrent, notamment par la densité de leur population et de leurs réseaux de transport respectifs ; qu'à la différence du Kremlin-Bicêtre, la commune de Sète ne bénéficie pas de l'attractivité touristique de la capitale ou d'une grande ville comparable ; qu'ainsi, elle ne peut être regardée comme présentant, d'un point de vue économique, une situation analogue à celle du Kremlin-Bicêtre, à laquelle elle ne saurait être utilement comparée ; que, de plus, le local-type n° 6 de la commune de Sète correspond à un hôtel de charme qui ne peut être utilement comparé à des hôtels de chaîne de conception moderne ;
5. Considérant, enfin, que l'administration a produit la liste de plus de cent locaux-type situés en Ile-de-France, écartés par le juge de l'impôt, et fait valoir qu'elle n'est pas à même de proposer un terme de comparaison qui soit approprié à l'évaluation de l'hôtel exploité par la société requérante ; que si cette dernière reproche au ministre de ne pas avoir fait de recherche sur l'ensemble du territoire français, elle ne conteste pas sérieusement les affirmations du ministre selon lesquelles il n'existe pas d'agglomération comparable, d'un point de vue économique, à l'agglomération parisienne ; qu'en l'absence de termes de comparaison appropriés, l'administration était, par suite, fondée à évaluer la valeur locative de l'hôtel en cause par la voie de l'appréciation directe prévue par le 3° de l'article 1498 du code général des impôts ;
Sur la méthode d'évaluation par appréciation directe :
6. Considérant que la société requérante fait valoir que les transactions retenues pour procéder à cette évaluation directe, réalisées en 1981 et 1984, sont trop éloignées de la date de référence du 1er janvier 1970 pour permettre une appréciation conforme aux dispositions légales et réglementaires ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter ce moyen ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Hôtel Paris Voltaire n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; qu'en conséquence, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante en la présente instance, la somme que demande sur ce fondement la société requérante ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SNC Hôtel Paris Voltaire rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC Hôtel Paris Voltaire et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- M. Magnard, premier conseiller,
- Mme Jimenez, premier conseiller.
Lu en audience publique le 19 décembre 2018.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLe président,
I. BROTONS
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA03149