Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 24 mai 2017, 22 décembre 2017 et 26 février 2018, la société CA Communication Multimédia, représentée par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1518583 du 28 mars 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010 et 2011 pour un montant total de 370 398 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'insuffisance de motivation, et le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de la violation de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;
- la procédure d'imposition est irrégulière, dès lors qu'elle n'a pas été informée, dès le stade de la proposition de rectification, de l'origine et de la teneur des documents obtenus dans le cadre de l'exercice du droit de communication prévu à l'article L. 81 du livre des procédures fiscales et n'a donc pu bénéficier des garanties offertes par l'article L. 76 B du même livre ; elle est fondée à cet égard à se prévaloir des énonciations des instructions BOI-CF-PGR-30-10 n° 210 et n° 280 qui précisent que " l'obligation d'information sur la teneur des renseignements et documents implique d'exposer dans la proposition de rectification le contenu des renseignements et documents utilisés au titre de la motivation des rehaussements ", ainsi que du paragraphe 2 de la documentation de base référencée 13 L 6-06 en date du 21 septembre 2006, qui prévoit que le non respect de l'obligation d'information constitue une erreur substantielle de nature à entacher la procédure d'irrégularité et à entraîner la décharge des impositions fondées sur l'utilisation des documents recueillis auprès des tiers ;
- elle a été privée de la possibilité de discuter des contrats communiqués par les sociétés Leader Price et Franprix avec l'interlocuteur départemental avant la mise en recouvrement des impositions en litige ;
- la procédure d'imposition est irrégulière, l'administration ayant implicitement mis en oeuvre la procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, et les motifs qui fondent le rehaussement auraient dû être soumis à l'avis du comité de répression des abus de droit ;
- le caractère fictif des factures d'apport d'affaires en litige n'est pas démontré par l'administration ;
- l'application des pénalités pour manoeuvres frauduleuses est également irrégulière à défaut d'avoir pu être débattues de manière contradictoire et d'être justifiées ; l'instruction référencée BOI-CF-INF-10-20-20 paragraphe 60 définit les manoeuvres frauduleuses et le comportement de sa filiale n'entre pas dans les schémas retenus par cette doctrine.
Par un mémoire en défense et des mémoires enregistrés les 27 septembre 2017, 8 février 2018 et 13 mars 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société CA Communication Multimédia ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lescaut,
- les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la société CA Communication Multimédia.
Une note en délibéré présentée pour la société CA Communication Multimédia a été enregistrée le 13 novembre 2018.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) CA Communication exerce une activité d'agence de communication et de publicité et fait partie d'un groupe fiscal intégré, dont la société mère est la société française par actions simplifiée (SAS) CA Communication Multimédia, elle-même détenue à plus de 50 % par la société de droit luxembourgeois CA Animation, domiciliée.chez la société Aurea Finance Compagnie La société CA Communication a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 avec une extension au 30 septembre 2012 pour la taxe sur la valeur ajoutée, au cours de laquelle le service a remis en cause la déduction de charges des deux exercices clos en 2010 et 2011, à raison du versement de commissions d'affaires versées à la société de droit luxembourgeois CA Animation. Les cotisations d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales en résultant ont été mises en recouvrement le 16 janvier 2015 au nom de la société mère SAS CA Communication Multimédia. La société CA Communication Multimédia relève appel du jugement du 28 mars 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions et des pénalités mises à sa charge au titre de ces exercices.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. La société requérante fait valoir que le jugement est entaché d'une insuffisance de motivation quant à la réponse au moyen contestant le bien-fondé de la réintégration des commissions d'apport d'affaires dans ses bases imposables à l'impôt sur les sociétés des exercices en litige. Il résulte, toutefois, du point 7 du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués devant eux, ont suffisamment précisé les motifs pour lesquels ils ont jugé que les rehaussements en litige étaient fondés. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué pour ce motif doit, par suite, être écarté.
3. La société CA Communication Multimédia soutenait, toutefois, devant les premiers juges que la procédure d'imposition était irrégulière, dès lors qu'en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, l'administration n'avait indiqué ni dans la proposition de rectification ni dans la réponse aux observations du contribuable l'origine des renseignements sur lesquels elle se fondait. Le tribunal ne s'étant pas prononcé sur ce moyen, qu'il n'a pas visé et qui n'était pas inopérant, le jugement attaqué doit être annulé. Il y a donc lieu, dans les circonstances de l'affaire, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SAS CA Communication Multimédia devant le Tribunal administratif de Paris.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
4. Aux termes, en premier lieu, de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la procédure d'imposition litigieuse : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : / (...) / b) (...) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; c) Ou qui permettent d'éviter, en totalité ou en partie, le paiement des taxes sur le chiffre d'affaires correspondant aux opérations effectuées en exécution d'un contrat ou d'une convention. / L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. (...) ". L'administration peut mettre en oeuvre les pouvoirs qu'elle tient de ces dispositions à l'encontre soit d'actes qui revêtent un caractère fictif, soit d'actes qui, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que le contribuable, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles.
5. Il résulte de l'instruction que, pour établir les redressements en litige, le service n'a pas remis en cause les contrats passés entre la société CA Communication et la société CA Animation qui lui ont été présentés lors des opérations de contrôle et qui n'ont pas été dénoncés comme des contrats fictifs servant seulement à éluder l'impôt, mais s'est fondé sur l'inexistence de contreparties aux sommes versées à la société CA Animation, et par suite, sur le caractère fictif des factures émises par cette entreprise. Ainsi, et contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration ne peut être regardée comme ayant invoqué implicitement mais nécessairement les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales relatives à l'abus de droit. Est, dès lors, inopérant le moyen tiré de ce que la société CA Communication aurait été privée des garanties s'y rapportant, au nombre desquelles figure le droit de demander la saisine du comité de l'abus de droit.
6. Aux termes, en deuxième lieu, de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Il incombe à l'administration d'informer avec une précision suffisante un contribuable de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers dont elle s'est prévalue au cours de la procédure d'imposition, y compris lors de la procédure devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et qu'elle a utilisés pour établir l'imposition afin de permettre à l'intéressé, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contenaient ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent.
7. Il ressort, d'une part, des mentions de la proposition de rectification du 31 juillet 2013 régulièrement notifiée à la société CA Communication que le vérificateur a fait référence aux contrats passés avec la société CA Animation qui lui ont été remis lors des opérations de contrôle par la société CA Communication Multimédia, et aux renseignements et factures de la société Tam Tam Global recueillis lors du droit de visite des locaux du groupe CA et de son expert comptable en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales.
8. La société CA Communication Multimédia reproche au service de ne pas l'avoir informée sur l'origine et la teneur des informations obtenues par le service dans le cadre du droit de communication exercé en application de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales pour justifier l'absence d'existence et de substance de la société Tam Tam Global. Elle soutient à cet égard qu'elle n'a appris le recours à cette procédure que dans le mémoire en défense du 27 septembre 2017 présenté par le ministre devant la Cour. Ainsi qu'il est dit au point précédent, l'administration s'est cependant acquittée de ses obligations tendant à ce que la société CA Communication soit en mesure de solliciter la communication, le cas échéant, des pièces obtenues dans le cadre de l'exercice de son droit de communication avant la mise en recouvrement des droits contestés, dès lors qu'elle a été informée de la teneur et de l'origine des documents ayant fondé les redressements dans la proposition de rectification du 31 juillet 2013, et qu'il ne résulte pas de l'instruction que le service se serait fondé sur d'autres informations et renseignements pour établir les rehaussements en litige. La société requérante n'est, par suite, pas fondée à soutenir qu'elle n'a pas été informée de l'origine et de la teneur des informations recueillies par l'administration.
9. D'autre part, et contrairement à ce que la société requérante soutient, sa filiale a été informée de la teneur et du droit de communication exercé le 18 septembre 2013 et des contrats communiqués par les sociétés Leader Price et Franprix lors de la procédure devant la commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, soit antérieurement à la mise en recouvrement des impositions en litige le 16 janvier 2015. La société n'est, par suite, pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition serait irrégulière pour ce motif.
10. En troisième lieu, la société requérante soutient que sa filiale a été privée de la possibilité de discuter des contrats communiqués par les sociétés Leader Price et Franprix avec l'interlocuteur départemental avant la mise en recouvrement de ces impositions. Elle fait sur ce point valoir que la société CA Communication a été reçue par l'interlocuteur départemental à une date à laquelle elle n'avait pas été informée de ce que le service avait obtenu ces contrats, cette information figurant pour la première fois dans le rapport du 3 juin 2014 destiné à la commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Il résulte, toutefois, de l'instruction que la réalité des prestations rendues par la société Tam Tam Global a été mise en doute dès le stade de la proposition de rectification du 31 juillet 2013, permettant ainsi à la société CA Communication d'apporter tous éléments de nature à établir la réalité des prestations réalisées par la société CA Animation lors de l'interlocution départementale. La société CA Communication Multimédia ne saurait, par suite, soutenir avoir été privée de la garantie prévue par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié.
11. La requérante ne peut, en quatrième et dernier lieu, utilement se prévaloir des énonciations de l'instruction référencée BOI-CF-PGR-30-10 n° 210 et 280 du 12 septembre 2012, qui, relative à la procédure d'imposition, ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale opposable à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ainsi que du paragraphe 11 de la documentation de base référencée 13 L-6-06 en date du 21 septembre 2006, qui est relatif à la procédure d'imposition.
Sur le bien-fondé des impositions :
12. Aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (chez la société Aurea Finance Compagnie) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature ".
13. Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable, ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
14. En vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis. La seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense. Le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration.
15. Il résulte de l'instruction que la société CA Communication a comptabilisé en charges des exercices 2010 et 2011, pour des montants respectifs de 309 110 euros hors taxe et de 271 690 euros hors taxe, des commissions d'apport d'affaires versées à la société de droit luxembourgeois CA Animation en rémunération de missions de recherche d'entreprises clientes qui lui ont été confiées par un contrat d'apport d'affaires signé le 15 janvier 2007, lui-même complété par six avenants signés entre 2007 et 2011 précisant, pour chacun d'entre eux, l'affaire apportée et le montant de la rémunération versée à la société CA Animation. Le service, estimant que ces prestations avaient en réalité été sous-traitées par cette société à la société Tam Tam Global, a remis en cause le caractère déductible de ces commissions dans les charges des exercices 2010 et 2011 de la société CA Communication.
16. Pour contester les rehaussements des bénéfices nets de sa filiale au titre de ces deux exercices résultant de la réintégration de ces commissions, la société requérante, qui fait état de la production de l'ensemble des contrats d'apports d'affaires et des factures relatives aux charges en litige, soutient que l'évolution de son chiffre d'affaires avec les sociétés Franprix et Leaderprice est la conséquence directe des apports d'affaires confiés à la société luxembourgeoise CA Animation. Par cette seule allégation, la société CA Communication Multimédia n'apporte cependant aucun élément précis permettant de justifier la réalité des prestations d'apports d'affaires de la société CA Animation, et de l'existence des contreparties que sa filiale en aurait retirées, alors que l'administration établit que la société Tam Tam Global était la véritable bénéficiaire des règlements de la société CA Communication. Il résulte, en effet, de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 31 juillet 2013, que la société Tam Tam Global, dont le numéro de compte bancaire est le même que celui mentionné sur les factures de la société CA Animation, établissait à l'adresse de cette société des factures identiques à celles que cette dernière adressait à la CA Communication, alors que, d'une part, aucun contrat de sous-traitance n'avait été passé avec la société Tam Tam Global, et que, d'autre part, cette dernière société n'était mentionnée dans aucun des contrats établis avec les clients de la société CA Animation. Alors qu'aucune pièce n'est versée au dossier par la requérante de nature à établir que la société Tam Tam Global disposait des moyens humains et matériels lui permettant d'assurer des apports de clientèle, il résulte d'un courrier électronique daté du 24 juillet 2009, envoyé à l'expert-comptable du groupe par le gérant de la société CA Communication, signataire des factures établies par la société Tam Tam Global et administrateur de la société CA Animation, elle-même détentrice de plus de 50 % du capital de la société requérante, que les sommes facturées au cours de la période vérifiée ne correspondait à l'exécution d'aucune prestation. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause pour ce motif la déduction par la société CA Communication du résultat de ses exercice clos en 2010 et 2011, des charges correspondant aux honoraires facturés par la société CA Animation pour la réalisation de prestations d'apports d'affaires.
Sur les conclusions à fin de décharge des pénalités prévues par l'article 1729 du code général des impôts :
17. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ". Les pénalités pour manoeuvres frauduleuses ont pour objet de sanctionner des agissements destinés à égarer ou à restreindre le pouvoir de contrôle de l'administration, et le recours à des factures fictives est constitutif par lui-même de manoeuvres frauduleuses, de nature à justifier, par application de l'article 1729 du code général des impôts, une majoration de 80 % à raison de ces factures fictives.
18. Il résulte de l'instruction que le service a majoré les droits procédant de la remise en cause de la déduction par la société CA Communication, filiale de la société requérante, des charges correspondant aux apports d'affaires facturés par la société CA Animation, des pénalités pour manoeuvres frauduleuses prévues au c) de l'article 1729 du code général des impôts.
19. Si la société requérante fait valoir qu'elle n'a bénéficié d'aucun débat contradictoire sur l'établissement de ces pénalités lors des opérations de vérification de la comptabilité, en particulier lors de la réunion de synthèse clôturant la vérification de comptabilité, un tel moyen est inopérant, alors qu'en tout état de cause, il ne résulte d'aucune disposition ni d'aucun principe que le service doive évoquer l'établissement de ces pénalités au cours des opérations de contrôle sur place.
20. La requérante ne conteste pas utilement la régularité de la motivation des pénalités pour manquement délibéré en se prévalant des énonciations de l'instruction fiscale BOI-CF-INF-10-20 n° 60 du 12 septembre 2012, dès lors que cette instruction, au demeurant postérieure aux années d'imposition en litige, porte sur la procédure d'imposition dont relève la motivation de la proposition de rectification, et ne porte ainsi pas sur l'interprétation de la loi fiscale au sens des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
21. Il résulte du point 16 que le service établit que la société CA Communication ne pouvait ignorer que les factures émises par la société CA Animation ne correspondaient pas à la réalisation de prestations effectivement exécutées par cette entreprise et qu'elles présentaient un caractère fictif lui permettant de déduire des charges de ses bénéfices imposables au titre des exercices en litige. Eu égard à ces éléments, l'administration établit l'existence de manoeuvres frauduleuses de nature à justifier la majoration de 80 % dont ont été assortis les rehaussements notifiés au titre des exercices clos en 2010 et 2011. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à demander la décharge de cette majoration.
22. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS CA Communication Multimédia n'est pas fondée à demander la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010 et 2011 pour un montant total de 370 398 euros. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1518583 du 28 mars 2017 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la SAS CA Communication Multimédia devant le Tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée CA Communication Multimédia et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction générale des finances publiques, direction de contrôle fiscal Île-de-France (division juridique Est).
Délibéré après l'audience du 8 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme Lescaut, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 décembre 2018.
Le rapporteur,
C. LESCAUTLe président,
S.-L. FORMERYLe greffier,
C. RENÉ-MINE
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA01793