Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 août 2019, M. G... H..., représenté par Me I..., demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement du 26 juin 2019 en tant que le Tribunal administratif de Paris a limité à la somme de 5 000 euros l'indemnisation des préjudices mise à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France et a rejeté le surplus des conclusions de sa requête ;
2°) de condamner solidairement la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France et la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie à lui verser la somme de 27 683,83 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2017 et de leur capitalisation, en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait du défaut de prise en compte de la prime exceptionnelle dans la base de calcul de son allocation d'aide au retour à l'emploi ;
3°) de mettre à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le litige soumis au Tribunal administratif de Paris ne relève pas des dispositions du 1° de l'article L. 811-1 du code de justice administrative dès lors qu'il porte sur l'engagement de la responsabilité de la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie (CMAC) et de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France (CCIR Paris Ile-de-France) ; ce litige est donc susceptible de faire l'objet d'un appel ;
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il n'a pas été régulièrement signé ;
- la CMAC ne pouvait pas procéder au retrait de sa décision d'inclure la prime exceptionnelle dans la base de calcul de ses droits à l'allocation de retour à l'emploi plus de quatre mois après l'édiction de cette décision dès lors qu'elle est créatrice de droits et que la CMAC avait connaissance, dès l'édiction de sa décision initiale, de ce que la prime exceptionnelle avait un caractère systématique dès lors qu'une prime exceptionnelle avait été accordée à tous les agents ayant signé une convention de cessation d'un commun accord des relations de travail ;
- la CCIR Paris Ile-de-France lui a indiqué, dans l'attestation d'employeur établie en application de l'article R. 1234-9 du code du travail, que la prime exceptionnelle de deux mois serait nécessairement incluse dans la base de calcul de l'allocation de retour à l'emploi ; cette attestation constitue une promesse ; en ne respectant pas son engagement, la CCIR Paris Ile-de-France a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
- en acceptant de signer une convention de cessation d'un commun accord de la relation de travail, il s'est privé d'une situation financièrement plus avantageuse ;
- cette faute a été à l'origine d'un préjudice financier qui s'élève à 17 683,83 euros et de troubles dans ses conditions d'existence qui ne saurait être évalué à moins de 5 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2019, la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France, représentée par la SCP Rocheteau-Uzan, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. H... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'affaire doit être renvoyée au Conseil d'Etat en application des dispositions du 1° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative ;
- à titre subsidiaire, le jugement est régulier dès lors que l'examen de la minute permettra de constater que ce document est revêtu de la signature des trois magistrats ;
- à titre très subsidiaire, l'information qu'elle a délivrée au requérant ne peut être regardée comme une promesse ; il n'existe aucun lien de causalité direct entre les préjudices dont le requérant demande l'indemnisation et la faute invoquée ; ces préjudices ne présentent pas de caractère certain.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2020, la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. H... la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'appel formé par le requérant est irrecevable en application des dispositions du 1° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative ;
- le jugement est régulier dès lors que l'examen de la minute permettra de constater que ce document est revêtu de la signature des trois magistrats ;
- c'est à bon droit qu'elle a refusé de prendre en compte dans le calcul de l'allocation de retour à l'emploi la prime exceptionnelle versée à M. H... dès lors qu'elle ne trouve pas sa contrepartie dans l'exécution normale du contrat de travail ; elle n'a donc pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité ;
- les organismes en charge de verser les prestations de chômage peuvent réclamer le remboursement des sommes indûment versées aux bénéficiaires dans un délai de trois ans en application de l'article 27 du règlement général annexé à la convention du 14 mai 2014 ; elle était donc autorisée à modifier pour l'avenir le montant de l'allocation ; en outre, les décisions fixant le montant de l'allocation de retour à l'emploi ne sont pas des décisions créatrices de droit ;
- en tout état de cause, le comportement de la CCIR Paris Ile-de-France est de nature à l'exonérer de toute responsabilité ou, à tout le moins, d'atténuer une telle responsabilité.
Un mémoire présenté pour M. H... a été enregistré le 26 octobre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;
- le décret n° 2020-1404 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre administratif ;
- l'arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie et des groupements interconsulaires ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,
- les observations de Me D..., représentant H...,
- et les observations de Me A..., représentant la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie.
Considérant ce qui suit :
1. M. H..., agent de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris
Ile-de-France a signé, le 1er juillet 2015, une convention de cessation d'un commun accord de la relation de travail prenant effet au 30 septembre 2015. A la réception d'un courrier du 30 août 2016 de la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie, M. H... a été informé de ce que la prime exceptionnelle correspondant à deux mois de salaires qu'il avait perçue ne serait pas prise en compte dans l'évaluation du salaire de référence déterminant les droits à l'allocation de retour à l'emploi. Par courrier du 21 mars 2017, il a alors sollicité de la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie et de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France l'indemnisation des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait des nouvelles modalités de calcul de ses droits à l'assurance chômage. Par un jugement du 26 juin 2019, le Tribunal administratif de Paris a condamné la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral résultant de la délivrance d'informations erronées sur la base de calcul de ses droits à l'allocation de retour à l'emploi et a rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires dirigées tant contre cet établissement que contre la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie. M. H... relève appel de ce jugement en tant qu'il a limité à la somme de 5 000 euros l'indemnisation des préjudices mise à la charge de de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France et rejeté ses conclusions indemnitaires dirigées contre la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie.
Sur l'exception d'incompétence soulevée par la CCIR Paris Ile-de-France et la CMAC :
2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : 1° Sur les litiges relatifs aux prestations, allocations ou droits attribués au titre de l'aide ou de l'action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d'emploi, mentionnés à l'article R. 772-5, y compris le contentieux du droit au logement défini à l'article R. 778-1 ". Aux termes de l'article R. 351-2 du même code : " Lorsqu'une cour administrative d'appel ou un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever de la compétence du Conseil d'Etat, son président transmet sans délai le dossier au Conseil d'Etat qui poursuit l'instruction de l'affaire (...) ".
3. Les litiges, y compris les actions indemnitaires, relatifs au calcul des droits à l'allocation de retour à l'emploi relèvent de la compétence en premier et dernier ressort des tribunaux administratifs en application des dispositions précitées du 1° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. Dès lors, le jugement attaqué, en tant qu'il statue sur la demande indemnitaire de M. H... tendant à la condamnation de la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie en raison d'une faute qu'elle aurait commise dans les modalités de calcul de son allocation de retour à l'emploi est insusceptible d'appel. Les conclusions présentées par M. H... contre le jugement du Tribunal administratif de Paris du 26 juin 2019, en tant que ce jugement statue sur cette demande, ont par suite le caractère d'un pourvoi en cassation. Il y a donc lieu de transmettre ces conclusions au Conseil d'Etat.
4. En revanche, l'action indemnitaire dirigée contre la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France, qui repose sur la faute de l'établissement résultant de la délivrance de renseignements erronés et d'une promesse non tenue, ne fait pas partie des litiges entrant dans le champ d'application de ces dispositions. Par suite, la Cour est compétente pour statuer sur la requête de M. H... en tant qu'elle est dirigée contre la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France.
Sur la régularité du jugement attaqué :
5. Il ressort de la minute du jugement, communiquée aux parties, que cette décision a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. Elle comporte ainsi l'ensemble des signatures exigées par l'article R. 741-7 du code de justice administrative.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la responsabilité de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France :
6. Si la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France a inscrit la prime exceptionnelle correspondant à deux mois de salaire dans la rubrique 7.2 " primes et indemnités de périodicité différente des salaires " de l'attestation employeur de M. H... destinée à Pôle emploi, établie en application de l'article R. 12349 du code du travail, ce document n'a qu'une valeur déclarative et ne peut être regardé comme un engagement de nature à lier la chambre quant à l'intégration de cette prime dans la base de calcul de ses droits à l'allocation chômage. En outre, il résulte de l'instruction, notamment de la convention de cessation d'un commun accord de la relation de travail que, lors de l'entretien préalable, il a été indiqué à l'intéressé qu'il avait la possibilité de " contacter les services (notamment la CMAC) qui pourront l'aider à prendre sa décision en pleine connaissance de ses droits ". L'absence de prise en compte de cette prime exceptionnelle dans la base de calcul de l'allocation de retour à l'emploi n'est, dès lors, pas constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France. Par suite, le requérant n'est pas fondé à demander réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait d'une promesse non tenue.
En ce qui concerne les préjudices :
7. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, la responsabilité de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France ne peut être engagée en raison d'une promesse non tenue. Dès lors, la demande de M. H... tendant à l'indemnisation des préjudices résultant d'une telle promesse ne peut qu'être rejetée. En outre, M. H... demande l'indemnisation des préjudices résultant de l'information erronée délivrée par la chambre sur la base de calcul de ses droits à l'allocation de retour à l'emploi. Dans la présente instance, la chambre n'a pas contesté sa responsabilité sur ce fondement.
8. En premier lieu, le préjudice financier, dont M. H... demande réparation, consistant tant dans la perte de droits à l'allocation chômage que dans la perte de droits à la retraite, est directement lié, non à l'existence d'une faute résultant de la délivrance par la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France d'informations erronées, mais à l'application de la réglementation relative à l'indemnisation du chômage. M. H... n'établit pas non plus qu'en l'absence des indications erronées délivrées par la chambre, il n'aurait pas conclu la convention de cessation d'un commun accord de la relation de travail, en application de laquelle il a, au demeurant, perçu une indemnité de rupture d'un montant 66 529,12 euros. M. H... n'est donc pas fondé à demander l'indemnisation de son préjudice financier.
9. En second lieu, si M. H... invoque des troubles dans les conditions d'existence, il se borne à indiquer qu'il " a apprécié l'équilibre financier de sa situation post-rupture conventionnelle au regard " des informations erronées de la chambre de commerce et d'industrie de la région Paris Ile-de-France. Ce faisant, il n'établit ni la réalité ni l'étendue de son préjudice.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. H... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a limité à la somme de 5 000 euros l'indemnisation de ses préjudices résultant de l'exclusion de la prime exceptionnelle dans l'évaluation du salaire de référence déterminant ses droits à l'allocation de retour à l'emploi.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. H..., au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. H... la somme demandée par la chambre de commerce et d'industrie Paris Ile-de-France, au même titre.
D E C I D E :
Article 1er : Les conclusions de la requête de M. H... dirigées contre la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie sont transmises au Conseil d'Etat.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : Les conclusions de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile-de-France présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... H..., à la chambre de commerce et d'industrie Paris Ile-de-France et à la caisse d'allocations chômage des chambres de commerce et d'industrie.
Délibéré après l'audience du 13 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme E..., présidente,
- M. Mantz, premier conseiller,
- Mme B..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 novembre 2020.
Le rapporteur,
C. B...La présidente,
M. E... Le rapporteur,
C. B...La présidente,
M. E... Le rapporteur,
C. B...La présidente,
M. E... Le greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA02806