Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 19 avril 2021, M. C..., représenté par Me Jonathan Levy, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 mars 2021 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet contestée devant ce tribunal ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision implicite de rejet méconnaît les dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dès lors que les motifs de cette décision ne lui ont pas été communiqués malgré sa demande ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L.313-11.11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile eu égard à l'état de santé de son enfant ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant égyptien né le 1er mars 1990 a, par un courrier daté du 24 décembre 2018, reçu le 27 décembre 2018, sollicité la délivrance d'un titre de séjour auprès du préfet du Val-de-Marne. Il relève appel du jugement n°1905729/8 du 9 mars 2021 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet à la suite de ce courrier.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger, âgé de plus de dix-huit ans ou qui sollicite un titre de séjour en application de l'article L. 311-3, est tenu de se présenter, à Paris, à la préfecture de police et, dans les autres départements, à la préfecture ou à la sous-préfecture, pour y souscrire une demande de titre de séjour du type correspondant à la catégorie à laquelle il appartient. / Toutefois, le préfet peut prescrire que les demandes de titre de séjour soient déposées au commissariat de police ou, à défaut de commissariat, à la mairie de la résidence du requérant./ Le préfet peut également prescrire : / 1° Que les demandes de titre de séjour appartenant aux catégories qu'il détermine soient adressées par voie postale ; / 2° Que les demandes de cartes de séjour prévues aux articles L. 313-7 et L. 313-27 soient déposées auprès des établissements d'enseignement ayant souscrit à cet effet une convention avec l'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 311-12 du même code : " Le silence gardé par l'administration sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet ". Aux termes de l'article R. 311-12-1 de ce code : " La décision implicite mentionnée à l'article R. 311-12 naît au terme d'un délai de quatre mois ".
3. Il résulte de ces dispositions que, pour introduire valablement une demande de carte de séjour, il est nécessaire, sauf si l'une des exceptions est applicable, que les intéressés se présentent physiquement à la préfecture. A défaut de disposition expresse en sens contraire, une demande de titre de séjour présentée par un ressortissant étranger en méconnaissance de la règle de présentation personnelle du demandeur en préfecture fait naître, en cas de silence gardé par l'administration pendant plus de quatre mois, une décision implicite de rejet susceptible d'un recours pour excès de pouvoir.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 232-4 de ce code : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier daté du 17 juin 2019, reçu en préfecture le 19 juin 2019, M. C... a demandé la communication des motifs de la décision implicite par laquelle le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de délivrance de titre de séjour, décision née le 27 avril 2019 soit à l'issue d'un délai de quatre mois suivant la réception de sa demande. L'administration n'a pas communiqué, dans le délai d'un mois prévu à l'article L. 232-4 précité, les motifs de la décision implicite de rejet. Par suite, la décision implicite attaquée est entachée d'un défaut de motivation.
6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Le jugement n° 1905729/8 du 9 mars 2021 du Tribunal administratif de Melun et la décision implicite de rejet du préfet du Val-de-Marne doivent, par suite, être annulés.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. L'annulation de la décision implicite de rejet du préfet du Val-de-Marne implique seulement qu'il soit enjoint audit préfet de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, au réexamen de la demande de M. C.... Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros au titre des frais supportés par M. C... dans la présente instance demande.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1905729/8 du 9 mars 2021 du Tribunal administratif de Melun et la décision implicite de rejet opposée par le préfet du Val-de-Marne à la demande présentée par
M. C... le 27 décembre 2018 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de la demande de M. C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera à M. C... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 8 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
- Mme A..., président de chambre,
- M. Platillero, président assesseur,
- M. Magnard, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 septembre 2021.
Le président-rapporteur,
I. A...L'assesseur le plus ancien,
F. PLATILLERO
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA02038 2