Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 juin 2018, M. B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1807097/8 du 7 mai 2018 par lequel le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés préfectoraux du 4 mai 2018 en tant que le préfet a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an ;
2°) d'annuler ces arrêtés dans cette mesure ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation s'agissant du motif tiré de ce qu'il ne présenterait pas des garanties de représentation suffisantes ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 août 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Hamon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A...B..., ressortissant marocain, né le 5 novembre 1984, est entré en France en 2011 selon ses déclarations. Il a déposé une demande de titre de séjour le 7 avril 2017, laquelle est restée sans réponse. Par un arrêté du 4 mai 2018, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois. M. B...relève appel du jugement n° 1807097 du 7 mai 2018 par lequel le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant refus de délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français.
Sur le refus d'accorder un délai de départ volontaire :
2. En premier lieu, M. B...reprend en appel le moyen soulevé en première instance, tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de délai de départ volontaire. Il ne développe au soutien de ce moyen aucun argument de droit ou de fait pertinent, de nature à remettre en cause l'analyse et la motivation retenue par le tribunal administratif. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
3. En second lieu, aux termes des dispositions du II de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...)/ Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; 2° Si l'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était ou manifestement infondée ou frauduleuse ; 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation de visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; c) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ; d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; e) Si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré les lieux de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L.513-4, L.552-4, L.561-1 et L.561-2 ".
4. Il ressort des pièces du dossier que si le requérant a sollicité la délivrance d'un titre de séjour le 7 avril 2017 et a été mis en possession d'un récépissé de demande de titre de séjour, il s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de ce récépissé. S'il produit au dossier une attestation d'hébergement à Eragny-sur-Oise, établie le 6 mai 2018, celle-ci est contredite par les autres pièces produites au dossier lesquelles font mention, pour la même période, d'une adresse située dans le douzième arrondissement de Paris. Ainsi, M. B...n'établit pas l'effectivité de sa résidence, ni, par suite, l'absence de risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français édictée à son encontre. Dès lors, en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, le préfet de police n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation portant sur la situation personnelle du requérant.
Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
5. Aux termes du III de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".
6. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaitre les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.
7. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire doit, selon elle, être regardé comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
8. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué mentionne les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique que M.B..., qui allègue être entré en France en 2011, ne peut être regardé comme se prévalant de liens suffisamment anciens, forts et caractérisés avec la France. Dans la mesure où les termes de l'ensemble de l'arrêté litigieux établissent que la situation du requérant a été appréciée au regard de sa durée de présence en France et des conditions de son séjour, et où il n'est pas contesté que le Préfet n'a pas entendu retenir une menace pour l'ordre public, le préfet de police a suffisamment motivé la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois.
9. En second lieu, si M. B...soutient que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la durée de présence du requérant sur le territoire français, laquelle n'est au demeurant pas établie, ainsi que la présence d'un frère et d'une soeur en France, ne sont pas à elles seules suffisantes pour faire regarder la décision comme étant entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, alors qu'il est célibataire et sans enfants à charge et ne justifie pas de l'intégration dont il se prévaut. Par ailleurs, il ne fait état d'aucune circonstance humanitaire qui serait de nature à justifier que le préfet ne prononce pas d'interdiction de retour. Dès lors, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en prenant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 décembre 2018.
Le rapporteur,
P. HAMON
Le président,
B. EVENLe greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA01905