Procédure devant la Cour :
Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées le 18 octobre 2018 et le 14 novembre 2018, M.B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1802305 du 4 octobre 2018 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 30 janvier 2018 du préfet du Val-de-Marne ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté du 30 janvier 2018 a été pris par une autorité incompétente ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un vice de procédure en raison de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation en n'examinant pas la possibilité de lui délivrer un titre de séjour sur un autre fondement que celui invoqué ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code des relations entre le public et l'administration,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Mme Guilloteau a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant algérien né en 1978, a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence, sur le fondement des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par arrêté du 30 janvier 2018, le préfet de Val-de-Marne a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit. M. B...relève appel du jugement du 4 octobre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. B...est entré régulièrement sur le territoire français en avril 2012, qu'il a épousé en janvier 2017 une compatriote titulaire d'un certificat de résidence algérien valable jusqu'en 2022 avec laquelle il justifie d'une communauté de vie stable depuis le mois de novembre 2016 et avec laquelle il a eu un enfant né le 29 décembre 2017, selon l'acte de naissance produit pour la première fois en appel. Dans ces conditions, et alors même que l'intéressé n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-trois ans, le préfet du Val-de-Marne a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence. Par suite, la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence ne peut qu'être annulée, ainsi, par voie de conséquence que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2018 du préfet du Val-de-Marne.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
5. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu, le présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans la situation de l'intéressé, que soit délivré à M. B...un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de délivrer ce titre dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais liés à l'instance exposés par M. B....
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1802305 du 4 octobre 2018 du Tribunal administratif de Melun et l'arrêté du 30 janvier 2018 du préfet du Val-de-Marne sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à M. B...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B..., au préfet du Val-de-Marne et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président,
- Mme Larsonnier, premier conseiller,
- Mme Guilloteau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 avril 2019.
Le rapporteur,
L. GUILLOTEAULe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA03348