Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 25 octobre 2017, M. F..., représenté par Me C...D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1700635/7 du 5 octobre 2017 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision préfectorale litigieuse ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne d'accorder à son épouse le bénéfice du regroupement familial dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les premiers juges ont omis de répondre à un moyen invoqué devant eux ;
- la décision préfectorale litigieuse est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet a méconnu les dispositions des articles L. 411-1, L. 411-5, L. 421-1 et R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en tant que ses ressources sont suffisantes ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que l'intérêt de son enfant justifie un regroupement familial partiel ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- il n'a pas porté atteinte " aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France ".
M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 28 mars 2018.
Cette affaire a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, ensemble le décret du 3 mai 1974 portant publication de la convention ;
- la convention internationale signée à New York le 26 janvier 1990, relative aux droits de l'enfant, publiée par décret du 8 octobre 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Appèche ;
- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public ;
- et les observations de MeE..., substituant Me D...pour M. F....
1. Considérant que M.B... F..., après avoir en vain demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du préfet du Val-de-Marne du 2 janvier 2017 lui refusant le regroupement familial partiel sollicité au profit de son épouse et de son fils cadet relève régulièrement appel du jugement n° 1700635/7 du 5 octobre 2017 de ce tribunal rejetant sa
demande ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que le jugement attaqué est suffisamment motivé au regard des exigences posées par l'article L. 9 du code de justice administrative ; qu'en effet, si M. F... relève que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce que le préfet du Val-de-Marne ne justifiait pas avoir consulté le maire de la commune sur ses conditions de logement et ses ressources, cette circonstance n'est pas de nature à entacher la régularité dudit jugement dès lors que, les premiers juges ayant estimé que le préfet ne s'était pas fondé sur le non respect des conditions tenant aux caractéristiques du logement ou aux ressources du demandeur pour refuser l'autorisation sollicitée, ce moyen était inopérant ;
Sur la légalité du refus de regroupement familial partiel :
3. Considérant, en premier lieu, que M. F... reprend en appel le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté ; que ce moyen doit être écarté, par adoption des motifs, figurant aux points 3 et 4 du jugement attaqué, retenus à bon droit par le tribunal ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable en l'espèce : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : - 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. (...) ; - 2° Le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique ; - 3° Le demandeur ne se conforme pas aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil. " ; qu'aux termes de l'article L. 421-1 dudit code : " L'autorisation d'entrer en France dans le cadre de la procédure du regroupement familial est donnée par l'autorité administrative compétente après vérification des conditions de logement et de ressources par le maire de la commune de résidence de l'étranger ou le maire de la commune où il envisage de s'établir. Le maire, saisi par l'autorité administrative, peut émettre un avis sur la condition mentionnée au 3° de l'article L. 411-5. Cet avis est réputé rendu à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la communication du dossier par l'autorité administrative " ; qu'il ressort des termes de la décision contestée que, pour rejeter la demande de regroupement familial présentée par M. F..., le préfet du Val-de-Marne ne s'est pas fondé sur le non respect des conditions de logement et de ressources, ni sur la condition mentionnée au 3° de l'article L. 411-5 rappelé ci-dessus, mais sur le fait que M. F...ne justifiait d'aucun motif exceptionnel de nature à lui permettre d'obtenir, à titre dérogatoire, un regroupement familial partiel ; qu'en effet, la condition prévue au deuxième alinéa de l'article L. 411-4, tenant à l'intérêt des enfants, et à laquelle est subordonnée ce type de regroupement, n'était pas remplie en l'espèce, ainsi qu'il est indiqué au point 6 ; qu'il suit de là que, à la supposer même établie, la circonstance que le maire de la commune de résidence n'aurait pas été consulté n'a pu exercer aucune influence sur le sens de la décision prise et n'a privé M. F... d'aucune garantie ;
5. Considérant, en troisième lieu qu'aux termes de l'article L. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'enfant pouvant bénéficier du regroupement familial est celui qui répond à la définition donnée au dernier alinéa de l'article L. 314-11. / Le regroupement familial est sollicité pour l'ensemble des personnes désignées aux articles L. 411-1 à L. 411-3. Un regroupement partiel peut être autorisé pour des motifs tenant à l'intérêt des enfants. " ; qu'il résulte de ces dispositions que le regroupement familial doit concerner, en principe, l'ensemble de la famille du ressortissant étranger qui demande à en bénéficier et qu'un regroupement familial partiel ne peut être autorisé à titre dérogatoire que si l'intérêt des enfants le justifie ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. F...a sollicité un regroupement familial partiel au bénéfice de son épouse et de son fils cadet Zoa Mael Onana, né au Cameroun le 28 septembre 2015, à l'exclusion de son fils aîné, Larson, né le 29 novembre 2007 ; que le requérant soutient que l'état de santé de son fils cadet justifie que ce dernier le rejoigne en France avec sa mère et que son fils aîné peut rester seul au Cameroun où il est hébergé par sa grand-mère qui l'élève ; que toutefois, les documents versés au dossier ne permettent pas de tenir pour établi que le fils cadet de M. F... serait affecté de problèmes de santé sérieux, permanents ou récurrents qui ne pourraient être traités au Cameroun ; que par ailleurs, le fils aîné de M. F... n'était âgé que de neuf ans à la date de la décision contestée ; que dans ces conditions, M. F... ne justifie pas que le regroupement partiel qu'il a sollicité présentait, pour ses enfants, un intérêt tel que le préfet-du-Val de Marne ne pouvait légalement refuser de lui délivrer l'autorisation sollicitée ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, le moyen tiré de ce que le refus litigieux contreviendrait à l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 aux termes duquel : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ", doit être écarté comme non fondé ; que pour les mêmes motifs, cette décision ne peut être regardée comme portant au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par son auteur ;
8. Considérant que M. F...ne peut utilement soutenir qu'il n'a pas porté atteinte aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le préfet du Val-de-Marne ne lui a pas opposé le non respect de ces principes ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que les conclusions de sa requête tendant à l'annulation du jugement et de la décision préfectorale litigieux doivent par suite être rejetées ; qu'il en va de même, en conséquence, des conclusions à fin d'injonction et d'astreintes présentées sur le fondement des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative et de celles présentées sur le fondement l'article L. 761-1 dudit code et de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... F...et ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2018, où siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Appèche, président assesseur,
- Mme Jimenez, premier conseiller.
Lu en audience publique le 23 octobre 2018.
Le rapporteur,
S. APPECHELe président,
I. BROTONS
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA03319