Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 mai 2017, et un mémoire complémentaire enregistré le 21 décembre 2018, M.A..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de Strasbourg du 24 janvier 2017 ;
2°) de prononcer la décharge des rappels d'impôt sur le revenu et des majorations correspondantes auxquels il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête n'est pas tardive dès lors qu'il convient de lui accorder le bénéfice du délai de distance ;
- son adresse à Berg (Allemagne) devait être considérée comme effective à compter du mois de décembre 2007 ; l'administration en était informée dès le mois de janvier 2008 ;
- la procédure est irrégulière dès lors que la demande d'éclaircissements et de justifications du 22 octobre 2009 lui a été envoyée à une adresse erronée ; par ailleurs la mise en demeure du 24 novembre 2009 a été adressée avant l'expiration du délai de réponse de deux mois initialement imparti ;
- la notification de la proposition de rectification est également irrégulière dès lors qu'elle lui a été envoyée à une adresse erronée ;
- il n'a pas été informé de la demande d'assistance administrative à l'Allemagne, ni de la réponse des autorités allemandes au moment où celles-ci ont été effectuées ; l'administration ne peut dès lors bénéficier de la prorogation du délai de reprise ;
- c'est à tort que l'administration a imposé les crédits bancaires identifiés sur les comptes allemands sur lesquels il a procuration en tant que revenus d'origine indéterminée ; ces sommes proviennent des sociétés dont il est le gérant et ont déjà été imposées.
Par un mémoire enregistré le 13 novembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bauer,
- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant M. C...A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A...est gérant de la Sarl Minzbrueck sise à Trimbach (Bas-Rhin) qui exploite une boulangerie, ainsi que de diverses sociétés en Allemagne. Il a fait l'objet le 31 janvier 2007 d'un procès-verbal dressé par l'administration des douanes, laquelle a constaté le manquement à l'obligation déclarative de sommes transférées en Allemagne. L'intéressé a reconnu, au cours de son audition, avoir en 2005 et 2006 détourné les recettes de la société Minzbrueck à hauteur de 426 550 euros pour les déposer sur ses comptes bancaires en Allemagne. L'administration fiscale a ensuite diligenté à son encontre par avis du 27 novembre 2007 un examen contradictoire de situation fiscale personnelle au titre de ces mêmes années. A l'issue de ce contrôle, par proposition de rectification du 1er mars 2010, établie selon la procédure de taxation d'office en application des dispositions combinées des articles L. 16 et l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, l'administration lui a notifié des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu au titre des années 2005 et 2006, assortis des pénalités correspondantes. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 24 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions litigieuses.
Sur les conclusions à fin de décharge :
2. Aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions (...) ". Pour être régulière, la notification des bases d'imposition prévue par ces dispositions doit être effectuée à la dernière adresse communiquée par le contribuable à l'administration fiscale et, en cas de changement de domicile, il appartient au contribuable d'établir qu'il a accompli les diligences nécessaires pour informer l'administration de sa nouvelle adresse. Toutefois, lorsqu'elle rapporte la preuve de ce que le domicile dont l'adresse lui a été indiquée présente un caractère fictif, l'administration peut retenir une autre adresse, si elle a établi qu'elle est celle où il réside effectivement. Enfin, le contribuable n'est pas privé des garanties que lui assure la procédure d'imposition au seul motif que le pli contenant l'acte de procédure a été envoyé à une autre adresse si ce pli lui est effectivement parvenu.
3. Il résulte de l'instruction, notamment des documents émanant des autorités allemandes produits par le requérant, que le 10 septembre 2007, la société B+ R Rent Gmbh, dont M. A...est le gérant, a acquis par un acte de vente notarié un immeuble sis 1a 1 b 3a et 3b Schlossstrasse à Berg (Allemagne), composé de deux maisons jumelées ayant fait l'objet d'un permis de construire délivré en juillet 2002. Ce bien a été loué par la société à son gérant qui justifie y avoir réalisé des travaux dans le courant de l'automne 2007, et notamment des travaux de raccordement à l'électricité et au service d'eau attestés par des factures en date des 16 novembre et 11 décembre 2007. Pour sa part, l'administration fiscale ne conteste pas la validité de ces documents et pièces et se borne à évoquer, sans d'ailleurs le produire, le constat du service du cadastre allemand selon lequel l'adresse à Berg revendiquée par le contribuable correspondait en 2008 à un terrain non bâti. Dans ces conditions, compte tenu notamment des énonciations de l'acte notarié produit par le requérant, l'administration ne peut être regardée comme établissant que l'adresse dont se prévaut le contribuable aurait un caractère fictif, alors au surplus que ce dernier produit une photographie aérienne datée du mois de décembre 2007, dont l'authenticité n'est pas davantage contestée, confirmant que le terrain en cause supporte des constructions bâties.
4. Il est vrai que l'administration soutient que ce changement d'adresse ne lui a en tout état de cause pas été communiqué ou l'a été dans des conditions de nature à entretenir la confusion entre les différentes adresses du contribuable et fait en outre valoir que l'intéressé n'avait pas souscrit auprès de La Poste de contrat de réexpédition de son courrier. Cependant, il résulte du courrier de restitution des pièces établi au cours du premier entretien de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle du 29 janvier 2008, contresigné par le vérificateur, que M. A...a expressément signalé au service de contrôle son changement de domicile. Le contribuable produit également la copie du courrier en date du 1er février 2008 qu'il avait adressé au centre des impôts de Wissembourg dont il relevait ce courrier, dont la réception n'est pas contestée, ayant précisément pour objet de signaler son changement d'adresse à Berg. Enfin, il est constant que l'avis d'imposition du contribuable au titre des revenus de l'année 2007 lui a effectivement été adressé le 17 septembre 2008 à sa nouvelle adresse. Il s'ensuit que, nonobstant les imprécisions de certaines correspondances du contribuable, l'administration ne saurait soutenir qu'à tout le moins à cette dernière date, elle n'avait pas eu connaissance du changement d'adresse de M.A....
5. Dès lors, ainsi qu'il vient d'être dit, que le caractère fictif de la domiciliation en Allemagne indiquée par le requérant n'était pas établi et que l'administration avait été dûment informée de cette nouvelle adresse de domiciliation, il incombait à celle-ci de notifier la " proposition de rectification " du 1er mars 2010 comportant les bases établies d'office à l'adresse du 1a 1 b 3a et 3b Schlossstrasse à Berg. Or, il est constant que le pli contenant cet acte de procédure a été envoyé à l'ancienne adresse du contribuable 3 rue Principale à Trimbach (France). L'administration ne peut se prévaloir de ce que cette adresse est celle du siège de l'entreprise dont M. A...est le gérant dès lors que, le pli présenté le 4 mars 2010 ayant été retourné avec la mention " non réclamé ", elle n'établit pas que ce courrier est effectivement parvenu à l'intéressé. Il s'ensuit que ce dernier est fondé à soutenir, pour ce seul motif, que la procédure d'imposition dont il a fait l'objet est irrégulière.
6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de décharge.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1401034 du 24 janvier 2017 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : M. A...est déchargé des rappels d'impôt sur le revenu et des majorations correspondantes auxquels il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
2
N° 17NC01253