Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 10 décembre 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 31 juillet 2018 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de confirmer la légalité de son arrêté du 20 juillet 2018 ;
3°) de rejeter la demande de M. B...devant le Tribunal administratif de Melun.
Il soutient que le Tribunal administratif de Melun a entaché son jugement d'une erreur d'appréciation quant à la menace pour l'ordre de public que constitue le comportement de
M.B....
La requête a été communiquée à M. B..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Par un courrier du 8 avril 2019, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code des relations entre le public et l'administration,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Julliard,
- les conclusions de Mme Jayer, rapporteur publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant portugais né le 12 octobre 1965, a été condamné par le Tribunal correctionnel de Bobigny le 20 août 2015 à une peine de trois mois de prison pour des faits de menace de mort matérialisée par écrit, image ou autre objet, puis le
22 septembre 2016 à une peine de cinq mois de prison pour des faits de violence sans incapacité par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité. Par un arrêté du 20 juillet 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et lui a interdit de circuler sur le territoire français pendant un délai de trois ans. Le préfet de la Seine-Saint-Denis relève appel du jugement du 31 juillet 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a annulé les décisions précitées du 20 juillet 2018 ainsi que celle par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a placé M. B...en rétention administrative.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision de placement en rétention ne peut être contestée que devant le juge des libertés et de la détention, dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa notification (...) ".
3. Par le jugement attaqué du 31 juillet 2018, le Tribunal administratif de Melun a annulé la décision du préfet de Seine-Saint-Denis du 20 juillet 2018 plaçant
M. B...en rétention administrative. Il résulte toutefois des dispositions précitées que le juge administratif n'est pas compétent pour statuer sur les contestations portant sur les décisions de placement en rétention. Il y a lieu en conséquence d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a annulé la décision plaçant M. B...en rétention administrative.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 2° L'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans ; (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " ; 5° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans. (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. B...déclare être entré à l'âge de 5 ans en France et y résider depuis lors, soit 48 années, y avoir effectué l'intégralité de sa scolarité, s'y être marié en 1987 avec une ressortissante française dont il est divorcé et avec laquelle il a une fille âgée de 32 ans. Dès lors que l'ancienneté de son séjour sur le territoire français n'est pas contestée par le préfet, celui-ci ne pouvait, en application des dispositions précitées, prendre à l'encontre de M. B... une mesure d'obligation de quitter le territoire français. L'illégalité de cette décision entraîne, par voie de conséquence, celle des décisions prises sur son fondement fixant le pays de destination et d'interdiction de circulation sur le territoire français. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du
20 juillet 2018.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°1806083 du 31 juillet 2018 du Tribunal administratif de Melun est annulé en tant qu'il a annulé la décision du 20 juillet 2018 du préfet de la Seine-Saint-Denis plaçant M. B...en rétention administrative.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête du préfet de Seine-Saint-Denis est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B....
Copie en sera délivrée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, président de chambre,
- Mme Julliard, présidente-assesseure,
- M. Mantz, premier conseiller.
Lu en audience publique le 31 mai 2019.
La rapporteure,
M. JULLIARDLe président,
M. HEERSLe greffier,
F. DUBUY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18PA03861 4