Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 29 novembre 2016, 7 décembre 2016 et 29 mai 2017, MmeB..., représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1521198 du 27 septembre 2016 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 324 771 euros résultant de l'avis à tiers détenteur qui lui a été notifié le 2 septembre 2015.
Elle soutient que :
- l'action en recouvrement de la créance dont se prévaut l'administration est prescrite, aucun acte de nature à interrompre le cours de la prescription ne lui ayant été régulièrement notifié au cours des quatre années précédant la notification de l'avis à tiers détenteur du 2 septembre 2015 ;
- la mise en demeure du 8 juin 2015 ne lui a pas été notifiée à l'adresse à laquelle l'administration fiscale a expédié les autres courriers qui lui étaient destinés et ne peut donc avoir valablement interrompu le cours de la prescription.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 7 mars 2017 et 5 janvier 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Poupineau,
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par courrier du 2 septembre 2015, le service des impôts des particuliers du 17ème arrondissement a émis un avis à tiers détenteur adressé à la caisse de retraite AG2R Retraite ARRCO à l'encontre de MmeB..., en vue du recouvrement de cotisations d'impôt sur le revenu dues au titre des années 1993, 1995 et 1996, pour un montant de 324 771,41 euros. Mme B...fait appel du jugement en date du 27 septembre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer cette somme.
2. Aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables publics des administrations fiscales qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable (...) ".
3. Il appartient au juge de l'impôt, compétent en application de ces dispositions pour connaître des contestations portant sur l'exigibilité des sommes réclamées, d'apprécier, le cas échéant, si un acte de poursuite antérieur à celui qui a provoqué la contestation du contribuable a pu, eu égard aux conditions dans lesquelles il a été notifié à ce dernier, interrompre le cours de la prescription de l'action en recouvrement.
4. Les cotisations d'impôt sur le revenu établies au nom de M. et Mme B...ont été mises en recouvrement le 31 août 1996 et le 30 avril 1999. Une mise en demeure de payer du 11 août 2011 portant sur ces impositions a été adressée à Mme B...le 20 août 2011. La requérante soutient qu'entre cette date et le 2 septembre 2015, date de l'avis à tiers détenteur litigieux, aucun acte de poursuite susceptible d'interrompre la prescription ne lui a été régulièrement notifié. Le ministre fait valoir qu'une mise en demeure du 8 juin 2015 a été expédiée à Mme B... à son adresse d'imposition, 91, rue de la Condamine à Paris (75017), qui correspond à son domicile personnel au titre duquel elle est imposée à la taxe d'habitation. Le pli contenant la mise en demeure a, toutefois, été retourné à l'administration le 15 juin 2015 avec la mention " pli avisé non réclamé ".
5. Il résulte de l'instruction que Mme B...a indiqué dans la rubrique " ETAT CIVIL : nom auquel vos courriers seront adressés " de sa déclaration de revenus pour l'année 2013 qu'elle a souscrite le 15 mai 2014, que les courriers devaient être adressés au 56 rue du Ruisseau, à Paris (75018). Cette information, alors même qu'elle n'aurait pas été mentionnée dans la rubrique prévue à cet effet de la déclaration, a été régulièrement portée à la connaissance de l'administration, qui a d'ailleurs pris acte de cette nouvelle adresse d'expédition à laquelle elle a envoyé les avis d'imposition de MmeB..., ainsi que l'avis à tiers détenteur contesté. Par suite, la mise en demeure du 8 juin 2015, faute d'avoir été expédiée à l'adresse mentionnée par Mme B...dans sa déclaration de revenus de l'année 2013, ne peut être regardée comme ayant été régulièrement notifiée à l'intéressée et n'a ainsi pas interrompu le délai de prescription de l'action en recouvrement des impositions en litige, qui était ainsi acquise à la date de notification de l'avis à tiers détenteur du 2 septembre 2015.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1521198 du 27 septembre 2016 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : Mme B...est déchargée de l'obligation de payer la somme de 324 771 euros.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1)
Délibéré après l'audience du 20 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- M. Doré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 octobre 2018.
Le rapporteur,
V. POUPINEAULe président,
S.-L. FORMERYLe greffier,
C. RENE-MINE
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 16PA03512