Par un jugement n° 1300020 du 3 avril 2014, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté la demande de la société Balineau.
La société Balineau a également demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, d'une part, d'annuler les décisions tacites du PANC refusant de lui notifier le décompte de résiliation du marché dont le projet lui a été adressé par courrier du 27 juin 2013, notifié le 3 juillet 2013, d'arrêter le décompte de résiliation du marché à la somme de 1 686 063,74 euros HT à son crédit et de condamner le PANC à lui verser cette somme augmentée des intérêts moratoires, d'autre part, de condamner le PANC à lui verser une somme de 2 369 000 euros HT, à parfaire, en réparation de l'ensemble des préjudices résultant de la résiliation du marché, augmentée des intérêts.
Par un jugement n° s 1400129-1400131 du 19 février 2015, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté la demande de la société Balineau.
Par un arrêt n°s 14PA02900, 15PA01975 du 29 avril 2016, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société Balineau contre ces jugements.
Par une décision n°s 391640,391641 du 26 mars 2018, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il se prononce sur le préjudice subi par la société Balineau du fait de la résiliation du marché en litige, à l'exception de la part du préjudice résultant, d'une part, des frais de personnel, de matériel et de consommables supportés par la société après la période de préparation du chantier et avant la résiliation du marché et, d'autre part, de la conservation du matériel postérieurement à cette résiliation, et a, dans cette mesure, renvoyé l'affaire à la Cour.
Procédure devant la Cour :
Par un mémoire, enregistré le 23 juin 2018, le PANC, représenté par Me A...D..., conclut au rejet des requêtes de la société Balineau et à ce que le versement de la somme de 15 000 euros soit mis à la charge de cette société sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la résiliation du marché n'était pas justifiée par un motif d'intérêt général, mais par la nécessité de lancer un nouvel appel à la concurrence ;
- la société Balineau a retrouvé sa place dans le marché des travaux du PANC à l'issue de ce nouvel appel à la concurrence ce qui fait obstacle à l'indemnisation du manque à gagner dont elle demande réparation ;
- par jugement du 27 février 2018, le Tribunal administratif de Nouvelle Calédonie a fait droit partiellement à sa réclamation en lui attribuant une somme de 20 378 729 francs CFP pour l'ensemble de ses prestations pouvant être regardées comme ayant été exécutées (frais de transport, de matériel, de personnel et de consommables liés à la préparation du chantier) et en rejetant toutes ses autres demandes ; la Cour ne peut connaitre de nouveau de ces points relatifs aux prestations regardées comme ayant été exécutées.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 28 août 2018, la société Balineau, représentée par MeB..., demande à la Cour :
1°) de condamner le PANC à lui verser une somme de 282 696 784,75 francs CFP, soit 2 261 574,28 euros, majorée des intérêts moratoires à compter du 10 janvier 2013 avec capitalisation, en réparation des préjudices relatifs au manque à gagner, à la perte d'un crédit d'impôt et à l'absence de couverture de certains frais généraux, et une seconde somme de 318 154 976,80 francs CFP, soit 2 545 239,81 euros, majorée des intérêts moratoires à compter du 18 juillet 2013 avec capitalisation, en réparation des préjudices correspondant aux études d'exécution, aux frais de transport, de matériel, de personnel et de consommables liés à la préparation du chantier ;
2°) de mettre à la charge du PANC le versement de la somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les missions et la rémunération prévues dans le cadre du deuxième marché conclu le 23 juin 2014 avec la société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie n'étaient pas les mêmes que celles prévues par le marché initial du 20 février 2012, résilié ; elle n'a reçu qu'une indemnité de 35 585 196 francs CFP au titre du chiffre d'affaires non réalisé à la suite de la résiliation de son contrat de sous-traitance dans le cadre de ce nouveau marché, ce qui est sans comparaison avec le préjudice subi au titre du premier marché, qui se porte à 282 696 784,75 francs CFP ;
- elle n'a pris aucune part à l'exécution du troisième marché qui a finalement été conclu par le PANC ;
- elle a bien subi un manque à gagner, perdu un crédit d'impôt et supporté des frais généraux qui n'ont été couverts par aucune rémunération, et elle doit donc être indemnisée à ce titre pour un montant de 282 696 784,75 francs CFP, avec intérêts moratoires à compter du 10 janvier 2013 ; ce montant ne pourrait être diminué que de celui de l'indemnité de 35 585 196 francs CFP qu'elle a reçue au titre du chiffre d'affaires non réalisé à la suite de la résiliation de son contrat de sous-traitance dans le cadre du nouveau marché ;
- elle doit également être indemnisée au titre des études d'exécution, des frais de transport, de matériel, de personnel et de consommables liés à la préparation du chantier, à hauteur de 318 154 976,80 francs CFP, avec intérêts moratoires à compter du 18 juillet 2013.
Par trois nouveaux mémoires en défense, enregistrés le 24 octobre, le 5 novembre et le 13 novembre 2018, le PANC conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens. Il ramène à 3 500 euros le montant de la somme qu'il demande sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient en outre que :
- la société Balineau a bénéficié d'une indemnisation de 35 585 196 francs CFP correspondant à un taux de marge de 7% sur les travaux non réalisés, à la suite de la transaction intervenue le 20 juin 2016 entre le PANC et la société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie, dont il produit une copie ;
- la transaction prévoyait également le rachat par le PANC des fournitures de la société Balineau avec le consentement de cette société, et avec un taux de marge de 24 % ; la transaction est donc opposable à la société Balineau selon les dispositions de l'article 1121 du code civil dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie (articles 1205 et 1206 du code civil) ;
- outre cette somme, elle s'est vue attribuer un montant total de 892 027 700 francs CFP à raison des travaux qu'elle a réalisés en sous-traitance dans le cadre du deuxième marché, avant la résiliation ;
- contrairement à ce qu'elle soutient, ces travaux étaient les mêmes que ceux prévus dans le cadre du premier marché, résilié auparavant ; seule la réalisation de la poutre de couronnement du quai lui a été retirée pour être confiée à la société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie ;
- le remboursement du coût des dépenses réellement effectuées dans le cadre du premier marché lui a été accordé par le jugement du Tribunal administratif de Nouvelle Calédonie du 27 février 2018 ; elle ne peut demander une seconde fois le paiement de ces sommes ;
- elle ne justifie pas du coefficient de marge de 10 % utilisé pour calculer le manque à gagner dont elle demande à être indemnisée ;
- la réalité des préjudices correspondant à la perte du crédit d'impôt, aux frais de repli du matériel et à l'absence de couverture de certains autres frais généraux n'est pas établie.
Par deux mémoires en réplique, enregistrés le 26 octobre et le 19 novembre 2018, la société Balineau conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, par les mêmes moyens.
Elle soutient en outre que :
- l'indemnisation de 35 585 196 francs CFP dont elle a bénéficié ne lui a pas été versée en conséquence de la transaction intervenue entre le PANC et la société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie ; elle n'a, contrairement à ce que soutient le PANC, pas mandaté la société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie pour négocier en son nom ; la transaction ne lui est pas opposable ;
- le bénéfice qu'elle a retiré des travaux réalisés en sous-traitance dans le cadre du deuxième marché s'est, compte tenu de son taux de marge brute de 15 % et de ses frais généraux représentant 13,4 % du montant reçu de 892 027 700 francs CFP, limité à 14 272 443 francs CFP.
Par une ordonnance du 5 novembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 novembre 2018.
II. Sur la requête N° 18PA01437 :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Balineau a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie :
1°) d'annuler la décision implicite de rejet, née le 7 juin 2017 du silence gardé par le Port autonome de Nouvelle-Calédonie (PANC) sur la demande de notification d'un décompte général qu'elle avait présentée le 23 mars 2017 et qui avait été reçue par le port le 7 avril 2017 ;
2°) de condamner le PANC à lui verser une somme de 282 696 784,75 francs CFP, majorée des intérêts moratoires à compter du 10 janvier 2013, en réparation des préjudices résultant de la résiliation, et une seconde somme de 318 154 976,80 F CFP, majorée des intérêts moratoires à compter du 18 juillet 2013, en remboursement du coût des prestations déjà exécutées au moment de la résiliation du marché ;
3°) de prononcer la capitalisation de l'ensemble des intérêts dus depuis au moins une année entière.
Par un jugement n° 1700259 du 27 février 2018, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a partiellement fait droit à la demande de la société Balineau en condamnant le PANC à lui verser une somme de 20 378 729 francs CFP HT, augmentée des intérêts moratoires à compter de l'expiration d'un délai de trente jours après la notification du jugement.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 27 avril 2018, la société Balineau, représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 27 février 2018 en ce qu'il a pour partie rejeté sa demande ;
2°) de condamner le PANC à lui verser, outre l'indemnité accordée par ce jugement, une somme de 282 696 784,75 francs CFP, soit 2 261 574,28 euros, majorée des intérêts moratoires à compter du 10 janvier 2013, en réparation des préjudices relatifs au manque à gagner, à la perte d'un crédit d'impôt et à l'absence de couverture de certains frais généraux, et une seconde somme de 297 776 247,80 francs CFP, soit 2 495 364,96 euros, majorée des intérêts moratoires à compter du 18 juillet 2013, en réparation des préjudices correspondant aux études d'exécution, aux frais de transport, de matériel, de personnel et de consommables liés à la préparation du chantier ;
3°) de décider que les intérêts moratoires sur l'indemnité accordée par le jugement du tribunal administratif courront à compter du 18 juillet 2013 ;
4°) de prononcer la capitalisation de l'ensemble des intérêts dus depuis au moins une année entière ;
5°) de mettre à la charge du PANC le versement de la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les missions et la rémunération prévues dans le cadre du deuxième marché conclu le 23 juin 2014, avec la société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie n'étaient pas les mêmes que celles prévues par le marché initial du 20 février 2012, résilié ; elle n'a reçu qu'une indemnité de 35 585 196 francs CFP au titre du chiffre d'affaires non réalisé à la suite de la résiliation de son contrat de sous-traitance dans le cadre du nouveau marché, ce qui est sans comparaison avec le préjudice subi au titre du premier marché, qui se porte à 282 696 784,75 francs CFP ;
- elle n'est pas intervenue dans le cadre du troisième marché ;
- la transaction conclue en juin 2016 entre le PANC et la société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie afin de régler les conséquences de la résiliation du second marché ne peut avoir eu pour effet d'indemniser le manque à gagner pour les sous-traitants qui n'y sont pas parties ;
- elle a bien subi un manque à gagner, perdu un crédit d'impôt et supporté des frais généraux qui n'ont été couverts par aucune rémunération, et elle doit donc être indemnisée à ce titre pour un montant de 282 696 784,75 francs CFP, avec intérêts moratoires à compter du 10 janvier 2013 ; ce montant ne pourrait être diminué que de celui de l'indemnité de 35 585 196 francs CFP qu'elle a reçue au titre du chiffre d'affaires non réalisé à la suite de la résiliation de son contrat de sous-traitance dans le cadre du nouveau marché ;
- elle doit également être indemnisée au titre des études d'exécution, des frais de transport, de matériel, de personnel et de consommables liés à la préparation du chantier, ce qui doit conduire à lui accorder une indemnité complémentaire de 297 776 247,80 francs CFP au titre des frais liés à la préparation du chantier ;
- ces deux séries de sommes doivent, comme l'indemnité accordée par le tribunal administratif, être assorties des intérêts moratoires à compter du 10 janvier et du 18 juillet 2013 ; ces intérêts doivent être capitalisés ;
- les premiers juges ne pouvaient régulièrement se fonder sur les débats à l'audience publique pour estimer qu'une partie des études d'exécution déjà réalisées avait été réutilisée dans le cadre du nouveau marché.
Par trois mémoires en défense, enregistrés le 11 octobre, le 5 novembre et le 13 novembre 2018, le PANC, représenté par Me A...D..., conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 3 500 euros soit mis à la charge de la société Balineau sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par deux mémoires en réplique, enregistrés le 19 octobre et le 19 novembre 2018, la société Balineau conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.
Elle soutient en outre que :
- l'indemnisation de 35 585 196 francs CFP dont elle a bénéficié ne lui a pas été versée en conséquence de la transaction intervenue entre le PANC et la société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie ; elle n'a, contrairement à ce que soutient le PANC, pas mandaté la société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie pour négocier en son nom ; la transaction ne lui est pas opposable ;
- le bénéfice qu'elle a retiré des travaux réalisés en sous-traitance dans le cadre du deuxième marché s'est, compte tenu de son taux de marge brute de 15 % et de ses frais généraux représentant 13,4 % du montant reçu de 892 027 700 francs CFP, limité à 14 272 443 francs CFP.
Par une ordonnance du 5 novembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 novembre 2018.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999 ;
- la délibération du congrès de la Nouvelle-Calédonie n° 136/CP du 1er mars 1967 portant réglementation des marchés publics ;
- la délibération du congrès de la Nouvelle-Calédonie n° 64/CP du 10 mai 1989 ;
- le code de justice administrative dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- les observations de MeB..., pour la société Balineau,
- et les observations de MeC..., pour le Port autonome de Nouvelle-Calédonie.
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 20 février 2012, le Port autonome de Nouvelle-Calédonie (PANC) a confié les quatre lots du marché public de travaux n° 3530-50/P, relatif à la construction du poste 8 en prolongement du grand quai du port de Nouméa, à un groupement conjoint dont la société Balineau était membre, pour un montant de 2 720 637 853 francs CFP HT ; qu'à la suite de la défaillance des sociétés IRNC et ETB, membres de ce groupement, le tribunal mixte de commerce de Nouméa a constaté, par deux ordonnances du 14 septembre 2012, la résiliation des parties du marché dont avaient la charge ces deux sociétés ; que, par un ordre de service du 8 novembre 2012, le directeur du PANC a notifié au groupement la résiliation du reste du marché ; que la société Balineau a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler cette résiliation et d'ordonner la reprise des relations contractuelles et, à titre subsidiaire, de condamner le PANC à lui verser diverses sommes au titre du décompte de résiliation et de l'ensemble des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait de cette résiliation ; que, par deux jugements du 3 avril 2014 et du 19 février 2015, le tribunal administratif a rejeté ces demandes ; que, par un arrêt du 29 avril 2016, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société contre ces jugements ; que, par une décision du 26 mars 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt en tant qu'il se prononce sur le préjudice subi par la société Balineau du fait de la résiliation du marché en litige, à l'exception de la part du préjudice résultant, d'une part, des frais de personnel, de matériel et de consommables supportés par la société après la période de préparation du chantier et avant la résiliation du marché et, d'autre part, de la conservation du matériel postérieurement à cette résiliation, et a, dans cette mesure, renvoyé l'affaire à la Cour ; que, dans le dernier état de ses écritures, la société Balineau demande à la Cour de condamner le PANC à lui verser une première somme de 282 696 784,75 francs CFP en réparation des préjudices relatifs au manque à gagner, à la perte d'un crédit d'impôt et à l'absence de couverture de certains frais généraux, et une seconde somme de 318 154 976,80 francs CFP en réparation des préjudices correspondant aux études d'exécution, aux frais de transport, de matériel, de personnel et de consommables liés à la préparation du chantier ;
2. Considérant que la société Balineau a, sans attendre l'issue de son pourvoi, transmis le 15 décembre 2016 au PANC un nouveau projet de décompte final dans lequel les frais d'installation ont été calculés par référence aux montants forfaitaires prévus par le bordereau de prix unitaires, avant d'adresser au port un courrier en date du 23 mars 2017, reçu le 7 avril 2017, pour le mettre en demeure de lui notifier le décompte général du marché ; qu'en l'absence de réponse du PANC, la société a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner le PANC à lui verser les sommes de 282 696 784,75 francs CFP et de 318 154 976,80 francs CFP mentionnées ci-dessus ; que, par un jugement du 27 février 2018, le tribunal administratif a partiellement fait droit à la demande de la société Balineau en condamnant le PANC à lui verser une somme de 20 378 729 francs CFP HT, augmentée des intérêts moratoires à compter de l'expiration d'un délai de trente jours après la notification du jugement ; que, par sa requête n° 18PA01437, la société Balineau fait appel de ce jugement en ce qu'il a pour partie rejeté sa demande ;
3. Considérant que les conclusions de la société Balineau enregistrées sous le n° 18PA01148 et les conclusions de sa requête n° 18PA01437 présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la régularité du jugement du 27 février 2018 :
4. Considérant qu'il ressort du jugement du 27 février 2018 que, pour rejeter les conclusions de la société Balineau tendant à obtenir une indemnisation à raison des études d'exécution réalisées dans le cadre du marché initial, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a relevé que ces études d'exécution n'avaient été réalisées que " à hauteur de 60 % ", et s'est fondé sur les dispositions de l'article 10.2 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux annexé à la délibération n° 64/CP du 10 mai 1989, en estimant que, l'ensemble des prestations n'ayant ainsi pas été exécuté, aucun prix n'était du ; qu'il a également relevé qu'il résultait " de surcroit " des débats à l'audience publique que la partie des études d'exécution déjà réalisée avait été réutilisée dans le cadre du nouveau marché ; que le jugement s'étant fondé de manière superfétatoire sur les débats à l'audience publique, la société Balineau ne peut utilement contester la régularité de ce jugement en soutenant que les premiers juges se seraient fondés sur des éléments invoqués lors de l'audience publique ;
Sur les préjudices relatifs au manque à gagner, à la perte du crédit d'impôt et à l'absence de couverture des frais généraux :
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la résiliation du marché n° 3530-50/P, le PANC a conclu un nouveau marché n° 3530-241/P, le 23 juin 2014, avec la société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie, en acceptant et en agréant la société Balineau en tant que sous-traitant pour un montant de 1 669 385 953 francs CFP ; qu'ainsi que la Cour l'a jugé dans son arrêt du 29 avril 2016, les prestations confiées à la société Balineau dans le cadre de ce nouveau marché, en qualité de sous-traitant, étaient, pour l'essentiel, identiques à celles qui lui avaient été attribuées pour un montant de 1 604 881 303 francs CFP dans le cadre du marché initial résilié ; qu'en se bornant à faire état de la poutre de couronnement du quai qui lui était confiée dans le marché initial, et qui a été laissée à la charge de la seule société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie dans le cadre du nouveau marché, la société Balineau n'établit pas que le bénéfice qu'elle était susceptible de réaliser dans le cadre du nouveau marché, aurait été minoré par rapport à celui qu'elle avait évalué pour le marché initial, ni qu'elle aurait définitivement perdu le crédit d'impôt qui aurait été attaché aux investissements réalisés, ni enfin que ces nouvelles prestations ne lui auraient pas permis de couvrir ses frais généraux ;
6. Considérant que, si la Cour a, par un arrêt du 25 mars 2016, prononcé la résiliation du nouveau marché, conclu le 23 juin 2014, la société Balineau ne conteste pas avoir, à la date de cette résiliation, été payée des travaux qui lui avaient été attribués en qualité de sous-traitant, à hauteur de 892 027 700 francs CFP ; qu'il résulte en outre de l'instruction qu'une transaction a été conclue en juin 2016, entre le PANC et la société Dumez-GTM-Nouvelle-Calédonie afin de régler les conséquences de cette résiliation et d'indemniser le manque à gagner pour les membres du nouveau groupement ainsi que pour les sous-traitants, et que, même si elle soutient n'avoir pas été partie à cette transaction, la société Balineau reconnait avoir reçu de la société Dumez-GTM-Calédonie une indemnité de 35 585 196 francs CFP à la suite de la résiliation de son contrat de sous-traitance ; que la société Balineau ne démontre pas que la marge réalisée sur les travaux payés à hauteur de 892 027 700 francs CFP HT, compte tenu du taux de marge brute qu'elle escomptait du premier marché, mentionné dans ses écritures, et l'indemnisation de 35 585 196 francs CFP qu'elle admet avoir reçue, n'auraient pas compensé en intégralité le manque à gagner dont elle demande réparation du fait de la résiliation du marché initial (n° 3530-50/P) ; que, dans ces conditions, en l'absence de tout commencement de preuve de nature à démontrer que les retombées positives de la résiliation du marché initial (n° 3530-50/P) pour la société Balineau, n'auraient pas compensé en intégralité les préjudices dont elle demande réparation, ses conclusions aux fins d'indemnisation des préjudices relatifs au manque à gagner, à la perte d'un crédit d'impôt et à l'absence de couverture de ses frais généraux ne peuvent qu'être rejetées ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Balineau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par ses jugements des 3 avril 2014, 19 février 2015 et 27 février 2018, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté ses conclusions tendant à l'indemnisation des préjudices mentionnés ci-dessus ;
Sur les préjudices correspondant aux études d'exécution, aux frais de transport, de matériel, de personnel et de consommables liés à la préparation du chantier :
8. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 10.2 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux annexé à la délibération n° 64/CP du 10 mai 1989 susvisée : " 11.2. Travaux à l'entreprise : (...) 11.22. Dans le cas d'application d'un prix forfaitaire, le prix est dû dès lors que l'ouvrage, la partie d'ouvrage ou l'ensemble de prestations auquel il se rapporte a été exécuté ; (...) " ; que l'article 13.13 du même cahier prévoit cependant que les prix forfaitaires peuvent être fractionnés " si l'ouvrage ou la partie d'ouvrage auquel le prix se rapporte n'est pas terminé ; il est alors compté une fraction de prix égale au pourcentage d'exécution de l'ouvrage ou de la partie d'ouvrage (...) " ; que le PANC ne conteste pas que les études d'exécution du marché initial ont été réalisées par la société Balineau à hauteur de 60 % ; que, si la société Balineau a pu se servir des mêmes études pour l'exécution des travaux du second marché, elle soutient sans être contredite, avoir d'elle-même réduit de moitié le prix des études lui incombant dans le cadre du second marché pour tenir compte de la partie des études déjà réalisée ; qu'elle est donc fondée à demander à être indemnisée de ces études, évaluées selon le bordereau de prix unitaires à un forfait de 26 252 983 francs CFP HT, dans la proportion de 60 %, soit à hauteur de 15 751 790 francs CFP HT ;
9. Considérant, en second lieu, que, si la société Balineau établit en se référant aux comptes-rendus de chantier n° 24 et 25 des 17 et 28 août 2012, avoir apporté sur le chantier plusieurs grues, des pontons, une barge de liaison, de l'outillage, une cuve à gasoil et deux containers, ce qui a conduit le tribunal administratif à lui accorder l'intégralité du prix forfaitaire prévu pour le poste 1-2 du lot n° 1 (" Installation de chantier ") soit 19 782 070 francs CFP HT, cette circonstance n'établit pas qu'elle aurait réalisé l'atelier maritime sur barge et les autres installations nécessaires à l'exécution des travaux de fondations profondes, relevant du poste 2-1 du même lot (" Installation, y compris atelier maritime sur barge "), correspondant à un forfait de 406 921 240 francs CFP HT ; qu'en effet, ainsi que le tribunal administratif l'a relevé, elle ne précise pas quelles étaient les installations et matériels qu'elle a fait venir de métropole, qui étaient spécifiquement destinés à l'exécution des travaux de fondations profondes et qui n'ont ainsi pas été indemnisés au titre d'un autre poste ; que dans ces conditions, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant au règlement de ces prestations par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Balineau est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a, à hauteur de la somme de 15 751 790 francs CFP HT mentionnée ci-dessus, rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation ;
Sur les intérêts moratoires et les intérêts des intérêts :
11. Considérant que, la société Balineau ayant transmis le projet de décompte final du groupement titulaire du marché résilié, au PANC le 9 janvier 2014, le décompte général devait selon les articles 13.42 à 13.44, du CCAG Travaux de Nouvelle-Calédonie lui être notifié au plus tard le 8 février 2014 ; que le retard dans l'établissement du solde du marché ne lui est pas imputable ; qu'elle est donc fondée à soutenir que les intérêts moratoires sur la somme de 20 378 729 francs CFP HT que le tribunal administratif a, par son jugement du 27 février 2018, condamné le PANC à lui verser, et sur la somme de 15 751 790 francs CFP HT mentionnée ci-dessus, lui sont dus à compter de cette date ;
12. Considérant en outre que la capitalisation des intérêts a été demandée par la société Balineau pour la première fois dans sa requête d'appel n° 15PA01975, enregistrée le 18 mai 2015 ; qu'à cette date, il était du plus d'une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil applicable en Nouvelle-Calédonie, il y a lieu de faire droit à sa demande ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions de la société Balineau et du PANC présentées sur le fondement de ces dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le montant de la somme que le jugement n° 1700259 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 27 février 2018, a condamné le Port autonome de Nouvelle-Calédonie à verser à la société Balineau, est porté à 36 130 519 francs CFP.
Article 2 : La somme de 36 130 519 francs CFP mentionnée à l'article 1er portera intérêts au taux légal à compter du 8 février 2014. Les intérêts échus à la date du 18 mai 2015 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le jugement n° 1700259 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 27 février 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la société Balineau enregistrées sous le n° 18PA01148 et des conclusions de sa requête n° 18PA01437 est rejeté.
Article 5 : Les conclusions présentées par le Port autonome de Nouvelle-Calédonie sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Balineau et au Port autonome de Nouvelle-Calédonie.
Copie en sera transmise au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Labetoulle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 décembre 2018.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P.TISSERAND
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°s 18APA01148, 18PA01437