Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 2 avril 2021, M. B..., représenté par Me Ormillien, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2019253/3-3 du 16 mars 2021 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2020 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation administrative dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce que le préfet de police s'est abstenu de saisir la commission du titre de séjour ;
- il méconnaît les mêmes dispositions en ce que le requérant justifie de motifs exceptionnels concernant l'admission au séjour ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Hamon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant égyptien né le 14 mars 1974, est entré en France en 2007 selon ses déclarations. Il a sollicité le 25 octobre 2019 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-14 et L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 23 octobre 2020, le préfet de police lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour son éloignement M. B... fait appel du jugement du 16 mars 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. L'arrêté contesté vise les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que l'ensemble des articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables à sa situation, notamment l'article L. 313-14. Il indique que M. B... n'est pas en mesure d'attester d'une ancienneté de résidence en France de plus de dix ans, et qu'il ne justifie pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour. L'arrêté précise également que M. B... ne produit aucun contrat de travail à l'appui de sa demande, et qu'un tel contrat ne saurait en tout état de cause constituer en lui-même un motif exceptionnel d'admission au séjour. Il indique enfin que M. B... ne remplit pas les conditions du 7° de l'article L. 313-11 du même code, et qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cette décision comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. ".
5. Si M. B... soutient résider en France depuis 2007, il ne produit, au titre de l'année 2011, aucun élément concernant la période allant du mois de mars au mois de septembre, et se borne à produire pour cette année un courrier d'Électricité Réseau Distribution France (ERDF) du 26 janvier 2011, un courrier de la Banque Postale du 3 octobre 2011, une carte individuelle d'admission à l'aide médicale d'État valable à compter du 22 octobre 2011, un courrier de Numéricable du 13 décembre 2011, faisant au demeurant mention d'un départ à l'étranger, et des prescriptions médicales du même mois. Au titre de l'année 2012, M. B... ne produit aucun document antérieur au 23 mai 2012. Dans ces conditions, M. B... ne justifie pas avoir résidé habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée, et le préfet de police n'était dès lors pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de se prononcer sur sa demande d'admission au séjour. Par suite, le moyen doit être écarté.
6. En troisième lieu, il résulte des dispositions précitées que l'article L. 313-14 permet la délivrance de deux titres de séjour de nature différente que sont, d'une part, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et, d'autre part, la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". En présence d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner tout élément de situation professionnelle et personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande.
7. En l'espèce, pour solliciter son admission exceptionnelle au séjour, M. B... se prévaut de l'ancienneté de sa résidence en France depuis 2007 et produit deux promesses d'embauche, datées du 25 janvier 2019 et du 10 novembre 2020, pour des emplois de plaquiste et de maçon. Il ressort cependant des éléments rappelés au point 5 que l'ancienneté de la résidence en France depuis 2007 de M. B... n'est pas établie. En outre, les deux promesses d'embauche produites, dont l'une est postérieure à la date d'édiction de l'arrêté contesté, ne sauraient à elles seules constituer un motif d'admission exceptionnelle au séjour. Il ne ressort dès lors pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait entaché l'arrêté contesté d'une violation des dispositions de l'article L. 313-14 précité.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
9. Si M. B... soutient que l'arrêté porte atteinte à sa vie privée et familiale, en ce qu'il réside habituellement en France depuis 2007 avec sa femme et son enfant, le requérant n'établit cependant pas la réalité de cette résidence, ni la présence en France de son fils, né en Égypte, avant l'année 2018. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que M. B... serait dépourvu de toute attache en Égypte, ni qu'il serait impossible de reconstituer la cellule familiale dans ce pays, où est né son enfant. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par rapport aux buts poursuivis, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er: La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 11 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente assesseure,
- Mme Jurin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2022.
La rapporteure,
P. HAMONLe président,
C. JARDIN
La greffière,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA01753 2