Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 juin 2016 et 20 octobre 2016, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1601896 du 31 mai 2016 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 17 août 2015 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :
- elle est insuffisamment motivée et méconnaît ainsi les dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciations en refusant de renouveler son titre de séjour dans le cadre des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile eu égard à la durée de son séjour en France et à sa parfaite intégration sociale et professionnelle ;
- la décision contestée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à la durée de son séjour en France, à l'intensité des liens personnels et affectifs qu'il y a développés et à sa parfaite intégration sociale et professionnelle ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle dès lors qu'il n'a fait l'objet que d'une seule condamnation pénale, qu'il regrette profondément son comportement, qu'il a démontré une parfaite intégration sociale et professionnelle depuis 1998, qu'il bénéficie d'un suivi psychologique depuis sa sortie de détention ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;
- la décision contestée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 79-597 du 11 juillet 1979 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Larsonnier a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.B..., de nationalité égyptienne, est entré en France selon ses déclarations en 1998 ; qu'il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " qui lui a été délivré sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : qu'après avoir consulté la commission du titre de séjour qui a rendu un avis favorable le 16 avril 2015, le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit par un arrêté en date du 17 août 2015 ; que M. B...fait appel du jugement du 31 mai 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité de la décision de refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de séjour vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de police, après avoir précisé que M.B..., de nationalité égyptienne, est entré en France selon ses déclarations en 1998 et que la commission du titre de séjour a été consultée le 16 avril 2016, a mentionné que l'intéressé a fait l'objet d'une condamnation le 11 juillet 2013 par le tribunal correctionnel de Paris à quatre mois d'emprisonnement pour agression sexuelle, que ces faits récents portent gravement atteinte à l'ordre public et qu'il n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne répond pas à des considérations humanitaires et ne justifie pas de motifs exceptionnels ; que le préfet de police a également indiqué que M. B...a toutes ses attaches familiales en Egypte où il a vécu jusqu'à l'âge de 22 ans au moins et où résident sa femme, ses deux enfants nés en 2014 et ses parents et que, par suite, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privé et familiale ; qu'enfin, il n'établit pas être exposé à des peines ou traitements inhumains contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est suffisamment motivée au regard des exigences des dispositions des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 précitée, désormais codifiées aux articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) ".
4. Considérant que, lorsque l'administration oppose à un étranger, sur le fondement de l'article L. 313-14, le motif tiré de ce que sa présence constitue une menace pour l'ordre public, pour refuser de faire droit à sa demande, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision ; que les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure de refus de renouvellement de titre de séjour et d'éloignement et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace pour l'ordre public ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a été condamné le 11 juillet 2013 par le tribunal correctionnel de Paris à quatre mois d'emprisonnement pour agression sexuelle ; que le requérant, qui réside en France depuis 2002, soutient que cette condamnation présente un caractère isolé, qu'il fait l'objet d'un suivi psychologique et qu'il est particulièrement bien intégré professionnellement ; que, toutefois, eu égard à la gravité des faits et à leur caractère récent, le préfet de police n'a pas entaché son arrêté d'une erreur d'appréciation en estimant que la présence de M. B...en France constituait une menace grave pour l'ordre public ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne renouvelant pas son titre de séjour ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...réside en France depuis 2002, qu'il a été titulaire de cartes de séjour entre 2002 et 2005 en raison de son état de santé et qu'il travaille dans le secteur du bâtiment ; que s'il vit en France avec son frère, il n'est toutefois pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident son épouse, ses deux enfants nés en 2014, sa mère et cinq de ses frères et ses deux soeurs ; que, dans ces conditions et bien que l'intéressé réside en France depuis treize ans à la date de la décision contestée et exerce un emploi, le préfet de police n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision portant refus de titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
8. Considérant, enfin, eu égard à ce qui a été dit précédemment, que le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant que les moyens dirigés contre le refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. B... dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui reprend ce qui a été développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 7 du présent arrêt ;
11. Considérant qu'aucune des circonstances invoquées par M. B...ne permet de regarder la décision contestée comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 23 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Coiffet, président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 avril 2017.
Le rapporteur,
V. LARSONNIER Le président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA02093