Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 14 juin 2021, M. B..., représenté par Me Essono Nguema, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris du 17 mai 2021 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du ministre de l'intérieur mentionnée ci-dessus ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer un sauf-conduit pour lui permettre d'introduire sa demande d'asile ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué a été rendu en violation des droits de la défense, et en violation du principe d'égalité par rapport aux autres requérants ;
- il a été rendu irrégulièrement en dehors du délai de 72 heures prévu à l'article L. 352-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'entretien avec l'officier de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides s'est déroulé dans des conditions irrégulières, sans qu'il n'y ait été préparé, sans l'assistance d'un avocat ou d'une association de soutien et sans que, compte tenu du " registre de langage " de cet entretien, certains éléments importants de son histoire personnelle ne puissent être abordés ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant au caractère " manifestement infondé " de sa demande d'asile.
Une mise en demeure a été adressée le 13 août 2021 au ministre de l'intérieur.
Par une ordonnance du 8 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au
23 septembre 2021.
Un mémoire en défense a été produit pour le ministre de l'intérieur le 5 octobre 2021, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet,
- et les observations de Me Dussault pour le ministre de l'intérieur.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant ivoirien né le 15 novembre 1997, a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 10 mai 2021 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé son admission sur le territoire au titre de l'asile. Il fait appel du jugement du
17 mai 2021 par lequel le magistrat désigné par le Président du tribunal administratif a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 352-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision de refuser l'entrée en France à un étranger qui se présente à la frontière et demande à bénéficier du droit d'asile ne peut être prise que dans les cas suivants : / 1° L'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par ce règlement avec d'autres Etats ;2° La demande d'asile est irrecevable en application de l'article L. 531-32 ; / 3° La demande d'asile est manifestement infondée. / Constitue une demande d'asile manifestement infondée une demande qui, au regard des déclarations faites par l'étranger et des documents le cas échéant produits, est manifestement dénuée de pertinence au regard des conditions d'octroi de l'asile ou manifestement dépourvue de toute crédibilité en ce qui concerne le risque de persécutions ou d'atteintes graves ". Aux termes de l'article L. 352-4 de ce code : " L'étranger qui a fait l'objet d'un refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile et, le cas échéant, d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 572-1 peut, dans les quarante-huit heures suivant la notification de ces décisions, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. Aucun autre recours ne peut être introduit contre la décision de refus d'entrée au titre de l'asile et, le cas échéant, contre la décision de transfert. / Le président, ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative, statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine. / L'étranger peut demander au président du tribunal ou au magistrat désigné à cette fin le concours d'un interprète. L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président ou au magistrat désigné à cette fin qu'il lui en soit désigné un d'office ".
3. En premier lieu, si M. B... fait valoir qu'il n'a pu assister à l'audience qui s'est tenue devant le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris, faute d'avoir pu présenter un " test PCR négatif ", ainsi que l'exigeait l'avis d'audience, alors qu'il ne présentait aucun symptôme du Covid, et avait déjà eu l'occasion de produire un tel test le
5 mai 2021 lorsqu'il était arrivé en France en provenance de Grèce, il ne conteste pas avoir été représenté à cette audience par son avocat. Il n'est donc en tout état de cause pas fondé à soutenir que le jugement attaqué aurait été rendu en violation des droits de la défense. Il ne saurait utilement faire état d'une discrimination par rapport aux autres requérants présents à la même audience.
4. En second lieu, si, en application l'article L. 352-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative, statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine, ce délai n'est pas prescrit à peine de nullité ou de dessaisissement. La circonstance que le jugement attaqué est intervenu plus de soixante-douze heures après la saisine du tribunal administratif est donc en tout état de cause sans influence sur sa régularité.
Sur le bienfondé du jugement attaqué :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 352-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf dans le cas où l'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat, la décision de refus d'entrée ne peut être prise qu'après consultation de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui rend son avis dans un délai fixé par voie réglementaire et dans le respect des garanties procédurales prévues au titre III du livre V. L'office tient compte de la vulnérabilité du demandeur d'asile. / L'avocat ou le représentant d'une des associations mentionnées à l'article L. 531-15, désigné par l'étranger, est autorisé à pénétrer dans la zone d'attente pour l'accompagner à son entretien dans les conditions prévues au même article. / Sauf si l'accès de l'étranger au territoire français constitue une menace grave pour l'ordre public, l'avis de l'office, s'il est favorable à l'entrée en France de l'intéressé au titre de l'asile, lie le ministre chargé de l'immigration ". Aux termes de l'article R. 351-1 de ce code : " Lorsque l'étranger qui se présente à la frontière demande à bénéficier du droit d'asile, il est informé sans délai, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend, de la procédure de demande d'asile et de son déroulement, de ses droits et obligations au cours de cette procédure, des conséquences que pourrait avoir le non-respect de ses obligations ou le refus de coopérer avec les autorités et des moyens dont il dispose pour l'aider à présenter sa demande (...) ".
6. M. B... qui ne conteste pas avoir été informé conformément aux dispositions citées ci-dessus de l'article R. 351-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la procédure de demande d'asile, de son déroulement et de ses droits et obligations au cours de cette procédure, par un procès-verbal établi le samedi 8 mai 2021 à 10 h 52, et qui ne conteste pas davantage maitriser le français, n'est pas fondé à se plaindre de l'absence d'un Conseil pendant l'entretien qu'il a eu avec un agent de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le lundi 10 mai à 9 h 00, de n'avoir pas reçu de préparation avant cet entretien et du " registre de langage " de ce même entretien qui ne lui aurait pas permis d'aborder certains aspects de son histoire personnelle.
7. En second lieu, le moyen tiré d'une erreur d'appréciation doit, en l'absence de tout élément nouveau produit en appel, être écarté par adoption des motifs retenus par le premier juge.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 5 octobre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Labetoulle, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 octobre 2021.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLe président,
T. CELERIER
La greffière,
K. PETIT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA03273