Procédure devant la Cour :
Par une requête, des pièces complémentaires et trois mémoires complémentaires, enregistrées le 25 août 2017, 11 mars 2019, 19 mars 2019 et 29 mai 2019, la région
Ile-de-France, représentée par Me Gerstner, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1608063/2-1 du
27 juin 2017 ;
2°) à titre principal, de rejeter la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif, et, à titre subsidiaire, de réduire le montant des condamnations prononcées à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de M. C...une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La région Ile-de-France soutient que :
- les demandes indemnitaires sont prescrites, car la décision de licenciement n'a fait l'objet d'aucun recours en vue de son annulation, et le contentieux indemnitaire introduit antérieurement n'a pas eu pour effet d'interrompre le délai de prescription ;
- M. C...n'était pas titulaire d'un contrat à durée indéterminée ;
- la rupture du contrat de travail est imputable à M.C... qui a refusé le contrat à durée indéterminée proposé par la région et a démissionné ;
- les indemnités qui ont été accordées par les premiers juges à M. C...sont excessives.
Par un mémoire en défense et d'appel incident et deux mémoires complémentaires, enregistré les 2 octobre 2017, 14 mars 2019, 3 avril 2019 et 23 avril 2019, M.C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) de rejeter l'appel de la région Ile-de-France ;
2°) de réformer le jugement en ce qu'il n'a pas condamné la région Ile-de-France à lui verser, à titre principal, une indemnité de 123 397,91 euros et, à titre subsidiaire, une indemnité de 109 794,91 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de réception de la demande le 24 juin 2015 ;
3°) d'ordonner la capitalisation des intérêts échus à la date d'enregistrement de la requête, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, pour produire eux-mêmes intérêts ;
4°) de mettre à la charge de la région Ile-de-France une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la créance n'est pas prescrite ;
- il est titulaire d'un contrat à durée indéterminée dès lors qu'il remplit les conditions de l'article 35 de la loi du 12 avril 2000 ;
- il n'est pas à l'initiative de la rupture des relations contractuelles ;
- la décision de ne pas le reconduire dans ses fonctions est illégale, un contrat à durée indéterminée ne pouvant être rompu sans motif ou pour un motif illicite ;
- la région a également commis une faute en multipliant de façon abusive les contrats à durée déterminée en vue de pourvoir à des emplois permanents ;
- il peut prétendre au versement d'une indemnité compensatrice de congés annuels, d'une indemnité au titre de la privation de son préavis, et d'une indemnité de licenciement ;
- il a subi un manque à gagner salarial ;
- il a subi un préjudice moral.
Les parties ont été informées qu'en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la Cour était susceptible de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de la situation de compétence liée de la région Ile-de-France.
Une réponse au moyen d'ordre public a été enregistrée le 10 avril 2019 pour M.C....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription quadriennale des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits de citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme d'Argenlieu,
- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public ;
- les observations de Me Gerstner, avocat de la région Ile-de-France ;
- et les observations de Me Annoot, avocat de M.C....
Considérant ce qui suit :
1. M. C...a été employé par la région Ile-de-France, à compter du mois de novembre 1987, en qualité de maître d'hôtel vacataire, en bénéficiant de contrats d'une durée d'un mois. Ces contrats ont été, sous réserve de quelques interruptions, régulièrement renouvelés jusqu'en juillet 2010. Par une lettre du 5 juillet 2010, la région Ile-de-France a proposé à M. C...la signature d'un contrat à durée indéterminée en qualité de maître d'hôtel. Par une lettre du
6 septembre 2010, l'intéressé a refusé cette proposition au motif que la rémunération proposée était substantiellement inférieure à celle dont il bénéficiait jusqu'alors. La région Ile-de-France a alors cessé de faire appel aux services de M.C.... Par une lettre du 15 avril 2015, réceptionnée le 24 juin 2015, M. C...a saisi la région d'une demande tendant à la réparation des préjudices subis du fait des fautes commises par l'administration qui l'a licencié sans motif réel et l'a maintenu illégalement pendant de nombreuses années en situation précaire. La région Ile-de-France fait appel du jugement du 27 juin 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande présentée par M. C...à concurrence de la somme de 68 524,53 euros.
2. M.C..., par la voie de l'appel incident, demande à la Cour de réformer le jugement attaqué en ce qu'il n'a pas condamné la région Ile-de-France à lui verser l'intégralité des sommes demandées.
Sur la nature du contrat liant M. C...à la région Ile-de-France :
3. Aux termes de l'article 3 de la loi susvisée n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 peuvent recruter temporairement des agents contractuels sur des emplois non permanents pour faire face à un besoin lié à : 1° Un accroissement temporaire d'activité, pour une durée maximale de douze mois, compte tenu, le cas échéant, du renouvellement du contrat, pendant une même période de dix-huit mois consécutifs ; 2° Un accroissement saisonnier d'activité, pour une durée maximale de six mois, compte tenu, le cas échéant, du renouvellement du contrat, pendant une même période de douze mois consécutifs ". L'article 38 de cette même loi dispose dans ses trois derniers alinéas que : " Les personnes mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail peuvent être recrutées en qualité d'agent contractuel dans les emplois de catégories A, B et C pendant une période correspondant à la durée de stage prévue par le statut particulier du cadre d'emplois dans lequel elles ont vocation à être titularisées. Lorsque le recrutement est opéré dans un cadre d'emplois nécessitant l'accomplissement d'une scolarité dans les conditions prévues à l'article 45, la durée du contrat correspond à la durée de cette scolarité augmentée de la durée du stage prévue par le statut particulier du cadre d'emplois dans lequel les intéressés ont vocation à être titularisés. Le contrat est renouvelable, pour une durée qui ne peut excéder la durée initiale du contrat. A l'issue de cette période, les intéressés sont titularisés sous réserve qu'ils remplissent les conditions d'aptitude pour l'exercice de la fonction. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application de l'alinéa précédent, notamment les conditions minimales de diplôme exigées pour le recrutement en qualité d'agent contractuel en catégories A et B, les modalités de vérification de l'aptitude préalable au recrutement en catégorie C, les conditions du renouvellement éventuel du contrat, les modalités d'appréciation, avant la titularisation, de l'aptitude à exercer les fonctions. Ce mode de recrutement n'est pas ouvert aux personnes qui ont la qualité de fonctionnaire ". Aux termes de l'article 35 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 : " I.-Les agents non titulaires des collectivités territoriales et des établissements publics en relevant mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, en fonctions à la date de publication de la présente loi, qui n'ont pas été recrutés en application de l'article 3 et des trois derniers alinéas de l'article 38 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, et qui assurent : 1° Soit des fonctions du niveau de la catégorie C concourant à l'entretien ou au gardiennage de services administratifs ; 2° Soit des fonctions de même niveau concourant au fonctionnement de services administratifs de restauration, bénéficient d'un contrat à durée indéterminée sauf s'ils sont recrutés dans les conditions prévues au d de l'article 38 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée. Les agents non titulaires qui bénéficient d'un contrat à durée indéterminée en application du présent paragraphe sont régis par les deuxième et quatrième alinéas de l'article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée. II.-Les agents non titulaires mentionnés au I ci-dessus peuvent demander que le contrat de travail sur la base duquel ils ont été engagés soit un contrat de droit privé soumis aux dispositions du code du travail. Les intéressés disposent d'un délai d'un an à compter de la date de publication de la présente loi pour présenter leur demande. Le bénéfice des dispositions du présent paragraphe leur est reconnu à compter de la date de leur engagement initial. III.-Les agents visés au I et au II ci-dessus ne peuvent bénéficier des dispositions des articles 126 à 135 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, à l'exception de ceux qui ont obtenu une décision de justice passée en force de chose jugée ".
4. Il résulte de l'instruction que M. C...a été employé par la région Ile-de-France, comme maître d'hôtel, à compter du mois de novembre 1987, puis a été régulièrement reconduit en cette même qualité jusqu'au 30 juin 2010, sous réserve de quelques brèves interruptions. L'intéressé était donc en fonction lors de la publication, le 13 avril 2000, de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. Il ressort des contrats de travail produits au dossier que l'intéressé n'a pas été recruté sur le fondement de l'article 3 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, ni sur celui des trois derniers alinéas de l'article 38 précités de cette même loi. Par ailleurs, ses tâches qui consistaient à assurer le service lors des réceptions organisées par la région, correspondaient à des fonctions d'exécution du niveau de la catégorie C et concouraient au fonctionnement d'un service administratif de restauration au sens des dispositions précitées de la loi du 12 avril 2000. Dès lors, l'article 35 de la loi du
12 avril 2000 a eu pour effet de transformer le contrat de travail de M. C...en contrat à durée indéterminée à compter du 14 avril 2000, le lendemain de la date de publication de cette loi au Journal officiel, alors même que l'intéressé n'avait pas demandé à pouvoir bénéficier des dispositions législatives précitées. M. C...devait donc être regardé comme occupant, non pas un emploi de vacataire, mais un poste permanent d'agent non titulaire en vertu d'un contrat à durée indéterminée.
Sur l'appel principal :
En ce qui concerne la rupture des relations contractuelles :
5. Sauf s'il présente un caractère fictif ou frauduleux, le contrat de recrutement d'un agent contractuel de droit public crée des droits au profit de celui-ci. En conséquence, lorsque le contrat est entaché d'une irrégularité, notamment parce qu'il méconnaît une disposition législative ou réglementaire applicable à la catégorie d'agents dont relève l'agent contractuel en cause, l'administration est tenue, dans l'intérêt du service, de proposer à celui-ci une régularisation de son contrat afin que son exécution puisse se poursuive régulièrement. Si le contrat ne peut être régularisé, il appartient à l'administration, dans la limite des droits résultant du contrat initial, de proposer à l'agent un emploi de niveau équivalent, ou, à défaut d'un tel emploi et si l'intéressé le demande, tout autre emploi, afin de régulariser sa situation. Si l'intéressé refuse la régularisation de son contrat ou si la régularisation de sa situation, dans les conditions précisées ci-dessus, est impossible, l'administration est tenue de le licencier. Lorsqu'elle n'implique la modification d'aucun de ses éléments substantiels, l'administration procède à la régularisation du contrat de l'agent, sans être tenue d'obtenir son accord. Dès lors, si l'agent déclare refuser la régularisation à laquelle a procédé l'administration, ce refus n'y fait pas obstacle et l'administration n'est pas tenue de licencier l'agent. Dans le cas où l'administration fait valoir que, à la date à laquelle il a été mis fin à son contrat, la régularisation était impossible, l'agent ne peut prétendre avoir subi aucun préjudice du fait de la décision de mettre fin à son contrat, mais seulement demander le bénéfice des modalités de licenciement qui lui sont applicables.
6. Ainsi qu'il a été dit au point 4, M. C...devait être regardé comme occupant, à compter du 14 avril 2000, un emploi permanent d'agent non titulaire en vertu d'un contrat à durée indéterminée. Les contrats de vacation conclus par la région avec M. C...postérieurement à cette date méconnaissaient donc les dispositions précitées de l'article 35 de la loi susvisée du 12 avril 2000. La région Ile-de-France souhaitant continuer à travailler avec l'intéressé en qualité de maître d'hôtel, était dès lors tenue de régulariser sa situation en lui proposant à cette fin la signature d'un contrat à durée indéterminée, ce qu'elle n'a fait que le
5 juillet 2010. Il résulte de l'instruction et notamment des documents établis par l'administration fiscale pour les années 2008 et 2009, que M. C...était durant ces années, rémunéré à hauteur de 25 euros de l'heure environ. Le contrat à durée indéterminée proposé par la région
Ile-de-France en 2010 offrait, pour les mêmes fonctions, une rémunération de 17 euros de l'heure environ, soit une baisse substantielle de l'un de ses éléments. M. C...était par suite en droit de le refuser sans pour autant être regardé comme ayant démissionné et face à ce refus, l'administration était tenue, dans l'intérêt du service, de le licencier. A supposer même que ce licenciement n'ait pas été précédé de la procédure définie par les articles 39-3 et suivants du décret n° 88-145 du 15 février 1988, il reposait sur un motif légal. La région Ile-de-France n'a donc commis aucune illégalité fautive en mettant un terme au contrat la liant à M.C.... Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont considéré que, dès lors qu'elle ne justifiait pas de la réorganisation du service de restauration, la région Ile-de-France avait illégalement procédé à son licenciement et commis ainsi une faute de nature à engager sa responsabilité.
7. Il résulte de ce qui précède que la Région Ile-de-France est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a considéré que le licenciement de M. C...était entaché d'une illégalité de nature à engager sa responsabilité.
Sur l'appel incident de M. C...:
En ce qui concerne la prescription quadriennale :
8. Aux termes de l'article 1 de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription quadriennale des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudices des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. (...) ". Et aux termes de l'article 2 de la même loi : " La prescription est interrompue par : (...) tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance (...). Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée ".
9. Il résulte de l'instruction que M. C...avait, préalablement à la demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris le 26 mai 2016, saisi ce même tribunal d'une demande tendant à la condamnation de la région Ile-de-France à lui verser diverses indemnités au titre du licenciement illégal dont il estimait avoir fait l'objet. Ce recours a été rejeté par un jugement n° 0915589 du 11 janvier 2012, qui a été confirmé par un arrêt de la Cour n° 12PA01196 du
4 décembre 2014. Les recours ainsi formés par M. C...portant sur le fait générateur de la créance dont il réclame le paiement par le présent appel incident, ont régulièrement interrompu la prescription en application de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968 précitée. Dès lors, l'exception de prescription quadriennale opposée par la région Ile-de-France doit être écartée.
En ce qui concerne l'indemnisation :
10. La région Ile-de-France ayant régulièrement procédé au licenciement de M.C..., ce dernier a droit à l'intégralité des indemnités y afférentes, énoncées par les articles 5, 40 et 43 du décret susvisé du 15 février 1988.
11. En premier lieu, aux termes de l'article 5 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 : " L'agent non titulaire en activité a droit, dans les conditions prévues par le décret n° 85-1250 du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux, à un congé annuel dont la durée et les conditions d'attribution sont identiques à celles du congé annuel des fonctionnaires titulaires. A la fin d'un contrat à durée déterminée ou en cas de licenciement n'intervenant pas à titre de sanction disciplinaire, l'agent qui, du fait de l'administration, n'a pu bénéficier de toute ou partie de ses congés annuels a droit à une indemnité compensatrice (...) ".
12. Il résulte de l'instruction, sans que cela ne soit d'ailleurs contesté par l'intéressé, que la rémunération perçue par M. C...incluait une indemnité compensatrice de congés payés. Ainsi, l'intéressé, qui n'établit pas ni même n'allègue que le montant de cette indemnité aurait été insuffisant, n'est pas fondé à réclamer le paiement d'une somme complémentaire à ce titre.
13. En deuxième lieu, aux termes de l'article 39 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 : " L'agent non titulaire qui présente sa démission est tenu de respecter un préavis qui est de huit jours a moins si l'intéressé a accompli moins de six mois de services, d'un mois au moins s'il a accompli des services d'une durée égale ou supérieure à six mois et inférieure à deux ans, de deux mois au moins si la durée des services est égale ou supérieure à deux ans ". Aux termes de l'article 40 du même décret : " L'agent non titulaire engagé pour une durée déterminée ne peut être licencié par l'autorité territoriale avant le terme de son engagement qu'après un préavis qui lui est notifié dans les délais prévus à l'article 39. Toutefois, aucun préavis n'est nécessaire en cas de licenciement prononcé soit en matière disciplinaire, soit pour inaptitude physique, soit à la suite d'un congé sans traitement d'une durée égale ou supérieure à un mois, soit au cours à ou l'expiration d'une période d'essai. Les mêmes règles sont applicables à tout licenciement d'agent non titulaire engagé pour une durée indéterminée ".
14. Si aucune disposition législative ou règlementaire ne prévoit le versement aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale d'une indemnité compensant l'inexécution du préavis en cas de licenciement, ces agents ont droit, lorsqu'ils ont été privés de ce préavis, à la réparation du préjudice qui en est résulté pour eux.
15. Il résulte de l'instruction que M. C...travaillait pour la région Ile-de-France depuis le mois de novembre 1987, soit depuis plus de deux ans à la date de son licenciement. Dès lors qu'il n'est pas établi ni même soutenu que M. C...aurait retrouvé un emploi avant la fin de la période de deux mois suivant son licenciement, il sera fait une appréciation du préjudice qu'il a subi, en fixant à 7 677,90 euros la somme due à ce titre par la région Ile-de-France.
16. En troisième lieu, aux termes de l'article 43 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 : " Sauf lorsque le licenciement intervient, soit pour des motifs disciplinaires, soit au cours ou à l'expiration d'une période d'essai, une indemnité de licenciement est due aux agents : 1° Qui, recrutés pour une durée indéterminée, ont fait l'objet d'un licenciement (...) ". L'article 45 du même décret : " La rémunération servant de base au calcul de l'indemnité de licenciement est la dernière rémunération nette des cotisations de la sécurité sociale et, le cas échéant, des cotisations d'un régime de prévoyance complémentaire, effectivement perçu au cours du mois civil précédant le licenciement. Elle ne comprend ni les prestations familiales, ni le supplément familial de traitement, ni les indemnités pour travaux supplémentaires ou autres indemnités accessoires ". Aux termes de l'article 46 dudit décret : " L'indemnité de licenciement est égale à la moitié de la rémunération de base définie à l'article précédent pour chacune des douze premières années de service, au tiers de la même rémunération pour chacune des années suivantes, sans pouvoir excéder douze fois la rémunération de base ".
17. Il résulte de l'instruction que la dernière rémunération perçue par M. C...au cours du mois précédant son licenciement, en juin 2010, déduction faite des cotisations de sécurité sociale, des cotisations de prévoyance complémentaire et de son indemnité compensatrice de congés payés, s'élevait à 3 778,40 euros. En application des dispositions précitées de l'article 46 du décret du 15 février 1988, M.C..., dont il n'est pas contesté qu'il justifiait de vingt-trois ans d'ancienneté, pouvait par suite prétendre au versement d'une indemnité de licenciement d'un montant de 36 524,53 euros. Dès lors, il y a lieu de condamner la région Ile-de-France à lui verser cette indemnité.
18. Enfin, la région Ile-de-France, ainsi qu'il a été dit au point 6, n'ayant pas commis d'illégalité en licenciant M.C..., ce dernier n'est pas fondé à obtenir la réparation intégrale de ses préjudices financier et moral au motif que cette éviction serait fautive.
19. En revanche, il ressort de ce qui a été dit aux points 4, 5 et 6 ci-dessus, que la région Ile-de-France était tenue à compter du 14 avril 2000 de régulariser la situation de M. C...en lui proposant un contrat à durée indéterminée. Par suite, en ne le faisant pas, l'administration a commis une illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité. Il sera fait une juste appréciation du préjudice moral résultant de cette faute en l'indemnisant à hauteur de 5 000 euros.
20. Il résulte de ce qui précède que la région Ile-de-France versera à M. C...une somme de 49 202,43 euros. M. C...n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à ce que la région
Ile-de-France soit condamnée à lui verser, à titre principal, une somme totale de 123 397 euros ou, à titre subsidiaire, à une somme totale de 109 794,91 euros.
Sur la capitalisation des intérêts :
21. M. C...a droit aux intérêts au taux légal sur les sommes dues à compter du
24 juin 2015, date à laquelle l'administration a reçu la demande préalable. Ces intérêts seront capitalisés à compter du 24 juin 2016, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
22. Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 27 juin 2017 doit être réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Sur les frais de justice :
23. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La région Ile-de-France est condamnée à verser à M. C...une somme de 49 202,43 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 juin 2015, qui seront capitalisés à compter du 24 juin 2016, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 27 juin 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la région Ile-de-France et le surplus de l'appel incident de M. C...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la région Ile-de-France et à M. B...C....
Délibéré après l'audience du 4 juin 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président-rapporteur,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique le 26 juin 2019.
Le rapporteur,
L. d'ARGENLIEU
Le président,
B. EVEN Le greffier,
S. GASPARLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA02933