Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 31 octobre 2019 et le 14 novembre 2019, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Melun du 1er octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes délai et astreinte et de lui délivrer, pendant cet examen, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de renouvellement de titre de séjour est entachée d'incompétence ;
- elle est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen complet de sa situation ;
- elle a été prise en méconnaissance des dispositions des articles L. 114-5 et L. 114-6 du code des relations entre le public et l'administration, dès lors que le préfet ne l'a pas invité à compléter sa demande ;
- elle est entachée d'un vice de procédure tiré du défaut de saisine de la commission du titre de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur de droit et méconnaît les dispositions de l'article
L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet du Val-de-Marne a commis une erreur de droit en s'estimant lié par l'avis de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- l'arrêté du 28 octobre 2016 fixant la liste des pièces à fournir pour l'exercice, par un ressortissant étranger, d'une activité professionnelle salariée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Mme B... a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant malien, né en 1969, est entré en France en 2006 selon ses déclarations. Le 27 mars 2017, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté en date du 18 janvier 2018, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 1er octobre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". (...) ". Aux termes de l'article R. 5221-32 du code du travail : " Le renouvellement d'une autorisation de travail mentionnée à l'article R. 5221-11 est sollicité dans le courant des deux mois précédant son expiration. La demande de renouvellement est accompagnée de documents dont la liste est fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de l'immigration et du travail. L'autorisation de travail est renouvelée dans la limite de la durée du contrat de travail restant à courir ou de la mission restant à accomplir en France. ". Aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 28 octobre 2016 fixant la liste des pièces à fournir pour l'exercice, par un ressortissant étranger, d'une activité professionnelle salariée : " L'employeur, qui sollicite le renouvellement d'une autorisation de travail relevant du 8° de l'article R. 5221-3 du code du travail pour un ressortissant étranger qui ne remplit pas les conditions de délivrance de la carte de séjour pluriannuelle, produit à l'appui de sa demande les pièces suivantes : (...) II. - Pour les renouvellements demandés, à l'issue de la deuxième année de validité de sa carte de séjour, et sous réserve du respect de la précédente autorisation de travail : une attestation d'emploi, dès lors que l'étranger titulaire de l'autorisation de travail délivrée sur le fondement du 8° du R. 5221-3 est autorisé à exercer tout emploi à l'issue de la deuxième année de validité de sa carte de séjour. (...) ".
3. Pour refuser à M. A... le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Val-de-Marne s'est fondé sur l'avis défavorable émis par la DIRECCTE le 21 septembre 2017 motivé par l'absence de réponse de l'employeur à la demande de pièces complémentaires qui lui avait été adressée le 7 juillet 2017 et sur la méconnaissance, par son employeur, de ses obligations déclaratives auprès de l'administration fiscale.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... s'est vu délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " le 7 mai 2015 et valable jusqu'au 6 mai 2016, renouvelé jusqu'au 6 mai 2017. Par suite, les dispositions précitées du II de l'article 5 de l'arrêté du 28 octobre 2016 étaient applicables à la demande de renouvellement de son autorisation de travail, effectuée à l'issue de la deuxième année de validité de sa carte de séjour. M. A... soutient, sans être contredit, que cette demande était assortie d'une attestation d'emploi. Cependant, par un courrier du 7 juillet 2017, le service de la main d'oeuvre étrangère de la DIRECCTE a demandé à son employeur, la société Bati Top, la communication d'un extrait Kbis à jour, des statuts de la personne morale, de la dernière attestation des comptes à jour par l'URSSAF et des deux dernières pages du registre unique du personnel. De tels documents, qui ne sont pas mentionnés au II de l'article 5 de l'arrêté du 28 octobre 2016 précité, n'étaient pas exigibles dans le cas d'un renouvellement demandé à l'issue de la deuxième année de validité d'une carte de séjour. Dans ces conditions, M. A... est fondé à soutenir que le préfet du Val-de-Marne, en se fondant sur l'avis défavorable de la DIRECCTE, motivé par l'absence de réponse à la demande de communication de pièces complémentaires, pour lui refuser la délivrance d'une carte de séjour mention " salarié ", a entaché sa décision d'une erreur de droit. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet, qui n'a pas produit de mémoire en défense dans la présente instance, aurait pris la même décision en se fondant sur le seul motif tiré de la méconnaissance, par l'employeur de M. A..., de ses obligations déclaratives auprès de l'administration fiscale.
5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Le présent arrêt, par lequel la Cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par M. A..., n'implique pas, eu égard au motif d'annulation ci-dessus énoncé, que l'administration prenne une nouvelle décision dans un sens déterminé. Par suite, les conclusions du requérant tendant à ce que lui soit délivré un titre de séjour doivent être rejetées. Il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1803008 du 1er octobre 2019 du Tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 18 janvier 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé à M. A... la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera délivrée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme D..., présidente,
- M. Mantz, premier conseiller,
- Mme B..., premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mars 2021.
Le rapporteur,
C. B...La présidente,
M. D... Le rapporteur,
C. B...La présidente,
M. D... Le rapporteur,
C. B...La présidente,
M. D...
Le greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 19PA03467 5