Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée par télécopie le 20 avril 2016, M.A..., représenté par M. B... C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 avril 2016 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 4 décembre 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le préfet de police a méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifiait de dix ans de présence en France et que la commission du titre de séjour aurait du dès lors être saisie ;
- il justifiait de motifs exceptionnels au sens de ces dispositions ;
- l'arrêté attaqué a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Labetoulle a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. D...A..., ressortissant chinois né le 17 mars 1989 à Shandong, est entré en France en 2004 selon ses déclarations ; qu'il a sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 4 décembre 2015, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé la Chine comme pays de destination ; qu'il fait appel du jugement du 15 avril 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté son recours pour excès de pouvoir introduit contre cet arrêté ;
Sur le bien-fondé du jugement :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans" ;
3. Considérant que le préfet de police ne conteste la présence en France de M. A... que pour les années 2007, 2008 et 2010 ; que pour l'année 2007 le requérant produit un certificat de scolarité en classe de CAP 2, ses bulletins scolaires pour les deux premiers trimestres révélant des excellentes appréciations de son travail par ses professeurs, ainsi qu'un certificat de prévention des risques liés à l'activité physique en date du 1er juin 2007 ; que pour l'année 2008 il produit son relevé de notes à son CAP pour la session de juin 2008 dont il ressort qu'il a été admis à cette session, son bulletin du premier trimestre de l'année scolaire 2008-2009 au lycée professionnel Marcel-Deprez, son certificat de scolarité en classe de TERBEP , ainsi que l'acte de décès de son père le 5 septembre 2008 à Paris accompagné de la facture des pompes funèbres qui lui est adressée à son nom, un courrier bancaire du 2 décembre 2008, une attestation d'aide médicale d'Etat, deux transferts de fonds Western Union de Chine vers la France en date des 17 et 26 septembre 2008, le justificatif d'un colissimo en provenance de Chine en date du 7 octobre 2008 et une lettre de l'équipe enseignante pour l'aide au titre de sa régularisation en date du 10 novembre 2008 ; que de tels documents, compte tenu de leur nombre et de leur diversité, suffisent à justifier de la présence habituelle de l'intéressé en France en 2007 et 2008 ; que pour l'année 2010, la seule pour laquelle le tribunal a jugé que le requérant n'établissait pas la réalité de sa présence en France, M. A...produit des pièces relatives à sa scolarité pour la période de janvier à mars, une pétition de soutien signée par ses camarades de lycée et par ses professeurs, une attestation du gestionnaire du lycée Marcel Deprez du 12 janvier, un courrier de l'assurance maladie du 2 mars, un certificat de scolarité délivré en septembre, ainsi qu'une attestation de l'infirmière du lycée du 20 septembre ; qu'alors même qu'aucun document n'est produit pour les mois d'octobre à décembre 2010 les pièces produites suffisent à justifier de sa présence en France au cours de cette année ; qu'ainsi, à la date à laquelle a été pris l'arrêté prononçant sa reconduite à la frontière, M. A...justifiait résider habituellement en France depuis plus de dix ans ; que si cette circonstance ne suffit pas à constituer un motif exceptionnel ou une considération humanitaire au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le requérant est en revanche fondé à soutenir que le préfet de police était tenu de soumettre sa demande à la commission du titre de séjour en application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il est par suite fondé à demander l'annulation de l'arrêté attaqué ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 décembre 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé la Chine comme pays de destination ;
Sur les conclusions aux fins d'astreinte :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution." ;
6. Considérant que le présent arrêt, qui annule l'arrêté du préfet de police du 4 décembre 2015 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, implique seulement, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que l'autorité compétente examine à nouveau la demande de titre de séjour de M. A...; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de procéder à un nouvel examen de la demande de titre de séjour de M. A... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à M. A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1521300/2-3 du Tribunal administratif de Paris du 15 avril 2016 et l'arrêté du préfet de police du 4 décembre 2015 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de se prononcer à nouveau sur la demande de titre de séjour de M. A...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 14 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau , président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Labetoulle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 mars 2017.
Le rapporteur,
M-I. LABETOULLE Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
T. ROBERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 16PA01359 4