Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 29 décembre 2020 et le 12 janvier 2021, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2010323/3-1 du 26 novembre 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 2 juillet 2020 et lui a enjoint de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " salarié " dans un délai de trois mois ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- l'arrêté ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les autres moyens de la demande de première instance ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée à M. C..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant indien, né 1er septembre 1994, est entré en France en décembre 2014 sous couvert d'un visa de court séjour. Le 28 février 2020, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 2 juillet 2020, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Le préfet de police relève appel du jugement du 26 novembre 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté.
Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :
2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ".
3. En présence d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifie d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si cette promesse d'embauche ou ce contrat de travail, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
4. M. C... se prévaut de la durée de sa présence en France et de son intégration professionnelle. Toutefois, s'il soutient résider en France de manière continue depuis l'année 2014, les pièces produites ne permettent pas d'établir sa présence sur le territoire au cours de l'année 2015. Par ailleurs, si l'intéressé justifie avoir occupé des emplois en qualité d'agent de propreté auprès de plusieurs sociétés entre 2016 et 2018 et est employé sous couvert d'un contrat à durée indéterminée comme agent d'entretien par la société Net Services depuis le 1er mars 2019, ces éléments ne constituent pas, eu égard notamment à la nature de son expérience et de ses qualifications professionnelles, un motif exceptionnel de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour. Dans ces conditions, le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que la situation de l'intéressé ne répondait pas à des considérations humanitaires ou à des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour au titre des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler l'arrêté du 2 juillet 2020.
6. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. C... devant le Tribunal administratif de Paris.
Sur les autres moyens soulevés par M. C... :
7. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. C... n'avait pas présenté de demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort en outre de l'arrêté contesté que le préfet de police n'a pas procédé d'office à un examen de son droit au séjour à ce titre. Par suite, M. C... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de ces dispositions à l'encontre de l'arrêté contesté.
9. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
10. M. C... soutient qu'il est présent en France depuis 2014 et qu'il entretient une relation avec une ressortissante thaïlandaise titulaire d'une carte de résident. Toutefois, ainsi qu'il a été dit précédemment, M. C... n'établit pas sa présence en France au cours de l'année 2015. Par ailleurs, l'attestation de vie commune qu'il produit, établie postérieurement à la date de l'arrêté attaqué, ne suffit pas à établir la réalité et la durée de la vie commune alléguée depuis 2015, alors que l'intéressé a déclaré lors de sa demande de titre de séjour en février 2020 être célibataire. Enfin, M. C... n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents et où il a lui-même vécu au moins jusqu'à l'âge de 20 ans. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
11. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 4 et 10, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle.
12. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 2 juillet 2020 et lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à M. C....
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2010323/3-1 du 26 novembre 2020 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 21 mai 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme B..., présidente de chambre,
- M. Mantz, premier conseiller,
- Mme A..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juin 2021.
La rapporteure,
A-S A...La présidente,
M. B...La greffière,
A. BENZERGUA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA04276 5