Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 20 janvier 2021 et 24 janvier 2022, Mme A..., représentée par Me Aurélien Sarraco, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 novembre 2020 du Tribunal administratif de Montreuil;
2°) de prononcer la décharge de responsabilité sollicitée devant le tribunal ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Elle soutient que :
- il existe une disproportion marquée entre la dette fiscale au paiement de laquelle elle est considérée comme solidaire et sa situation de fortune ; elle ne perçoit en effet qu'une faible pension de retraite et ne détient aucun bien immobilier, les actifs immobiliers du couple ayant été saisis en totalité dans le cadre des mesures conservatoires engagées en vue d'être affectés au paiement des créanciers de son époux ; par ailleurs, la pension alimentaire due par son mari ne lui a jamais été versée et fait l'objet d'une procédure de recouvrement forcé, et la totalité des loyers afférents aux biens détenus en commun est versée à son époux ;
- le rejet de sa demande de décharge de responsabilité solidaire est dès lors entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- au demeurant, elle avait déposé une déclaration de revenus personnelle pour l'année 2017 qui n'a jamais été prise en compte, ce qui justifierait une décharge gracieuse.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.
Par une ordonnance du 11 janvier 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 janvier 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Brotons,
- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., tenue solidairement au paiement des impositions établies au nom de son foyer fiscal au titre de l'année 2017 en vertu de l'article 1691 bis du code général des impôts, a sollicité, le 27 février 2019, une décharge de cette responsabilité solidaire, après avoir engagé une procédure de divorce qui a donné lieu à une ordonnance de non-conciliation prononcée le 16 novembre 2018 par le juge aux affaires familiales. Sa demande ayant été rejetée par décision du 5 avril 2019, elle a saisi le Tribunal administratif de Montreuil. Elle relève appel du jugement
n° 1905898/7 du 16 novembre 2020 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article 1691 bis du code général des impôts : " I. Les époux et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont tenus solidairement au paiement : / 1° De l'impôt sur le revenu lorsqu'ils font l'objet d'une imposition commune ; / 2° De la taxe d'habitation lorsqu'ils vivent sous le même toit. / II. - 1. Les personnes divorcées ou séparées peuvent demander à être déchargées des obligations de paiement prévues au I ainsi qu'à l'article 1723 ter-00 B lorsque, à la date de la demande : / a) Le jugement de divorce ou de séparation de corps a été prononcé (...) ; / 2. La décharge de l'obligation de paiement est accordée en cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur. ". En l'absence de dispositions réglementaires précisant l'application du critère fixé au 2 du II de cet article, il appartient au juge, saisi d'un recours concernant une demande de décharge de l'obligation solidaire de paiement de l'impôt sur le revenu ou de la taxe d'habitation, d'apprécier souverainement l'existence, à la date de la demande, d'une disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale des conjoints, anciens conjoints ou partenaires, et la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur.
3. Mme A... soutient que ses revenus ne sont constitués que de pensions de retraite d'un montant annuel de 10 780 euros, qu'elle ne perçoit pas la pension alimentaire mise à la charge de son époux ni les loyers afférents aux biens détenus en commun, et qu'elle ne détient aucun bien immobilier propre, et fait valoir que les biens de la communauté, qui seraient selon elle considérés comme constitutifs de recel dans le cadre de la procédure engagée à l'encontre de son mari, ont fait l'objet de saisies-conservatoires réalisées à la demande des créanciers de celui-ci. Toutefois, il résulte de l'instruction que le patrimoine commun du couple était évalué, au 18 septembre 2018, date de l'audience qui s'est tenue devant le juge aux affaires familiales, soit quelques mois avant la date de la demande présentée par Mme A..., à plus de 10 millions d'euros, et était constitué en grande partie, outre des liquidités sur comptes bancaires de plus de 2,5 millions d'euros, de biens immobiliers acquis bien avant l'intervention des faits pour lesquels M. C... est poursuivi, Mme A... ne contestant pas sérieusement qu'en vertu des dispositions des alinéas 2 et 3 de l'article 815-17 du code civil invoqué par l'administration : " Les créanciers personnels d'un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles ou immeubles. / Ils ont toutefois la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur ou d'intervenir dans le partage provoqué par lui (...) ". Il suit de là qu'à la date de sa demande, Mme A..., qui n'était pas dessaisie de ses biens, ne justifiait pas d'une disproportion marquée entre la dette fiscale du couple, qui s'élève à 113 665,50 euros, et sa situation financière et patrimoniale.
4. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Sa requête d'appel ne peut, en conséquence, qu'être rejetée, ensemble les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice, l'Etat n'ayant pas la qualité de partie perdante dans la présente instance.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 9 mars 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président,
- M. Platillero, président assesseur,
- M. Magnard, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2022.
Le président-rapporteur,
I. BROTONSL'assesseur le plus ancien,
F. PLATILLERO
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
7
2
N° 21PA00346