Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2019, la société Elle est au top, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1819690/2-1 du 1er octobre 2019 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge de cette imposition.
Elle soutient que :
- la proposition de rectification du 10 juillet 2015, en sa partie relative au rehaussement relatif au passif injustifié au titre de l'exercice clos en 2012, est insuffisamment motivée ;
- l'administration fiscale a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales dès lors qu'elle ne mentionne pas, dans la proposition de rectification du 10 juillet 2015, l'origine de l'information relative au passif injustifié ;
- c'est à tort que l'administration fiscale a estimé qu'elle avait bénéficié d'un abandon de créance à hauteur de 72 000 euros, l'écriture comptable ayant été passée en raison d'une erreur commise de bonne foi ;
- la majoration pour manquement délibéré n'est pas suffisamment motivée ;
- elle n'est pas justifiée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juin 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la société Elle est au top n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,
- et le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société Elle est au top, qui exerce une activité de conseil en affaires et en gestion, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2013, à l'issue de laquelle des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés ont été mises à sa charge au titre de l'exercice clos en 2012. Elle relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de décharge de cette imposition, en droits et pénalités.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. [...] ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée [...] ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations.
3. La société Elle est au top soutient que la proposition de rectification du 10 juillet 2015, en sa partie relative au rehaussement relatif au passif injustifié au titre de l'exercice clos en 2012, serait insuffisamment motivée. Or, la proposition de rectification, après avoir visé et cité le 2 de l'article 38 du code général des impôts, relève, que, " en date du 3/05/2012, une somme de 40 000 euros a été apportée au compte courant de M. D... B... ", que " cet apport n'a pas été effectué par l'associé attributaire du compte courant ", qu' " il a été relevé que le mouvement financier provenait de la société SARL Elle est au Bureau " et que " dès lors, l'inscription d'une dette au passif du compte courant de Guy David B... est considérée comme un passif injustifié ". Ainsi, l'administration fiscale doit être regardée comme ayant suffisamment motivé ce chef de rectification. Par suite, le moyen doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".
5. Si la société Elle est au top soutient que l'administration aurait méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales dès lors qu'elle ne mentionnerait pas, dans la proposition de rectification du 10 juillet 2015, l'origine de l'information relative au passif injustifié, il ne résulte pas de l'instruction que cette information aurait été obtenue d'un tiers, l'administration fiscale faisant valoir, sans être contestée, que cette information provient des documents présentés par la société elle-même au cours des opérations de vérification. Par suite, le moyen doit être écarté.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
6. En premier lieu, la société Elle est au top conteste la réintégration dans l'assiette de ses bénéfices imposables de l'exercice clos en 2012 d'une somme de 72 000 euros, correspondant au montant d'une créance antérieurement détenue par M. B... sur la société et qui avait été présentée comme transférée par ce dernier au bénéfice de la société Elle est belle. Il appartenait à la société de justifier du bien-fondé de l'écriture de crédit des comptes de la société Elle est belle qui a constitué dans sa comptabilité la contrepartie du constat de l'extinction de la dette qu'elle avait à l'égard de M. B.... Toutefois, si la société a produit, dans le cadre de sa vérification de comptabilité, un contrat de cession de créance datée du 27 décembre 2012 établi entre M. B... et la société Elle est belle, dont l'article 4 mentionne l'acceptation d'une cession de créance et son paiement par inscription d'une telle somme au nom de M. B... dans les comptes de la société Elle est belle, ce contrat, qui n'a pas été enregistré, et n'a donc pas de date certaine, ne permet pas d'établir que les écritures en cause caractériseraient un transfert au profit de cette société et non un abandon par M. B... de la créance qu'il détenait sur la société Elle est au top. La société, qui admet, dans ses écritures d'appel, que le transfert de créance n'a pas été effectué, ne produit aucun autre élément permettant d'établir que les écritures en cause caractériseraient un transfert au profit de cette société et non un abandon par M. B... de la créance qu'il détenait sur la société Elle est au top. Enfin, la société Elle est au top, en se bornant à soutenir que le transfert de créance prévu initialement n'a pu être réalisé, n'établit pas que l'inscription comptable en cause procèderait d'une erreur comptable involontaire devant faire l'objet d'une correction, alors que, ainsi qu'il a été dit précédemment, elle avait, dans le cadre de sa vérification de comptabilité, produit un contrat de cession aux fins d'établir la réalité du transfert de créance. Par ailleurs, la circonstance que l'administration fiscale n'a pas appliqué la majoration pour manquement délibéré prévue par le a de l'article 1729 du code général des impôts à ce chef de rectification est sans incidence sur l'appréciation qui doit être faite sur le caractère délibéré de l'erreur comptable. Par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a réintégré dans les résultats imposables de la société Elle est au top la somme de 72 000 euros correspondant à cet abandon de créance.
7. En second lieu, la société Elle est au top soutient que les rehaussements effectués au titre de l'année 2012 auraient entraîné une variation négative de l'actif net de l'exercice 2013, et que le déficit au titre de l'exercice 2013, ainsi accru de 112 000 euros, serait reportable en arrière au titre de cet exercice. Toutefois, la circonstance que l'administration fiscale a corrigé l'actif au titre de l'exercice clos en 2012 en réintégrant les sommes correspondant au passif injustifié et à l'abandon de créance, n'a pu avoir aucune incidence sur le bilan de l'exercice clos en 2013, ni, par conséquent, sur l'existence ou le montant du déficit au titre de cet exercice. Par suite, le moyen doit être écarté.
Sur les majorations :
8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré [...] ". Aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable [...] ".
9. D'une part, la proposition de rectification du 10 juillet 2015 rappelle, en sa page 6, les termes de l'article 1729 présentement appliqués, indique le taux de la majoration, son assiette, à savoir, en l'espèce, le supplément d'impôt sur les sociétés notifié à la société à raison de la réintégration dans son bénéfice imposable d'un passif injustifié d'un montant de 40 000 euros, ainsi que son fondement juridique. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la majoration pour manquement délibéré doit être écarté.
10. D'autre part, l'administration fiscale, en relevant que l'apport en compte courant d'un montant de 40 000 euros attribué à une personne dont l'origine ne lui incombait pas ne pouvait pas ne pas être ignoré par la société compte tenu de l'importance de ce montant, doit être regardée comme établissant le caractère délibéré du manquement commis. Par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a appliqué la majoration de 40 % prévue par le a de l'article 1729 du code général des impôts aux rectifications résultant de la réintégration de ce passif injustifié dans le résultat imposable de la société.
11. Il résulte de ce tout qui précède que la société Elle est au top n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société Elle est au top est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Elle est au top et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris (pôle contrôle fiscal et affaires juridiques).
Délibéré après l'audience du 13 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- M. C..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 novembre 2020.
Le rapporteur,
K. C...
Le président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 19PA03718 2