Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 avril 2020 et 3 février 2021, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement no 1920920-1920925 du 3 mars 2020 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 21 août 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un certificat de résidence, ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 7 bis b) de l'accord franco-algérien modifié dès lors qu'il remplit les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour en qualité d'ascendant de français à charge ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale par la voie de l'exception d'illégalité de la décision de refus de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;
- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- et les observations de Me C..., pour M. E... A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., né le 12 septembre 1941, de nationalité algérienne est entré en France accompagné de son épouse, le 8 février 2019, sous couvert d'un visa " C " Schengen délivré à Alger par les autorités espagnoles. M. A... a sollicité le 16 mai 2019 la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'ascendant de ressortissant français, sur le fondement des dispositions de l'article 7 bis b) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. M. A... fait appel du jugement du 3 mars 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de police du 21 août 2019 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours, en fixant le pays de destination.
2. Il ressort des pièces du dossier que M. A... souffre de la maladie d'Alzheimer et que son épouse, déjà victime d'un infarctus, souffre d'un diabète de type 2. Il n'est pas sérieusement contesté par le préfet de police que les quatre enfants majeurs vivant en Algérie de M. et Mme A... se désintéressent totalement de leurs parents et n'ont pas de revenus leur permettant de subvenir à leurs besoins. En outre, il n'est pas contesté que si M. A... bénéficie d'une pension de retraite d'un montant mensuel deux fois et demi supérieur au salaire national minimal garanti en Algérie, ce revenu ne lui permet pas d'être soigné par des aides à domicile. Par ailleurs, il n'existe pas en Algérie de structure gériatrique spécialisée dans le traitement de la maladie d'Alzheimer, financièrement accessible à des personnes disposant d'un niveau de revenu comparable à celui de M. A..., En outre, M. B... A..., fils du requérant, qui détient la nationalité française et exerce la profession d'infirmier dans un établissement hospitalier en France, subvient tant aux besoins financiers que médicaux de ses parents. Enfin, l'état de santé de M. A... qui se trouve à un stade avancé de sa maladie se traduit par un comportement violent à l'égard de son épouse et nécessite ainsi la présence quotidienne d'un membre de sa famille ayant la capacité de pourvoir à ses besoins tant médicaux que financiers. Dans les conditions très particulières de l'espèce, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, il apparaît que le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer un titre de séjour à M. A... et en l'éloignant du territoire français à destination de l'Algérie.
3. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de police du 21 août 2019.
Sur l'injonction :
4. En raison du motif qui la fonde, l'annulation de l'arrêté attaqué implique nécessairement, compte tenu de l'absence de changement des circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, qu'un certificat de résidence soit délivré au requérant sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative. Il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de délivrer ce certificat à M. A... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 3 mars 2020 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet de police du 21 août 2019 est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer un certificat de résidence à M. A... dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'État versera la somme de 1 500 euros à M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 11 février 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme D..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 mars 2021.
Le rapporteur,
I. D...Le président,
S-L. FORMERY
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA01150